C’est aux environs de 22h, le 2 décembre, que l’examen en 3e lecture de la proposition de loi de déconjugalisation de l’ Allocation Adulte Handicapé (AAH) s’est joué. Les députés de tous les groupes d’opposition ont déposé et soutenu des amendements de rétablissement du texte adopté le 12 octobre dernier par le Sénat; les députés de deux des trois groupes de la majorité gouvernementale s’y sont opposés par 30 voix contre 21. Finalement, seuls les députés du MoDem et du parti présidentiel La République En Marche ont pris part au vote sur l’ensemble du texte, deux de ses membres votant d’ailleurs contre. Les députés du troisième parti de la majorité présidentielle, Agir Ensemble, ont en effet rejoint les parlementaires des autres groupes de droite et de gauche dans leur approbation de la déconjugalisation : Les Républicains, Socialistes et apparentés, UDI et Indépendants, Libertés et Territoires, La France insoumise et Gauche démocrate et républicaine et les non inscrits. Ce vote en 3e lecture marque la fin d’une proposition de loi qui ne survivra pas à la fin de la XVe législature de la Ve République qui s’achèvera dans quelques semaines.

Assénés lors de cette soirée du 2 décembre, il faut bien qualifier les arguments défendus par Madame Cluzel tels qu’ils sont : réactionnaires. En réaffirmant la primauté des solidarités familiales chères à l’ex-Premier ministre François Fillon récemment condamné à deux ans de prison ferme pour détournement de fonds publics, la Secrétaire d’Etat renvoie les personnes handicapées à l’époque d’avant la création de l’AAH en 1975, où les adultes handicapés qui ne travaillaient pas ou ne pouvaient travailler n’avaient aucun revenu, survivaient dans la dépendance familiale. L’AAH a ouvert à ses bénéficiaires la possibilité d’accéder à une vie autonome, de construire leur vie, sans vivre sur un grand pied mais comme elles l’entendent. Madame Cluzel ne veut pas de cette vie autonome et finalement libre : pour elle, un bon handicapé est un handicapé qui travaille au nom du dogme maintes fois asséné « nul n’est inemployable ». Elle inscrit là ses pas dans ceux de Nicolas Sarkozy, ex-président de la République (et autre repris de justice condamné deux fois à un an de prison ferme.) Réactionnaire, Madame Cluzel l’est également quand elle affirme son opposition à l’interruption volontaire de grossesse en reprenant l’argument des anti-IVG : l’accompagnement des femmes, qui ne savent pas ce qu’elles font et qu’il faut donc aider, accompagner jusqu’à la naissance de l’enfant… pour mieux les abandonner ensuite à leur sort.

Ce n’est donc pas cette année que sera déconjugalisée l’AAH. La faute en revient au gouvernement en place et au Président de la République, Emmanuel Macron qui se représentera aux élections d’avril et mai prochains. Il appartiendra à chaque citoyen handicapé de s’en souvenir en mettant, sans illusion, son bulletin dans l’urne.

Laurent Lejard, décembre 2021.

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