L’arnaque a été rapidement approuvée par le Sénat, moins de 7 semaines après l’Assemblée Nationale : familles, enfants, jeunes et Maisons Départementales des Personnes Handicapées sont dépossédés de l’élaboration de l’aide et accompagnement des élèves handicapés au profit de l’administration de l’Éducation nationale. Examinée ce 19 juin par les sénateurs, la proposition de loi visant à renforcer le parcours inclusif des enfants à besoins éducatifs particuliers a été adoptée, et valide la création de Pôles d’Appui à la Scolarité remplaçant les PIAL (Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés). Si une commission mixte paritaire réunissant deux poignées de députés et sénateurs doit encore trancher les différences entre les textes adoptés par les deux assemblées, la création des PAS ne sera pas remise en question, l’Educ’ nat’ pourra donc les déployer partout d’ici la rentrée 2027. 500 le seront dès la prochaine rentrée scolaire, en remplacement des très décriés PIAL.
Présentée hyper positivement par les deux ministres en séance hier, Élisabeth Borne pour l’Éducation nationale et Charlotte Parmentier-Lecocq au titre du Handicap, l’expérimentation des PAS est en fait un échec. Sur les quatre départements concernés, l’Éducation nationale et l’Agence Régionale de Santé n’ont collaboré que dans un seul, l’Aisne, a relevé la sénatrice socialiste Marie-Pierre Monier, « il y a d’autres endroits où la coopération entre les deux a été très difficile. » Et si la mise à disposition d’un ordinateur pour un élève handicapé est très rapide, il est nécessaire de faire une demande à la Maison Départementale des Personnes Handicapées pour obtenir les heures d’ergothérapeute nécessaires à l’apprentissage d’utilisation d’un tel matériel. Dans l’un des départements expérimentaux, une famille fait une demande à la MDPH et le PAS cesse de s’occuper de l’enfant, pas dans les autres ajoutait la sénatrice socialiste Colombe Brossel. Face aux arguments, les deux ministres l’ont joué demain on rase gratis : elles communiqueront des données, informeront les parlementaires alors qu’elles n’ont pas voulu le faire avant, il y aura des budgets supplémentaires et bien évidemment tout sera beau, demain…
Or, à partir de septembre prochain c’est l’administration de l’Educ’ nat’ qui décidera des matériels et personnels nécessaires aux élèves à besoins éducatifs particuliers. Cela concerne donc un plus grand nombre d’enfants et jeunes sans que ces publics soient clairement définis, ce sera donc au cas par cas selon les territoires et volontés des services académiques : « On n’a aucun chiffre sur le nombre d’enfants supplémentaires que ça va générer », déplorait le sénateur de droite Cédric Vial. Un public plus large et des moyens dont le dimensionnement reste inconnu, une expérimentation sans bilan et dont les quelques éléments connus sont plutôt négatifs, une ratification par détournement d’une proposition de loi, une mise à l’écart des syndicats, associations de parents d’élèves et personnels concernés, une concertation inexistante, toutes les conditions de l’échec sont réunies.
Laurent Lejard, juin 2025.