L’idée générale qui préside à la notion de réparation du dommage consiste à imaginer tous les modes de rémunération pour replacer l’individu dans la situation dans laquelle il se trouvait avant l’accident, qu’il s’agisse d’un accident lié à un imprévu de la circulation, une faute médicale ou tout simplement le fait d’un tiers ou d’une chose.

La responsabilité peut naître d’un contrat (contrat de transport, contrat de soins, etc.). On parlera alors de responsabilité contractuelle. Elle peut naître en dehors d’un contrat (accident de la circulation par exemple) et on parlera alors de responsabilité délictuelle. Par ailleurs, la jurisprudence a pu admettre dans certains cas une responsabilité sans faute.

Dans tous les cas, l’idée est de rétablir l’équilibre détruit par le dommage et de tenter de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si le dommage n’avait pas eu lieu. La jurisprudence a donc fait clairement poser l’idée d’une réparation du dommage intégral. Plusieurs questions vont se poser pour définir les contours de l’indemnisation et de ses méthodes. A quel moment faut- il se placer pour évaluer le dommage : au jour de l’accident, au jour du jugement, au jour de la consolidation? Quels sont les pouvoirs du Tribunal pour évaluer le préjudice physique, la souffrance, le préjudice esthétique? L’indemnisation sera- t-elle sous forme de rente ou de capital? Est- elle transmissible aux héritiers en cas de décès de la victime? Qui doit payer l’indemnisation à la victime et quelle est la place de la Sécurité Sociale?

Aujourd’hui, les tribunaux distinguent nettement le préjudice physiologique de la perte économique. Ceci est d’ailleurs tout à fait conforme aux résolutions du Conseil de l’Europe, distinguant le dommage matériel du dommage non matériel. La double difficulté consistera, d’une part, à cerner avec précision l’ampleur du préjudice dans toutes ses facettes (psychologique, physiologique, douloureux, esthétique, d’agrément, sexuelle, etc.) et, d’autre part, d’être en mesure d’administrer la preuve de la réalité et de l’importance de ces préjudices.

Il est évident que toute indemnisation est insatisfaisante dans la mesure où le seul moyen trouvé pour indemniser est l’argent, qui ne pourra jamais compenser la douleur ou la peine. Ceci est d’autant plus prégnant en matière de préjudice moral, notamment pour l’entourage d’une victime décédée.

Ces différentes questions, que nous vous proposons d’aborder dans une succession d’articles à venir, montrent la complexité liée aux questions de l’indemnisation, dans une organisation juridique de type latin, très éloignée de la conception américaine par exemple. A ce titre, les indemnisations allouées en France, notamment au titre du préjudice moral, n’ont aucune commune mesure avec celles qui peuvent l’être aux Etats- Unis. Les mentalités sont différentes, le système de Sécurité Sociale également. La place de cette dernière est importante en France et assure une solidarité en faveur des victimes. Ainsi, dans bien des dossiers, sans que les victimes en soient même forcément informées, les compagnies d’assurances responsables payent des indemnités importantes aux Caisses de Sécurité Sociale en remboursement des frais exposés pour la victime.

Il est important d’avoir toutes ces notions à l’esprit quand vient le moment de l’indemnisation et de l’acceptation ou non de la proposition d’indemnisation qui sera faite par l’assurance responsable. La vigilance s’impose pour ne pas être victime… deux fois.

Philippe Carlini, Avocat au barreau, CP Carlini et Associés, novembre 2002.

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