« C’est une avancée scientifique qui va donner beaucoup d’espoir aux personnes paralysées. » Le ton est enthousiaste sur France Info dès l’annonce, le 24 mai dernier, de l’expérimentation sur un quadragénaire paraplégique d’une stimulation électrique redonnant une marche autonome. La méthode repose sur la connexion du cerveau à la moelle épinière, au dessous de la section lésée des cervicales, pour transmettre aux nerfs commandant les muscles la volonté de se lever et de marcher. Techniquement, des électrodes ont été implantées dans le crâne du cobaye pour détecter les signaux électriques de la pensée lors de telle ou telle action. Ces signaux sont transmis à un ordinateur qui les traite pour les envoyer à un générateur d’impulsions implanté au dessous de la lésion de la moelle épinière. Le cobaye peut ainsi, après un long entraînement, se lever et marcher très lentement sur une courte distance et sol plat sans obstacles, en s’appuyant sur un déambulateur ou des cannes anglaises. Cette vidéo témoigne du résultat et de son utilisation limitée.

« La prochaine étape pour ces chercheurs est de miniaturiser ce système et le proposer à un maximum de patients, en industrialisant sa fabrication », conclut France Info. Plusieurs décennies seront pourtant nécessaires pour que cette marche électronique remplace l’efficacité du déplacement en fauteuil roulant : lui s’affranchit des sols en pente, rugueux, déformés, et permet de rouler sur des kilomètres. De plus, un tel système n’est utilisable qu’avec des personnes ayant conservé une masse musculaire suffisante pour tenir debout puis marcher. Et il laisse de côté les principales difficultés pourrissant la vie quotidienne des personnes paralysées, au premier rang desquelles l’altération ou la perte du contrôle des fonctions urinaires et sphinctériennes. Quels programmes de recherche y travaillent actuellement ?

Faire marcher un paralysé est spectaculaire. Cela met le chercheur à l’égal de Dieu qui fait remarcher les paralytiques, et réintroduit ces derniers dans la normalité des bipèdes. Cette réalité existera probablement dans l’avenir, mais hors de portée de nos vies vécues. Et en attendant l’éradication des paralysies par la recherche scientifique, nos sociétés conservent le devoir de devenir pleinement accessibles à ceux qui les vivent.

Laurent Lejard, juin 2023.

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