Après la remise, en juin dernier, aux ministres concernés d’un rapport sur l’accompagnement scolaire des élèves handicapés, on n’attendait pas grand chose du Gouvernement, tant l’habitude des « mesurettes » est ancrée dans la politique éducative. Mais cette politique a effectivement changé, axée sur la Refondation de l’école de la République, et la surprise était de taille le 22 août dernier, lorsque le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, a annoncé le recrutement en Contrat à Durée Indéterminé de 28.000 Assistants d’Éducation actuellement affectés à l’aide aux élèves handicapés.

Certes, il ne s’agit pas de titularisation dans la fonction publique, comme bien des commentateurs et associations l’ont imprudemment écrit, mais de contrats de droit privé sans limite de durée. De quoi stabiliser l’accompagnement de la moitié des élèves handicapés, et fiabiliser davantage leurs études. Avec la création d’un métier de l’accompagnement, par fusion des formations existantes d’Auxiliaire de Vie Sociale et d’Aide Médico-Psychologique, ajoutait la ministre déléguée aux personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti. En quelques instants, les blocages des dix années précédentes avaient disparu, l’aide aux enfants et jeunes handicapés n’était plus une tâche mais un métier qualifié.

Certes, tout n’est pas réglé et l’année scolaire qui débute assurera la transition avec le nouveau dispositif : bouclage du cursus de formation, renouvellement pour un an des contrats échus, le temps de modifier la législation actuelle. Autre lacune, le sort des 26.000 Auxiliaires de Vie Scolaire affectés à l’aide aux élèves handicapés, embauchés sur des contrats aidés de deux ans : la pression associative, si ce n’est syndicale, leur permettra-t-elle de bénéficier d’un contrat définitif ?

Il est par ailleurs regrettable que cet accompagnement ne soit réservé qu’au temps scolaire, alors même que le ministre de l’Éducation Nationale a voulu réformer dès cette rentrée les rythmes scolaires. Mais les Assistants d’Education n’accompagneront pas les élèves handicapés dans les activités périscolaires mises en places par les communes, comme l’a confirmé la ministre déléguée à la Réussite Scolaire, George Pau-Langevin, en pleine contradiction politique : « Il est clair que le périscolaire étant de la responsabilité, le plus souvent, des collectivités [territoriales], il appartiendra à ces collectivités de passer des accords avec nous pour que ces personnels puissent aussi intervenir », a précisé la ministre, oubliant que le Conseil d’État, dans un arrêt du 20 avril 2011, a jugé que « l’aide à l’accueil et à l’intégration scolaires des enfants handicapés en milieu ordinaire n’est pas limitée aux interventions pendant le temps scolaire » et que l’État doit en conséquence financer l’emploi des auxiliaires de vie scolaire nécessaires. Ce traitement différencié, qui fait peser un risque d’exclusion de ces activités périscolaires, pourrait constituer une discrimination du fait du handicap puisque cette contrainte ne pèse pas sur les élèves dits valides.

Enfin, il n’est pas question pour l’Éducation Nationale de renoncer à un super-privilège financier : l’exonération du versement de sa contribution au Fonds pour l’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique qui lui a été accordée en 2006. « Je ne suis pas contre le fait que d’autres ministères puissent aussi avoir des assistants qui leur permettent de remplir leurs obligations », ajoutait en aparté George Pau-Langevin. Quel ministre retiendra ce « truc » ?

Laurent Lejard, septembre 2013.

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