Depuis le 1er mars 2010, les citoyens peuvent saisir le Conseil Constitutionnel lorsqu’ils estiment qu’une loi porte atteinte à leurs droits. Parmi les trois affaires en cours d’examen, nous apprend le quotidienLa Croix, figure celle d’une famille dont un enfant a été diagnostiqué myopathe en 2003 alors que les médecins avaient estimé que la mère ne pouvait pas transmettre la myopathie de Duchenne, bien que des ascendants en aient été atteints. La famille a ensuite été déboutée de sa demande d’indemnisation de l’intégralité de son préjudice résultant de l’erreur médicale, incluant la lourde prise en charge matérielle et humaine de leur enfant handicapé. Ce droit à indemnisation avait été ouvert pour la première fois le 17 novembre 2000 par la Cour de Cassation dans un arrêt devenu célèbre sous le nom de la famille concernée, Perruche. Une indemnisation supprimée le 4 mars 2002 par l’article premier de la loi sur le droit des malades, disposition aujourd’hui attaquée devant le Conseil Constitutionnel.

Les arguments avancés sont connus, dont le principal : les lacunes et limites de la Solidarité Nationale à laquelle revient la prise en charge des enfants nés handicapés du fait d’une erreur de diagnostic prénatal. Si la France a été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour l’application aux procédures en cours de la loi contestée, celle-ci s’impose toujours aux procédures engagées postérieurement à sa promulgation. C’est ce verrou qui pourrait sauter, parce que la Rapporteur public devant le Conseil d’Etat estime que la loi malmène le respect de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui est inscrite dans le Préambule de la Constitution de la Ve République. L’avocat de la famille demande que l’on revienne au principe selon lequel « toute faute qui cause un dommage à autrui entraîne obligatoirement réparation ».

La décision du Conseil Constitutionnel est attendue avec impatience. D’abord par les victimes, qui vivent leur lourd handicap au quotidien alors même que les médecins fautifs continuent d’exercer sans supporter les conséquences pécuniaires de leur erreur. Ensuite par les juristes, qui affrontent depuis des années les attaques incessantes des compagnies d’assurance avides d’aligner l’indemnisation du préjudice corporel sur le barème de la Solidarité Nationale. Enfin par l’ensemble des personnes handicapées, qui pourront s’appuyer sur la restauration du droit à indemnisation pour demander l’amélioration de leur prise en charge en invoquant la disparité de traitement. La réponse est attendue avant l’été. 

Laurent Lejard, avril 2010.

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