Le projet de loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Territoires) présenté au Parlement par Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, prétend améliorer l’accès aux soins. Or, qu’attendent aujourd’hui les patients ? Une offre de soins correspondant à leurs besoins, et par conséquent la formation et l’emploi de personnels qualifiés, disposant du temps et des moyens nécessaires pour s’occuper d’eux, une meilleure prise en charge par la Sécurité Sociale afin que tous, même les plus pauvres et les plus malades, bénéficient de ces soins, l’abrogation des franchises médicales et du forfait hospitalier, etc.

Rien de tout cela n’est prévu dans ce texte. Les grandes polémiques sur des amendements mineurs discutés à l’Assemblée Nationale et au Sénat ne peuvent nous cacher l’essentiel : la création des ARS (Agences Régionales de Santé). Dirigée par un directeur général tout-puissant nommé en Conseil des ministres, l’ARS devrait gérer un budget indépassable qui concernerait toutes les activités de santé d’une région : hospitalières, ambulatoires, et médico-sociales.

Pour cela, le directeur de l’ARS imposerait dans le secteur hospitalier des restructurations, en mettant en place des groupements de coopération sanitaires. La mutualisation des moyens est conçue en relation avec la rationalisation et la standardisation des soins. À une pathologie donnée correspondrait une durée standard d’hospitalisation, la plus courte possible. Cela a déjà commencé avec la T2A (Tarification à l’activité). Il est facile d’en imaginer les conséquences dramatiques. L’actuel plan de « restructuration hospitalière » prévoit 20.000 suppressions de postes ! Aux 1.035 hôpitaux publics actuels se substitueraient 300 « territoires de santé ». Dans la région parisienne, on passerait de 38 hôpitaux de l’Assistance Publique à 13 « territoires de santé ».

Dans la suite des États Généraux de l´Organisation de la Santé de 2008, le projet propose une définition de « l´organisation des soins de premier recours » centrée autour d’un médecin généraliste placé sous tutelle. Des protocoles de soins seraient négociés financièrement entre chaque médecin et le directeur de l’ARS, avec une rémunération « à la performance ». Que deviendraient alors les malades et handicapés bénéficiant d’une prise en charge au titre des ALD (Affections de Longue Durée), jugées trop coûteuses par la Haute Autorité de Santé ?

La Sécurité Sociale, entité juridique créée par le Pacte Social en 1945 pour garantir à tous les citoyens l’accès à la Santé, verrait sa disparition programmée puisqu’elle serait transformée en trésorier agent payeur du « panier de soins » au profit des directeurs des ARS qui deviendraient à sa place les interlocuteurs des médecins. Les malades doivent s’attendre à la perte totale de leur liberté de choix et de décision, à une dégradation majeure de l’accès et de la qualité de soins que cette loi HPST prétend protéger et améliorer.

Enfin, la loi HPST donnerait compétence aux ARS sur les établissements du secteur médico-social, y compris les Etablissement et Services d’Aide par le Travail. Même si on tente de nous rassurer en affirmant que leur vocation médico-sociale sera « clairement affirmée », les travailleurs handicapés concernés peuvent se faire du souci : tous les gouvernements successifs, depuis des décennies, se sont lamentés sur le coût excessif des ESAT (ex-CAT). On ne compte plus les projets de réforme visant à les aligner sur les Entreprises Adaptées (ex-Ateliers Protégés), donc de fait sur le secteur marchand, et ses exigences de profit, avec à la clé la baisse ou la disparition des subventions, l’exclusion des travailleurs handicapés les moins rentables.

Procès d’intention nous dira-t-on ? À cela nous répondons : regardez ce que les ARH (Agences Régionales d’Hospitalisation) font tous les jours en fermant des lits, des services, des hôpitaux entiers. Et imaginez ce que les ARS feront demain en étant dix fois plus puissantes !


Henri Galy, président du CDTHED, mai 2009.

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