Le 24 février dernier, Brice Hortefeux, ministre en charge des personnes handicapées, a reçu le président de l’Association des Paralysés de France, Jean-Marie Barbier. Au soir de cet entretien, le ministère a publié un communiqué de presse dont la rédaction ne pouvait de toute évidence qu’induire en erreur les journalistes qui ne sont pas rompus aux modalités d’augmentation de l’Allocation Adulte Handicapé. On y lisait en effet : « l’AAH augmente de 54 euros dès 2009 ». Cette augmentation représente 8,28% du montant actuel de l’allocation, près du double des 4,4% initialement prévus !

Interrogé sur ce point, le conseiller en communication du ministre, Geoffroy Didier, a dû admettre que le montant de 54€ correspondait à l’augmentation de l’AAH à compter du 1er septembre 2008 jusqu’à fin 2009. Il aurait peut-être été plus simple de le préciser dans le communiqué de presse, sauf à considérer que l’objectif était de survaloriser la revalorisation de cette prestation…

D’autre part, le même Geoffroy Didier a été dans l’incapacité de préciser à quelle période, et selon quelles modalités de concertation, serait présenté le projet de réforme de l’AAH sur lequel Valérie Létard, Secrétaire d’État à la solidarité, a multiplié les effets d’annonce depuis près d’un an. Ce retard à l’allumage a peut-être pour cause le contenu même de cette réforme qui consiste à recalculer le montant de la prestation tous les trois mois, alors que le Gouvernement avait décidé il y a deux ans de supprimer la formalité annuelle de déclaration de revenus en la cumulant avec celle qui est faite auprès du service des impôts. Autre disposition qui sera difficile à faire passer : la réduction à six mois maximum de la période de cumul de l’allocation à taux plein avec un salaire, période qui peut actuellement atteindre jusqu’à 24 mois.

Certes, cette augmentation globale de 54€ est loin d’être négligeable : en année pleine, elle équivaut à une mensualité de versement supplémentaire, un 13e mois en quelque sorte, sur la base du montant de la prestation au 1er janvier 2008, soit 628,10€. Mais au 1er septembre 2009, date de la dernière augmentation prévue cette année, l’allocation adulte handicapé sera toujours en dessous du seuil de pauvreté.

Cette manipulation des chiffres a éclipsé l’annonce de la création prochaine d’un Observatoire de l’accessibilité. On se souvient que la commission accessibilité du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées a adressé le mois dernier au Gouvernement le reproche de ne pas avoir institué un pilotage du chantier national de la mise en accessibilité du cadre bâti et les transports. Ce chantier est actuellement conduit dans le plus grand désordre. Le nouvel Observatoire de l’accessibilité réunira « des représentants de l’administration et des associations, afin que les efforts engagés dans ce domaine soient mieux suivis et qu’un effort supplémentaire soit accompli ». On notera que les professionnels des secteurs concernés ne sont visiblement pas associés, ni même les représentants des collectivités locales qui sont pourtant les acteurs majeurs de l’accessibilité. De plus, il existe déjà une instance de concertation réunissant l’administration et les associations, le Comité de liaison pour l’accessibilité du cadre bâti des transports (Coliac). Or, ce dernier est menacé de disparition dans le cadre de la refonte programmée du Conseil National des Transports dont il dépend !

Voilà donc un observatoire déjà « plombé » avant que d’être, d’autant que les organisations qui travaillent sur l’accessibilité ne manquent pas, dont une dépend directement du Gouvernement : la Délégation Ministérielle à l’Accessibilité (DMA) placée sous l’autorité du ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire (MEEDAT). Cette Délégation est déjà un observatoire de l’accessibilité, dont elle rend compte chaque année dans un rapport diffusé aux professionnels intéressés. Elle pourrait parfaitement, en disposant de moyens renforcés, remplir ce rôle de « pilote de l’accessibilité à tout pour tous ». Mais la création d’un nouveau « machin » répond davantage à des préoccupations politiciennes plutôt qu’à une réelle volonté d’agir dans la mise en oeuvre d’un chantier crucial pour l’intégration de plus de 6 millions de personnes handicapées en France.

Laurent Lejard, mars 2009.

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