Il était de bon ton de brocarder gentiment Madame Bachelot-Narquin, ci-devant ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative : ses gaffes et autres maladresses ont naguère fait le bonheur de maints éditorialistes. Cela fait quelque peu oublier que Madame Bachelot-Narquin tient dorénavant entre ses mains l’un des sujets les plus sensibles et exposés qui soit : la santé des Français.

Dans ce domaine, fini de rire : Madame la Ministre a décidé d’agir efficacement pour supprimer le déficit de la Sécurité Sociale. Pour y parvenir, elle a trouvé une solution toute simple, voire enfantine : s’il y a un déficit parce qu’il y a davantage de dépenses que de recettes, il suffit de supprimer les dépenses pour supprimer le déficit ! Action déjà engagée avec une succession de déremboursements de médicaments et produits de santé, et que Madame Roselyne Bachelot-Narquin voudrait poursuivre en supprimant la prise en charge de l’optique et des prothèses dentaires par la Sécurité Sociale.

Le remboursement des dépenses serait transféré aux mutuelles et assurances santé, dont la ministre relève l’augmentation importante des réserves financières. Une augmentation imposée par la réglementation européenne, afin de sécuriser des mutuelles et assurances qui ne peuvent ponctionner lesdites réserves pour rembourser des prestations.

A cet égard, Madame Roselyne Bachelot-Narquin a fait preuve d’autant de précipitation et de logique à courte vue que d’autres ministres, tels ceux qui voulaient récupérer les 70 millions d’euros remboursant à la S.N.C.F les tarifs sociaux consentis notamment aux familles et aux personnes handicapées. Tollé général et volte-face pour ces ministres, et pour Madame Roselyne Bachelot-Narquin également, qui affirme désormais n’avoir pas annoncé le déremboursement de l’optique ! Certes, 5 euros de remboursement sur l’achat d’une paire de lunettes une fois tous les cinq ans, voilà qui ne devrait pas ruiner les moins fortunés des assurés sociaux. Mais il convient d’ajouter à ces 5 euros le montant de la consultation médicale déremboursée, 26€. Plus le dépassement d’honoraire pratiqué par la plupart des spécialistes.

Touché en plein décollage, le nouveau projet de suppression des dépenses d’assurance-maladie n’est pas abandonné. Les observateurs constatent que les soins dentaires représentent 4 milliards d’euros, dont 700 millions pour les soins conservatoires de type « carie » et 800 autres pour les seules prothèses. Voilà du « grain à moudre » pour Madame Roselyne Bachelot-Narquin, et le risque qu’après avoir obtenu le déremboursement des prothèses dentaires, elle soit tentée de l’étendre aux autres prothèses : celles qui permettent à des personnes amputées ou partiellement paralysées de marcher ou de manipuler des objets.

Et quand elle aura accompli son oeuvre de liquidation par le vide du déficit de la Sécurité Sociale, ne doutons pas que Madame Roselyne Bachelot-Narquin trouvera, avec ses collègues du Gouvernement, d’autres édifices auxquels s’attaquer…

Laurent Lejard, avril 2008.

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