Question : Qu’est-ce qui vous a conduite à chanter, écrire, composer ?

Kimka : 
Avant même de savoir parler, j’ai toujours aimé chanter ! C’est vraiment une manière de m’exprimer, dans les bons et les mauvais moments, que ce soit à l’hôpital, à l’école ou chez moi. Un jour, alors que j’étais en apprentissage de réceptionniste qui ne me passionnait pas du tout, une amie en voyage à Paris a vu le Téléthon, et remarqué que des jeunes se faisaient parrainer par des artistes, elle m’a conseillé de faire pareil. J’appréciais la chanteuse Kareen Antonn, je lui ai demandé de me parrainer. Avec beaucoup de chance et de hasard, j’ai pu la rencontrer, elle a accepté et pour le Téléthon Suisse, on a enregistré un premier titre, « Quand on veut on peut« , ma devise, et on l’a chanté à Montreux. Depuis ce jour-là, c’est devenu une évidence ! J’ai arrêté l’apprentissage pour me consacrer entièrement à la musique, au chant, pas seulement pour chanter, mais aussi montrer que ce n’est pas parce qu’on a un handicap qu’on ne peut pas réaliser ses rêves et vivre de sa passion. J’ai commencé à écrire des textes sans forcément les mettre en musique, je venais d’avoir 18 ans. Kareen Antonn a aimé mon premier texte, « Marcher dans son coeur« , elle a proposé qu’on fasse une deuxième chanson pour le Téléthon, au profit duquel on a édité un CD. Après j’ai eu la chance de rencontrer Orianne Collins, de la Fondation Little Dreams qui permet à de jeunes talents handicapés ou valides de se réaliser au travers de leur passion, dont des jeunes handicapés qui pratiquent les arts martiaux. J’ai eu envie de créer une chanson pour eux, « No difference« , pour faire tomber de nouvelles barrières entre personnes handicapées et valides. Maintenant, c’est ma vie. No difference est devenu une association et je chante avec ces karatékas lors de démonstrations sportives.

Question : Vous vous définiriez comme une chanteuse professionnelle ?

Kimka : Je pense que oui, parce que je ne fais que ça depuis douze ans. On peut parler de profession quand la passion devient la chose la plus importante dans la vie d’une personne. Chanter est avant tout une passion, et une passion peut devenir un métier quand on en vit. Pas financièrement, mais je vis de cette passion tous les jours !

Question : Comment combinez-vous en Suisse Romande le fait d’être chanteuse professionnelle et de toucher une rente invalidité ?

Kimka : En fait, ce n’est pas un problème parce que je ne touche pas d’argent. Mon but n’est pas d’être rémunérée, c’est de soutenir des causes. Pour moi, c’est quelque chose de positif de dire que je ne suis pas rémunérée. L’argent que je reçois, des dons ou pour la vente de CD, je le reverse à des associations que je soutiens.

Question : Quel est votre quotidien, vos passions, vos envies ?

Kimka : J’ai un rythme de vie différent, je dors très rarement avant 4 heures du matin et ma journée démarre assez tard, vers 10-11 heures, et j’ai pas mal de soins liés à ma maladie. J’aime composer, chanter, organiser des soirées-spectacles. Et autrement, la famille, des filleuls Mikael et Salma que j’adore et dont j’aime m’occuper. Je suis très sociable, j’aime le contact avec mes amis, la famille, sortir, voyager même si ce n’est pas toujours très simple. Pour que je sois comblée, j’ai besoin de mon ordinateur pour composer, d’une scène régulièrement pour m’exprimer, et d’être entourée par ma famille, mes amis et mes deux petites chiennes !

Question : Justement, pour votre métier vous voyagez; quels enseignements tirez-vous du regard des spectateurs sur une chanteuse couchée, qui ne danse pas ?

Kimka : Je suis très souvent accompagnée par le groupe de karatékas de No difference qui font leur démonstration, et j’ai la chance de partager la scène avec mes filleuls qui sont mes bras et mes jambes. Et le public apprécie de voir des enfants, parce que ce que j’aime, c’est apporter un côté familial. J’aime chanter, mais pour faire passer un message : on est handicapé, on est enfant, on est âgé, qu’importe, l’important c’est la communauté. Ce qui est également très important, ce sont les textes. J’aime énormément Edith Piaf, j’interprète aussi de nombreuses chansons de son répertoire. On n’a pas besoin d’avoir beaucoup d’animation pour faire passer un message, les gens sont concentrés et sont ouverts parce qu’ils voient une personne en fauteuil, couchée la plupart du temps parce que j’ai beaucoup plus de souffle quand je suis allongée. « C’est bizarre, pourquoi elle est allongée », et finalement, lorsqu’ils écoutent, le message que je transmets à travers mes textes donne envie d’en savoir plus. Cette curiosité crée le moment de l’échange, de la communication, et toutes les barrières tombent.

Question : Quels que soient les villes où les pays dans lesquels vous chantez ?

Kimka : Oui, partout. Je trouve que les Français et les Suisses sont très ouverts, très engagés. Au niveau de l’ambiance, les Français me semblent plus dynamiques !

Question : Quels sont vos projets ?

Kimka : J’ai créé un livre pour enfants, Anjoufflu, l’histoire d’un petit ange qui doit lutter pour trouver sa place. J’ai envie de développer davantage l’écriture mais sans arrêter de chanter, ça jamais ! Je prépare un Anjoufflu numéro 2, un voyage dans l’Orient. Ma mère vient du Liban, j’ai envie d’aborder à travers les yeux de ce petit ange différents sujets et conflits de cette région du monde. Je n’ai pas de tournée en 2018, pour prendre le temps de composer et écrire de nouvelles histoires, mais je répondrai volontiers aux invitations !


Propos recueillis par Laurent Lejard, janvier 2018.

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