« Je suis née malvoyante, précise Léna, ma vue s’est encore détériorée avec l’âge. Je n’ai que 2/10e à l’oeil gauche et rien au droit ». Elle a toujours travaillé, mais dans des emplois « subis ». Dans son premier livre, Vouloir pour vivre (Edition Des Ecrivains Associés), elle relate son désir d’épouser un homme plus âgé qu’elle, ce qu’elle fera, et le bonheur trop bref qui s’en suivit : un cancer emporte l’être aimé. Si son récit a été écrit dès la mort de son mari, elle ne l’a fait éditer que 25 ans plus tard. « J’ai vécu une période durant laquelle je voulais tuer le médecin qui avait entraîné mon mari dans la mort. Il a lutté jusqu’au dernier moment. Je voulais montrer dans mon livre la qualité des sentiments ». Léna l’a fait imprimer en gros caractères par solidarité, pour faire passer un message au plus grand nombre de lecteurs. « En même temps, je me suis épanouie, j’ai accepté de me présenter en tant que malvoyante. J’habite à Vichy, j’y assure pour le Gaipar (Groupement d’Action pour l’Insertion et la Promotion des Aveugles et Amblyopes) une permanence d’information; c’est un point de chute thérapeutique pour rompre l’isolement ». Léna refuse de pleurer sur son sort, elle veut mettre en évidence l’existence des malvoyants, même dans la vie active. Elle fait réaliser des démonstrations d’aides informatiques afin que les gens retrouvent un rôle social et professionnel. « Dans mon coin, je fais avancer. Les personnes peuvent parler de leur mal- vivre ». Léna constate que les personnes qui deviennent malvoyantes avec l’âge renoncent trop vite à la lecture, se replient sur la lecture par un tiers ou vers l’édition sonore, dont l’offre est réduite en quantité et en qualité.

Léna vient d’écrire une nouvelle, Lilou, qui sera lue et diffusée sur C.D audio au début de l’année 2004. « C’est l’éditeur de mes livres pour enfants qui offre ce support bénévolement ». Dans ces petites histoires, Léna parle de solidarité pour vivre ensemble, d’aide mutuelle pour vaincre la difficulté, elle traduit vers les petits ce qui a parfois manqué à sa vie d’adulte en mettant en scène des animaux. La crevette Rosette veut découvrir le monde et le baleineau Fanon, qui est désorienté et s’est échoué dans un étang, va la transporter et sera guidé par Rosette vers la haute mer…

Le chien perdu Broussaillon rencontre quant à lui le chien abandonné Vertèbre qui a été recueilli par un médecin; celui- ci veut chasser Broussaillon mais Vertèbre s’interpose et fait accepter son ami errant. Illustrées par Claire Molle, étudiante aux Beaux- Arts de Clermont- Ferrand, ces histoires pour les tout- petits tiennent en quelques pages mais contiennent beaucoup de la vie de Léna.

Ecrire, c’est son désir et sa vie, quitte à ce que ça lui coûte de l’argent. Pour son premier livre, Vouloir pour vivre, Léna a payé l’éditeur. L’impression du second, Lilou (Société des écrivains), est financée par l’éditeur mais il n’assure pas la distribution. « Ces maisons d’éditions n’ont pas de véritable réseau de diffusion, c’est moi qui fait le tour des librairies. Ce travail d’écriture ne m’assure pas de revenu ». Léna a été échaudée par la diffusion via Internet : ses correspondants lui demandent une copie électronique gratuite, pour ne pas avoir à payer un livre. « Je ne veux pas entrer dans ce jeu, on n’a pas le droit de demander ça à un auteur »…

Laurent Lejard, décembre 2003


Les livres pour enfants de Léna Basoff sont édités par les Editions de Beauvoir, 18 rue Valette, 63120 Courpière. Tél: 04 73 51 29 86. Quatre titres sont parus : Broussaillon et Vertèbre, Rosette et Fanon, Onyx et Nouchette, Cri- Cri et Va- Gabon. Prix : 3,50 euros chacun.

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