Va-t-on trouver davantage d’accessibilité numérique dans les activités non assujetties à l’obligation légale que dans les sites Internet des grosses entreprises et de l’Administration ? On peut se le demander quand on apprend qu’un éditeur de sites web ciblant les petites et moyennes entreprises, Linkeo, intègre la plupart des critères d’accessibilité dans la dernière version de son outil de création. Certes, son développement sur les marchés nord-américains, aux USA et au Canada, ne lui laissait pas le choix, elle devait créer un éditeur de sites web accessibles et elle a opté pour une solution unique pour tous ses clients. « On travaille pour des TPE-PME, à la réalisation de leurs sites web, référencement, réputation sur Internet, justifie Hugo Guilbert, responsable marketing. Dans ce cadre, on suit l’accessibilité dont on pense que la problématique s’accélère. L’an dernier, on était dans le chantier de refonte de nos logiciels, pour intégrer les dimensions accessibilité et économie d’énergie. »

Site web d'un encadreur réalisé par Linkeo

Linkeo emploie son propre système de gestion de contenu (Content Management System : CMS en anglais), Ideo3. « Cela fait 20 ans qu’on crée des sites Internet, ajoute Mathieu Partaux, chef de produit sites Internet. On s’est basés sur Green IT [collectif des experts de la sobriété numérique et du numérique responsable], sur des bonnes pratiques de pertinence du contenu, de bonne utilisation, et finalement d’accessibilité qui a accéléré notre démarche. Si on délivre à l’internaute le contenu qu’il souhaite mais qu’il ne peut lire, on perd la pertinence du contenu. On doit pouvoir naviguer au clavier et accommoder les liseuses d’écran, c’est un principe fondateur. »

Site web d'un assureur américain réalisé par Linkeo

Ideo3 respecte les critères d’accessibilité du web en suivant les guides wcag 2.0 et wcag 2.1 de l’organisation internationale World Wide Web Consortium (W3C). « On suit ces critères pour viser a minima le niveau AA, atteindre une accessibilité de base, et tendre au maximum vers le AAA, le niveau le plus élevé », précise Mathieu Partaux. Pour cela, Linkeo restreint la latitude de ses clients : « Dans l’ancienne version, le client avait une certaine liberté dans les couleurs et le contraste ; dans la nouvelle, on fait en sorte de ne pas sortir d’un cadre défini. Pour un client dont le logo est vert, on va générer une palette de couleurs imposée. Ça permet une certaine cohérence dans le contenu de la page. On donne la possibilité de grossir le texte, mais pas de le réduire au-dessous d’un minimum. On veut également procurer à l’internaute le respect de leurs paramètres utilisateurs, telle la bascule en mode sombre s’ils le choisissent, ou le contraste élevé. »

Le défilement d'images n'est pas automatique mais contrôlé par l'internaute

Si l’éditeur de Linkeo intègre une grande partie des règles d’accessibilité, il reste à traiter un sujet important, l’indépendance des interfaces, c’est-à-dire la navigation sur un site web au moyen de périphériques spécialisés : contacteurs, plage braille, pointeur oculaire, etc. « On n’a pas testé toutes les interfaces spécialisées, précise Mathieu Partaux. A priori, ça devrait fonctionner, mais je ne peux m’engager. Pendant longtemps, les navigateurs n’implémentaient pas toutes les normes. L’impression est que tous ont tendance à respecter les standards, et qu’on arrive à disposer de navigateurs compatibles avec moins de scripts et de lourdeur de pages. Il y a 10 ans, lors de l’implantation d’un nouveau standard, il fallait 4 ans pour le trouver dans les navigateurs, maintenant c’est un an. »

Linkeo ne considère pas le chantier comme achevé. « Ce n’est pas un travail qui est fini chez nous, on continue à le développer, complète Hugo Guilbert. Parmi nos critères de conception, on fait simple. Par exemple, on a regroupé des informations « contact » sur une page spécifique. On s’est débarrassés de ce qui ne serait pas utile, dans une approche d’éco-conception pour simplifier et frugaliser. » Ce qui a un impact sur la rapidité de téléchargement et affichage des pages, générant également moins de consommation énergétique : « L’argument écologique fonctionne en ville, et la rapidité d’affichage en zone rurale », conclut Hugo Guilbert. Economie d’énergie et accessibilité numérique peuvent donc faire bon ménage !

Laurent Lejard, décembre 2023.

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