Un petit retour en arrière : Émile Louis, qui fut chauffeur d’autocar pour le compte d’un Institut Médico Éducatif de l’Yonne (lire ce focus de janvier 2001) est soupçonné par la justice d’avoir, durant les années 1970, enlevé, violé et tué des jeunes femmes handicapées mentales. Or, le Droit français prescrit les meurtres au terme d’une période de dix ans sans acte d’instruction. En clair, si un assassinat est commis aujourd’hui et que l’enquête est classée sans suite à la fin de l’année, ce crime ne pourra plus être reproché à son auteur dès le 1er janvier 2013 même s’il en fait ensuite l’aveu public!

Afin d’éviter ce genre d’ignominie, il est fréquent que les affaires de meurtre ne soient pas classées et que l’autorité judiciaire « entretienne » la procédure d’enquête pour que la prescription ne joue pas. C’est ce qui n’a pas été fait dans l’affaire des disparues de l’Yonne, par laxisme des magistrats locaux en charge des dossiers. Le Conseil National de la Magistrature a diligenté une enquête afin de déterminer si cette malveillance est coupable ou simple résultat d’une indifférence à l’égard du sort de jeunes handicapées mentales.

Au-delà du cas Émile Louis, qui fait l’objet de poursuites judiciaires non prescrites pour viol dans un autre département français, c’est la chaîne de responsabilité et de complicité que l’on voudrait voir juger afin d’avoir la réponse à cette question : comment la société a-t-elle pu laisser massacrer dans la plus grande indifférence sept jeunes femmes handicapées mentales?

Laurent Lejard, février 2002.

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