C’est durant la période estivale, plutôt propice aux vacances et au farniente, que Ségolène Royal a dévoilé son plan d’action en faveur des personnes handicapées lors d’une communication au Conseil des Ministres du mercredi 18 juillet 2001. On pourra tout d’abord s’étonner du propos liminaire de la ministre : « En l’absence de statistiques précises, on estime à trois millions et demi le nombre de personnes qualifiées de ‘handicapées’ souffrant d’affections différentes à des degrés divers ». Bizarre, cela représente moins de 6% de la population française alors que des organisations internationales telles l’OMS ou l’OCDE situent aux environs de 10% la part des personnes handicapées dans la population des pays développés!

Mais examinons plutôt La mesure de ce plan d’action, celle qui a été mise en exergue par la presse nationale : un millier de postes d’Auxiliaires d’Intégration Scolaire (AIS) seront financés dans l’année qui vient afin d’aider dans leur activité scolaire environ 2.000 enfants. Ces AIS sont des Emplois- Jeunes (lisez des salariés recrutés par des associations et dont la rémunération est totalement prise en charge par l’État) et n’ont aucun statut professionnel ni qualification requise ; ils aident les élèves handicapés dans leurs déplacements et « autres actes de la vie quotidienne », pour la prise de notes de cours, la rédaction de devoirs, etc.

Cette mesure ministérielle a été conçue sur la base d’une enquête, aux résultats pour le moins étonnants, conduite par l’association Iris- Initiative dont la déléguée générale, Mireille Malot, a été nommée chargée de mission auprès de Jack Lang, ministre de l’Éducation nationale, pour l’étude des conditions de développement et la pérennisation des dispositifs d’intégration scolaire en novembre 2000 : l’étude ne mentionne pas le nombre d’enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire dans les départements français et on remarque des disparités difficilement explicables. Le département des Bouches- du- Rhône, par exemple, y caracole en tête pour le nombre d’AIS : 518 pour une population de 1,8 millions d’habitants. Avec la même population, les deux départements rhénans totalisent 130 auxiliaires, la Réunion 142 (avec un besoin supplémentaire de 45 postes) pour 600.000 habitants. Mais la lecture attentive de cette étude met en évidence un phénomène insolite : il ne semble pas y avoir d’enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire dans Paris et ses 2.100.000 habitants, comptant 22 auxiliaires d’intégration scolaire, sans le besoin d’aucun poste supplémentaire !

D’où viennent ces disparités ? De l’implantation géographique des familles ayant des enfants handicapés scolarisés ? Difficile à croire. En fait, et nous l’avons écrit ici à plusieurs reprises, les handicapés on ne les compte pas (cf: Edito du 15 décembre 2000). Et malgré toute sa bonne volonté, madame la ministre déléguée aux personnes handicapées continuera à rencontrer beaucoup de difficultés pour mettre en place sa politique : il lui faudrait d’abord avoir les moyens de savoir précisément combien il y a de personnes handicapées dans notre pays, quels sont leurs besoins spécifiques et dans quel secteur elles résident. C’est bien le minimum pour pouvoir programmer des équipements, financer des programmes d’intervention, adapter des infrastructures. Et pour initier un plan d’action utile…

Laurent Lejard, août 2001.

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