L’Union Générale des Auteurs et Musiciens Professionnels Aveugles (Ugampa) regroupe des écrivains, des compositeurs, des musiciens, des comédiens, des enseignants dans des disciplines artistiques. L’essentiel de son action concerne la musique vivante. Elle édite tous les deux mois une revue diffusée en braille, ou en format électronique, destinée aux sociétaires, aux mélomanes. Les sociétaires sont investis dans l’activité artistique. L’Ugampa en regroupe une centaine, ainsi qu’une vingtaine d’abonnés. L’Union a été créée en 1948 par René de Buxeuil (de son vrai nom Jean-Baptiste Chevrier 1881-1959), auteur de nombreuses mélodies dont la célèbre « Âme des roses« , chansonnier qui connut son heure de gloire dans les cabarets de Montmartre… et auquel l’écrivain Jean Genet dut son premier séjour en prison.

Le pianiste Bernard Boulanger la préside depuis deux ans : « J’y suis entré il y a vingt-cinq ans. On avait alors un local qui a été vendu depuis, rue du Faubourg Saint-Martin à Paris. L’association a failli disparaître; grâce à quelques volontaires, dont Agnès Robert, j’ai pu la relancer. Il n’y avait plus d’argent, le bail était résilié, l’ancien président était en train de la liquider ! »

Remise sur pied, l’Ugampa a repris ses activités : actions de communication et d’entraide, édition d’une revue d’information qui diffuse également des contacts utiles pour réaliser des concerts, des récitals. Elle réalise des transcriptions en notation braille de partitions musicales. Bernard Boulanger précise : « On assure la promotion des membres qui se produisent en public, publient leurs oeuvres. On effectue un important travail de mise en relation et de négociation avec des organismes, pour monter des spectacles à moindres frais ». Malgré cela, il demeure difficile d’assurer l’équilibre financier d’un concert, notamment à Paris, la location de salles coûtant très cher.

Bernard Boulanger paraît toutefois pessimiste pour l’avenir, déplorant une baisse assez nette de la pratique musicale chez les aveugles : « Les musiciens sont moins nombreux aujourd’hui, il y eut jusqu’à 300 membres à l’Ugampa. Quand on est aveugle, on a une prédisposition à la musique, alors que chez les voyants on favorise l’éducation musicale. Il y a 40 ans, le problème de l’éducation musicale se posait déjà. Quand j’ai fait mes études, j’ai voulu éviter d’entrer dans le ‘ghetto’ du musicien aveugle, en jouant l’intégration. L’éducation donnée dans les écoles ne permet plus de faire émerger des talents. Il faudrait mixer, mais en donnant des outils aux aveugles afin qu’ils se perfectionnent auprès des voyants. Actuellement, quelques aveugles enseignent la musique à des élèves voyants, et s’expriment d’égal à égal ».

La plupart des musiciens aveugles sont également enseignants, les autres sont amateurs. L’un des grands noms, parmi les membres de l’Ugampa, est Bernard d’Ascoli, pianiste, qui a maintes fois enregistré. « Bernard d’Ascoli, explique Bernard Boulanger, a été interprète durant quelques années, vivant de son travail. Maintenant il est revenu à l’enseignement. Il faut être mobile et performant, aller vite, ce qui est très dur pour un aveugle, nécessite de travailler davantage ».

En pratique, un musicien aveugle ne peut lire une partition et la jouer en même temps : impossible de déchiffrer « à vue », difficile de jouer en formation de chambre ou en orchestre. Un interprète aveugle doit jouer de mémoire, à l’exception des chanteurs lyriques qui, en dehors d’un spectacle mis en scène, peuvent lire leur partition braille : « Les interprètes voyants utilisent leur mémoire auditive, visuelle, tactile. Nous, il nous en manque une, et pour compenser, la mémoire du corps est essentielle, par exemple pour le piano. Et on ne dispose pas de l’exemple visuel des confrères pour apprendre, en étudiant leur gestuelle, la manière dont ils surmontent une difficulté. Il faut en être conscient pour rester à des gestes simples, tout en se formant avec les autres ».

Laurent Lejard, mars 2007.


Union Générale des Auteurs et Musiciens Professionnels Aveugles (Ugampa), 103 rue de Vaugirard 75006 Paris. Tél. 01 45 44 30 65, mél : ugampa@tele2.fr.

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