L’Institut d’Optométrie de Bures-sur-Yvette (Essonne) est une école privée sous contrat qui forme des élèves opticiens. Ils apprennent là leur métier : montage de lunettes, adaptation de lentilles de contact, vente de matériel basse vision. Un véritable magasin reçoit la clientèle et permet aux élèves de mettre en application leurs connaissances dans des conditions réelles.

Au sous-sol du bâtiment, quelques salles abritent une collection d’objets présentés au public dans un Musée de l’Optométrie. Son conservateur, Jean- Michel Jobard, précise qu’il s’agit de l’un des deux musées français consacrés à l’optique, le second étant installé à Morez, dans le Jura (Musée de la lunette).

Certains auteurs font remonter l’invention de la lunette à l’Antiquité romaine, Pline l’Ancien rapportant que l’empereur Néron avait l’habitude de placer devant l’un de ses yeux une grosse émeraude lorsqu’il assistait aux combats de gladiateurs. On ne sait si Néron en faisait usage de coquetterie ou de loupe. Si les historiens ne peuvent affirmer que les Chinois ont inventé les lunettes, ils sont toutefois les premiers à avoir employé des verres teintés.

Jean-Michel Jobard explique que les premières lunettes, appelées « clouants », ont été créées durant le XIIIe siècle: deux verres convexes sont sertis sur deux montures en bois articulées par un clou. Les premiers clouants apparurent en Italie. Le musée de Bures présente une reproduction de l’une de ces premières lunettes, un modèle provenant d’Allemagne et fabriqué vers 1350.

Durant les années 1500, le clou est remplacé par un « pont » rigide et les matériaux s’affinent, les lunettes gagnant en légèreté. Cette course au gain de poids semble marquer l’évolution de l’objet au cours des siècles. Pourtant, dès le 17e siècle, le diamètre des verres grossit, en Espagne, pour afficher un signe de richesse. On commence également à employer des matériaux nobles, tel l’or. A cette époque, on retient les lunettes au moyen d’un fil pris dans la perruque ou passé sur les oreilles.

Les premières branches apparaissent à la fin des années 1600, d’abord droites et venant s’appliquer sur les tempes puis articulées et enfin coudées, vers 1750. Le XVIIIe siècle est celui du face à main, le XIXe celui du pince- nez et du monocle. Les premières lentilles de contact, en verre, sont testées vers 1880. La forme anatomique « pentoscopique » est élaborée en 1932 : la monture suit la ligne de l’arcade sourcilière puis dessine une courbe qui couvre le champ de vision latéral et inférieur; jusqu’alors, les verres étaient ronds ou ovales. En 1945, à la faveur de la fin de la deuxième guerre mondiale, la diffusion de l’acétate de cellulose ouvre le champ de l’inventivité, les créateurs disposant d’un matériau qu’ils peuvent travailler au gré de leur imagination ce qu’ils feront abondamment durant les années 1960. C’est l’époque de l’invention du verre organique, de la fantaisie et de la couleur plus ou moins criarde, des dimensions gigantesques et de l’introduction de nouveaux matériaux pour les montures, dont l’aluminium. Quelques années avant, le verre photochromique minéral plus connu sous son appellation commerciale « photogray » était commercialisé. Les lunettes conçues en fonction des besoins particuliers des enfants sont d’invention récente, les premières ont une trentaine d’années : avant cela, celles qu’ils portaient étaient une simple réduction des modèles pour adultes.

Au gré des vitrines du Musée de l’Optométrie, vous pourrez suivre l’évolution des lunettes au fil du temps, et remarquer quelques modèles particuliers : lunettes pour glacier constituées de plaques métalliques avec des fentes très fines disposées en croix, lunettes à prisme pour lire allongé sans se tordre le cou, lunettes de correction prêtes à l’emploi et que l’on achète dans n’importe quel magasin aux Etats- Unis sans examen ni ordonnance, etc…

Enfin, si nous avons essentiellement exploré ici l’histoire de la lunette, le Musée de l’Optométrie présente également des appareils utilisés par les médecins pour évaluer les troubles de la vision et les opticiens pour fabriquer verres et lunettes. Divers appareils anciens, ainsi que des échelles d’acuité en alphabets aussi divers que l’arabe, le grec, le coréen ou le russe concluront votre visite.

Laurent Lejard, octobre 2003


Institut et Centre d’Optométrie, 134, route de Chartres 91440 Bures-sur-Yvette. Tél : 01 64 86 12 13.

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