Une ville pour Napoléon

Eglise Saint-Joseph et son parc, à Pontivy
Chapelle de Quelven

Aujourd’hui paisible et coquette sous-préfecture du Morbihan, Pontivy a été fondée au VIIe siècle par un moine, devenu Saint Ivy, qui lui a donné son nom. Fief de la pluriséculaire maison de Rohan (dont on reparlera plus loin), elle n’en a pas moins accueilli avec enthousiasme les idées révolutionnaires, rare îlot républicain dans un océan de chouannerie. Cela, et son emplacement à l’intérieur des terres, a motivé le choix de l’Empereur pour ce qui ne s’appelait pas encore une « ville nouvelle » mais qui, sous le nom de Napoléonville, a vu pousser longues avenues et bâtiments publics élégants. De cette époque et des suivantes (le projet a survécu au Premier Empire) subsistent une rue Impériale, une immense place Napoléon le Grand ainsi que de nombreux édifices, dont une imposante église Saint-Joseph, inachevée mais accessible par rampe, où sont organisées des expositions temporaires, notamment dans le cadre de la manifestation culturelle « L’Art dans les chapelles » organisée tous les étés depuis une vingtaine d’années. Une initiative originale pour faire vivre le patrimoine de la région en invitant des artistes de niveau international, sans oublier d’impliquer les habitants, et ce en toute accessibilité pour la plupart des édifices. Une médiation culturelle et des propos enregistrés de l’artiste sont disponibles dans chacun des lieux. L’Office de tourisme (sans doute l’un des plus atypiques de France puisqu’il est installé sur un ancien chaland, parfaitement accessible, du canal de Nantes à Brest) dispose de la liste, regroupée en « routes », des chapelles accessibles dans le cadre de ce festival qui rencontre un grand succès. Certaines, telle celle de Quelven, à Guern, accessible de plain-pied et richement décorée (avec une rare Vierge ouvrante), sont visitables toute l’année.

Abbaye de Bon-Repos au bord du lac de Guerlédan

À quelques kilomètres au nord de Pontivy, le lac artificiel de Guerlédan fait office de frontière entre le Morbihan et les Côtes-d’Armor. L’hydroélectricité est la ressource majeure de l’endroit mais les berges ont été aménagées (notamment l’anse de Sordan) de manière à accueillir les touristes, notamment handicapés, avec ponton de pêche, chemin de randonnée pour tous et restaurant accessible. En poussant plus avant votre exploration, vous découvrirez une abbaye cistercienne du XIIIe siècle, des forges du XVIIe et, sur les hauteurs, un site préhistorique, l’allée couverte de Cléguérec, particulièrement romantique au soleil couchant…

Un château pour les Rohan

Château de Josselin

Édifié sur un spectaculaire éperon rocheux dominant le bourg du même nom, le château de Josselin appartient à la même famille depuis des temps immémoriaux (avec une courte parenthèse durant la période révolutionnaire), le dernier héritier en titre, le duc Josselin de Rohan, politicien en retraite, habitant sur place. L’édifice, toujours imposant malgré les outrages du temps et les destructions imposées par Richelieu (qui n’aimait guère les forteresses en dehors de celles qu’il contrôlait), est ouvert à la visite. Laquelle se limite néanmoins au rez-de-chaussée, accessible avec aide (gros seuil). Le logis renaissance, à la façade finement ouvragée, a été rénové au XIXe siècle par un élève de Viollet-le-Duc : l’aménagement intérieur, très néo-gothique, s’en ressent mais la visite (guidée) ne manque pas d’intérêt, qui mêle intelligemment petite et grande histoire.

Cour du château de Josselin

Ne prononcez surtout pas ici le nom « du » cardinal de Rohan lié à la fameuse affaire du collier de la Reine : il n’appartient pas à la même branche de la famille (qui a par ailleurs compté cinq cardinaux), et le sujet est encore tabou, plus de deux-cents ans après les faits ! Vous pourrez en revanche évoquer le tout aussi célèbre, mais tout à fait régulier coup de Jarnac, redevable à Guy Chabot, l’un des fondateurs de la dynastie. L’esplanade du château offre un beau panorama sur la région et, en bas, sur de très élégants jardins ouverts au public du printemps à l’automne mais peu praticables en fauteuil roulant. L’étonnant musée de poupées, en cours de rénovation, devrait en revanche voir son accessibilité s’améliorer. Aucun stationnement réservé à proximité mais dépose possible à l’entrée supérieure du château (prévenir). S’il vous reste un peu de temps, prenez celui d’une flânerie dans le village, certes un peu pentu mais dont les vieilles rues offrent un spectacle charmant.

De l’or pour Brocéliande

Le trou du chêne à Guillotin, à Concoret

S’il est une forêt mythique, c’est bien celle de Brocéliande; à telle enseigne, d’ailleurs, que l’on ne s’accorde toujours pas sur sa localisation exacte, d’aucuns prétendant même qu’elle n’a jamais existé en dehors de la légende arthurienne ! Les Bretons, pour leur part, la situent autour de Paimpont, non loin de Rennes. Et de fait, les indices ne manquent pas, où le mythe rencontre la réalité, pour le plus grand bonheur des amoureux de Morgane, Viviane, Merlin, Lancelot et autres chevaliers de la table ronde. Le domaine s’étendant sur près de 10.000 hectares, mieux vaut disposer d’un véhicule si l’on souhaite faire étape dans quelques-uns des lieux emblématiques de Brocéliande, dont certains ont trait à l’Histoire bien réelle de la Bretagne. Faute de connaître sur le bout des doigts l’épopée arthurienne (et même si c’est le cas) il est vivement conseillé de faire appel à un guide : la magie des balades contées est ici un must dont il serait dommage de se priver ! Le Centre de l’imaginaire arthurien en propose de tous types et pour tous publics (y compris handicapé, sur demande préalable), à des tarifs tout à fait abordables.

L'Arbre d'Or en forêt de Brocéliande

Et l’or, donc ? On y vient : au Val sans retour, à l’ouest de Paimpont, la fée Morgane, demi-soeur du roi Arthur, retenait les chevaliers infidèles à leurs dames jusqu’à ce que Lancelot, fidèle à Guenièvre (si on peut dire, vu que celle-ci était l’épouse d’Arthur !) délivre les malheureux du maléfice. C’est là, dominant le Miroir aux fées (autre lieu magique dont les conteurs vous narreront l’histoire) que se dresse l’Arbre d’or, témoignage controversé mais très photogénique de l’incendie qui a ravagé la forêt en 1990. L’accès en fauteuil roulant nécessite un peu d’aide (sentier) mais l’endroit vaut vraiment le détour.

Vitrail du Graal dans l'église  de Tréhorenteuc

Dans le bourg voisin de Tréhorenteuc, ne manquez surtout pas la chapelle du Graal, due à un curé (décédé en 1979 et enterré sur place) féru d’ésotérisme et que sa hiérarchie espérait « oublier » dans ce coin reculé : raté ! La formule « La Porte est en dedans », gravée au-dessus de l’entrée, laisse à méditer… Parking aisé, toilettes adaptées derrière le petit bureau de tourisme.

Proche de Rennes, l’ESAT Les Jardins de Brocéliande rend hommage à la forêt éponyme par un parcours sensoriel « Écoute voir » évoquant les légendes arthuriennes. Deux autres parcours, « Réveille tes pieds » et « Active tes sens », hélas inaccessibles en fauteuil roulant, permettent de découvrir autrement nature, textures et matériaux. Le domaine, très vaste, offre par ailleurs une pleine accessibilité à ses bosquets et parterres de fleurs, ainsi qu’aux enclos à animaux de la ferme, dont une collection de volailles à damner un renard ! Restauration possible sur place, parking aisé, toilettes adaptées, jeux pour enfants.

Des mégalithes en pays de Redon

Mégalithes de Saint-Just

La Bretagne mystérieuse, on la retrouve à Saint-Just, aux confins de l’Ille-et-Vilaine, du Morbihan et de la Loire Atlantique, sur le second site mégalithique de Bretagne après Carnac. Un lieu magique en toute saison et par tous temps, que son relatif éloignement des grands circuits touristique rend plus fascinant encore, du fait d’une plus faible fréquentation, surtout en dehors des vacances scolaires: des kilomètres de landes ponctuées de menhirs, alignements et lieux funéraires (dont un, baptisé « château Bû », réellement spectaculaire) rien que pour vous !

détail de l'allée couverte dite 'Four Sarrazin' à Saint-Just.

Un stationnement réservé a été aménagé en entrée de site, sur le bord de la route, mais, si la première partie est praticable (avec aide) en fauteuil roulant, le reste requiert une joëlette, que la Maison du tourisme du pays de Redon met gratuitement à disposition sur demande (consultez ce document pdf). Ici comme ailleurs, des visites guidées et/ou contées sont proposées, qui permettent de mieux appréhender les lieux et leurs premiers occupants. L’extraordinaire site du « château Bû », protégé par des grillages, n’est ouvert que lors de ces occasions.

Cloître de l'église et sa tour romane, à Redon

À une vingtaine de kilomètres de là, Redon, discrète sous-préfecture de l’Ille-et-Vilaine, n’en affiche pas moins l’histoire millénaire d’une cité jadis florissante dont témoigne toujours son centre-ville, qu’il faut prendre le temps de parcourir afin d’en découvrir toutes les richesses.

La Maison du tourisme soigne particulièrement les visiteurs handicapés (physiques et sensoriels) en leur proposant, outre des conseils personnalisés pour un séjour dans la région, des visites adaptées, dont un itinéraire audioguidé disponible en téléchargement. Si vous arrivez en voiture, sachez que le parking situé à côté de l’office, en entrée du centre ancien, dispose de plusieurs emplacements réservés aux véhicules arborant la carte européenne de stationnement. Côté hébergements labellisés, en revanche, il faudra chercher en-dehors de la ville…

Des poissons et des livres…

Librairie Fleuriste La Souris des Champs à Bécherel ©Y.Gautier

Autres confins : ceux de l’Ille-et-Vilaine et des Côtes-d’Armor, entre Rennes et Dinan. Seuls les initiés ou les bibliophiles connaissent le joli village de Bécherel, place-forte médiévale juchée sur sa colline et désormais cité du livre aux multiples librairies et ateliers d’artistes. Une atmosphère bien particulière où la déambulation peut s’avérer ardue pour les personnes en fauteuil roulant (seuils d’entrée aux boutiques) mais que complète utilement la Maison du Livre et du Tourisme située en entrée de bourg et parfaitement accessible (avec toilettes adaptées), dont les expositions temporaires, sur des thèmes liés à l’édition, font référence dans leur domaine.

Zone de pêche partagée de l'étang de Bétineuc à Saint-André des Eaux

Et les poissons, alors ? On en trouve dans les livres, certes, mais plus certainement, et bien vivants ceux-là, à quelques encablures de Bécherel, toujours pour les initiés (mais pas forcément bibliophiles) : l’étang de Bétineuc, dans les Côtes-d’Armor, a fait l’objet, par la fédération départementale de pêche, d’aménagements handipêche tout à fait originaux qui devraient faire école. Outre des postes adaptés installés aux bons endroits (ce n’est pas systématique : posez la question aux handi-pêcheurs !), un long ponton « tous publics » a été aménagé le long du practice pour initier les pêcheurs en herbe aux subtilités de ce loisir : berge surbaissée avec garde-corps et chasse-roues sur sol stabilisé… Une véritable invitation à la pêche, d’autant que ça mord vraiment à tous les coups ! Seul bémol : il faut ensuite relâcher le poisson…

D’autres embruns

Un voilier au large de Binic ©CDT22-Cécile Le Brun

À l’est de la baie de Saint-Brieuc, sur la côte de Goëlo, Binic se présente plaisamment comme « le grain de beauté des Côtes-d’Armor ». Et de fait, délicatement posé sur la mer, cet ancien port de pêche désormais dévolu à la plaisance a tout pour charmer : petites maisons sagement alignées le long du quai, humbles navires à l’ancre, atmosphère bon-enfant… À cent lieues des grosses machines touristiques ! La ville a, en outre, beaucoup investi dans l’accessibilité et l’Office de tourisme s’est pleinement impliqué dans une démarche visant à accueillir au mieux les visiteurs handicapés, y compris lors des événements culturels ou de loisir, avec notamment une visite guidée adaptée chaque vendredi en saison estivale. Les professionnels qui travaillent à l’Office, où une maquette tactile est mise à la disposition des déficients visuels, seront donc de bon conseil pour tout séjour sur place.

La baie de Pléneuf ©C Lienhard - CDT22

Autre monde, mais qui mérite tout autant le détour quand on en a les moyens financiers, sur la rive opposée de la baie de Saint-Brieuc, au coeur de la côte de Penthièvre : à Pléneuf-Val-André, fameuse station balnéaire créée ex-nihilo à la fin du XIXe siècle. Juste à côté du casino art-déco, face à la mer, le Spa Marin est le dernier-né des établissements de ce type en France, et donc celui où l’accessibilité a été le mieux pris en compte. Rien à redire côté accueil, design et confort, et les chambres adaptées ont la meilleure exposition, en dépit de salles de bains basiques et fort peu en rapport avec le standing de l’établissement. Les extraordinaires équipements de balnéo disposent par ailleurs d’un système de mise à l’eau tout à fait confortable. Le luxe, le calme et les petits-oignons se payent au prix fort mais on peut se contenter de la partie thalasso… ou se faire offrir cette délicieuse folie !

Jacques Vernes, mai 2012.

Sur le web, les sites officiels des Côtes d’Armor, du Morbihan et d’Ille-et-Vilaine proposent chacun une offre très complète en matière de tourisme adapté, avec la possibilité de préparer efficacement votre séjour. Consultez également ce site dédié, qui englobe toute la région. Par ailleurs, les personnels des offices de tourisme ayant été formés à l’accueil des visiteurs handicapés, n’hésitez pas à prendre directement contact avec eux pour des conseils personnalisés.


Nos adresses accessibles

Autour de Pontivy : la ferme de Kerveno, accessible de plain-pied, est un véritable havre de paix en pleine campagne. Décoration simple mais de bon goût, salle de bains fonctionnelle à ouverture large. Excellent accueil et bonne table d’hôte mettant en valeur les produits du terroir. À Pontivy-même, l’hôtel-restaurant Robic offre également une excellente table et des chambres accessibles. Vaste parking attenant.

Le port de Binic ©CDT22-Cécile LeBrun

À Josselin : La table d’O est un incontournable gastronomique local (mais à des prix raisonnables) dont la terrasse offre une très belle vue sur la vallée de l’Oust et le château. Accès malaisé en fauteuil roulant (seuil) mais toilettes adaptées. Pour dormir, rendez-vous sur le versant opposé, où les gîtes Logis de Sainte-Croix bénéficient d’une accessibilité sans faille, y compris pour les fauteuils roulants électriques, ce qui n’est pas si courant. La déco est basique mais la vue sur le château plaisante.

À Paimpont : le Relais de Brocéliande est un havre de luxe, calme et volupté qui se double d’une excellente table. Les deux chambres accessibles, en rez-de-chaussée, n’offrent pas une vue fantastique mais elles sont bien équipées, de même que le reste de l’établissement.

À côté de Bécherel : l’auberge Lucas, à Cardroc, dispose de chambres d’hôtes joliment agencées qui peuvent se transformer en gîte au besoin, grâce à une cuisine équipée et une vraie salle à manger. La vue sur la route (peu fréquentée) n’est certes pas folichonne mais les tarifs sont très raisonnables, la table du restaurant généreuse et l’accueil réellement attentionné.

À Binic : l’hôtel Benhuyc, récemment remanié, propose de vastes chambres au design soigné, dont certaines répondent aux normes les plus récentes en matière d’accessibilité tous handicaps. Dommage que la vue ne soit pas sur le port… Le restaurant Le Grand Large, attenant et accessible de plain-pied, propose quant à lui une carte généreuse autour des produits de la mer.

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