On compare fréquemment Marseille à Naples, toutes deux fondées par les Grecs en 600 avant Jésus- Christ… et ce n’est guère flatteur pour cette cité italienne qui a su, contrairement à sa prétendue jumelle française, conserver et mettre en valeur les différentes traces de sa très riche histoire. Au gré des rues, le visiteur parcourt les siècles, de l’antiquité grecque au modernisme contemporain en passant par le Moyen- Âge et le Risorgimento. Pour profiter de la fameuse baie de Naples et de son panorama légendaire (a découvrir de jour et de nuit), vous pourrez opter pour un hôtel situé à flanc de colline, dans le quartier du Vomero ou au pied de Capodimonte. Au matin, les brumes qui s’accrochent au Vésuve (dont les flancs très fertiles accueillent les vignes qui produisent le célèbre Lacryma Christi) donnent avec la lumière qui les traversent un spectacle à couper le souffle.

Se déplacer dans Naples, quel que soit le moyen de transport, nécessite quelques précautions. La circulation automobile y est en effet vraiment anarchique : les voitures passent au feu rouge, des scooters déboulent en tous sens (surtout interdits !), ça klaxonne sans cesse pour exiger le passage, les piétons traversent sans regarder. Les transports en commun sont diversement accessibles : renoncez aux tramways, en revanche le métro moderne est aisément utilisable et ses couloirs sont ornés d’oeuvres d’artistes contemporains; quant aux funiculaires, ils ont été mis en accessibilité de même que des lignes de bus. Malheureusement, les arrêts sont généralement occupés à toute heure par des véhicules en stationnement… On trouve au fil des rues de nombreuses places de stationnement réservé qui sont plus ou moins respectées : pensez à emporter votre Carte européenne de stationnement, elle vous permettra en outre de circuler dans les zones à circulation restreinte et réservée aux dérogataires.

Les rues du centre historiques se croisent à angle droit, la moitié étant en pente; peu de trottoirs et un sol de tuf volcanique poli et disjoint par l’usure rendent la circulation en fauteuil roulant plutôt pénible. Dans les musées et sites touristiques, vous paierez le tarif « standard » même si l’accessibilité est partielle voire inexistante. Les Napolitains, généralement affables, vous renseigneront et pourront vous venir en aide pourvu que vous fassiez l’effort d’engager la conversation dans un Italien même basique. La plupart comprennent le français ou l’anglais.

A visiter en priorité, le Musée archéologique national est l’un des plus riches qui soit au Monde. Il regroupe la plus grande partie des pièces trouvées lors des fouilles des cités et villas englouties par l’éruption du Vésuve, en l’an 79. Le musée comporte une vaste galerie de statues monumentales greco- romaines et une merveilleuse collection de camées dont la célèbre Tasse Farnèse. Les mosaïques, déposées pour la plupart des sites de Pompéi et d’Herculanum, sont splendides, surtout les miniatures, d’une finesse de dessin et de réalisation rarement vue ailleurs. Les salles présentent également de nombreuses fresques au rouge pompéien caractéristique. Des ustensiles de cuisine et une collection d’argenterie donnent en outre une idée parfois émouvante des objets que les (riches) romains utilisaient. Quant aux fameuses fresques et objets érotiques, ils sont exposés derrière les grilles d’un « cabinet secret » cadenassé et théoriquement ouvert à la visite uniquement sur réservation. Dans les faits, il semble que l’accès en soit souvent libre. Le musée est parfaitement accessible, même s’il faut parfois demander son chemin, et les vitrines sont généralement à la bonne hauteur pour un visiteur assis.

Toute proche du musée, la place Bellini montre des vestiges de remparts grecs. La via dei Tribunali abrite quant à elle les artisans qui fabriquent les célèbres crèches napolitaines (« presepe » en italien). Leur travail est fin, expressif, ancré dans la vie quotidienne. Rien à voir avec nos crèches provençales ! Dans cette rue, l’église San Lorenzo Maggiore est l’une des rares que vous pourrez visiter si vous êtes en fauteuil roulant, elle a un seuil franchissable avec aide.

Naples est une ville pieuse, voire superstitieuse, dans laquelle se réalise chaque année le « miracle » de Saint Janvier, protecteur de la cité : le sang du saint, conservé dans une ampoule, est censé se liquéfier dans les grandes occasions. De nombreux oratoires ornent les rues, fleuris et éclairés par des cierges mais également des croix lumineuses et des auréoles au néon !

Niché derrière ses hauts murs, le complexe religieux de Santa Chiara comporte un cloître extraordinaire dont les murets et piliers de pergola sont revêtus de majoliques à motifs fleuris et champêtres dans le goût espagnol. Un petit musée attenant présente quelques pièces d’art religieux dont des reliquaires (certains avec reliques !). Une passerelle donne accès aux restes d’anciens thermes romains que l’on parcourt sur des passerelles de bois. Dans une pièce donnant sur le cloître, une immense crèche napolitaine déploie ses saynètes, mais deux marches constituent un obstacle à la visite. En quittant Santa Chiara, dirigez- vous vers la place Gesù Nuovo, vous arriverez face à une façade diamantée, celle de l’église des Jésuites outrageusement baroque avec ses effets de pont à la croisée du transept, ses marbres multicolores, ses ex-votos par centaines et ses dévots en prière. Curiosité italienne qui peut faire sourire : dans les églises, des ampoules électriques remplacent les cierges, les offrandes se faisant en actionnant un interrupteur…

La Chartreuse San Marino, perchée sur sa colline (vue imprenable sur la ville !), contient une fabuleuse collection de crèches napolitaines des 18e et 19e siècles et leurs envolées d’anges chères à l’écrivain Dominique Fernandez, grand amoureux de Naples comme Stendhal, son illustre prédécesseur. L’accès fauteuil se fait par une rampe située à droite de l’escalier donnant sur le cloître.

Au sein du même bâtiment, un autre musée est tout entier consacré à l’histoire de la ville : tableaux, cartes, maquettes, meubles précieux sont installés dans les anciennes cellules des moines. Ne pas oublier de visiter la chapelle baroque, aussi richement décorée du sol au plafond que l’église des Jésuites évoquée ci- avant. Deux larges marches et un seuil permettent un accès avec aide depuis la cour.

Autre musée, celui de Capodimonte, ancien palais royal, est d’une richesse à faire pâlir bien des institutions internationales. Les salles sont nombreuses, immenses, hautes de plafond (ceux du premier étage sont tous décorés), ornées de tableaux de toutes époques, des primitifs aux impressionnistes italiens en passant par les maîtres flamands ou français. L’une des curiosités de l’endroit est une pièce dont les murs sont couverts de motifs en porcelaine représentant des chinois, des oiseaux et divers objets. La salle de bal est immense.

A voir également, la collection de porcelaine royale qui était alors fabriquée à Naples. L’accessibilité est parfaite: un ascenseur dessert les deux premiers étages et un autre le 3e. Le stationnement est possible dans le parking du parc côté Via Capodimonte en demandant aux cerbères qui gardent l’entrée.

une rue d'Herculanum.

On ne peut dissocier Naples des deux cités voisines englouties par le Vésuve, Herculanum (Ercolano) et Pompéi. Un train (accessible) dessert en outre ces sites antiques, les gares étant situées à un jet de pierre de leur entrée. Autant le dire tout de suite, seule Herculanum est accessible, au moins partiellement, aux fauteuils roulants. Côté Corso Resina, vous descendez en pente douce au sein de l’excavation : la cité romaine fut couverte en quelques heures par une vingtaine de mètres de tuf volcanique. Seule une petite partie de la ville a été mise à jour. Tout autour, l’habitat moderne donne une impression étonnante, encore accentuée par les bruits urbains. Une passerelle traverse l’ancien port, le littoral ayant gagné sur la mer plusieurs dizaines de mètres. C’est dans les entrepôts portuaires que les derniers habitants d’Herculanum trouvèrent refuge, avant d’être carbonisés par une coulée pyroclastique en provenance du Vésuve; des squelettes sont encore visibles par dizaines…

Il est possible de parcourir en fauteuil roulant les trottoirs de la cité, des passerelles de bois permettant de franchir les rues pavées. Il est en revanche difficile, même en étant aidé, d’entrer dans les maisons et de les visiter. On comprend mieux, en parcourant le site, comment s’organisait une ville romaine et l’importance de l’hygiène et du sport dans la vie des citoyens. Il convient toutefois de rappeler qu’une grande partie de la population était esclave ou pauvre et que l’on ne voit que l’habitat des gens aisés et des commerçants. Le site d’Herculanum est certes moins vaste et riche en découverte que celui de Pompéi, mais cette dernière est totalement impraticable en fauteuil roulant et très pénible à parcourir à pied. Assez curieusement, un parcours podotactile pour aveugles équipe l’entrée Porte de l’Amphithéâtre (la seule réputée accessible a minima) sur quelques mètres… Quant à la célèbre Villa des Mystères, elle peut être visitée avec aide par une entrée spécifique située au nord du site.

Et plus au nord de Naples, le voyageur disposant de temps trouvera une autre cité antique, Cumes, disparue plus paisiblement en léguant au monde son célèbre Antre de la Sibylle, mystérieux souterrain que l’on peut aisément emprunter en fauteuil. Naples et sa proximité étant très riche en sites remarquables, il faudrait évoquer ici les splendides villas de bord de mer à Posillipo (celles de Portici, très délabrées, attendent encore leur renaissance), le volcan à ciel ouvert de la Solfatara et ses émanations méphitiques (visite accessible), le tranquille et presque désolé lac Averne, entrée des Enfers pour les Anciens, ou encore le palais royal de Caserta et ses jardins infinis, Capri et son autre palais (celui de l’empereur Tibère) et encore la sublime Côte Amalfitaine à portée d’autoroute… Autant d’émerveillements possibles (et pour certains accessibles) qui font de la Campanie une région bénie des dieux à découvrir sans plus attendre !

Jacques Vernes, mars 2004.

Pour en savoir plus : Le site officiel de l’office de tourisme de Naples comporte une version française complète. Au sommaire, des fiches de visites thématiques, une information touristique, des rubriques consacrées à l’art de vivre, bref tout ce qui est utile à la préparation d’un séjour. Les collégiens de La Mure (Isère) évoquent le volcanisme à Naples et sa proximité. Un aperçu du Royaume de Naples et de ses blasons est disponible en suivant ce lien. Et des lycéens de Naples présentent (en français !) la célèbre chanson napolitaine.

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