Jacques Brel n’appréciait guère les flamands, dont il raillait les manières grossières et la langue (cf: Les Flamingands et Les Flamandes). Leur région contient pourtant des sites remarquables que nous vous convions à visiter. Après avoir flâné à Bruxelles, nous vous emmenons à travers les Flandres belges. Ces contrées ont été marquées par la présence de multiples occupations étrangères : liée à l’Angleterre au XIIe siècle, la Flandre prend son parti contre la France lors de la Guerre de Cent- Ans et devient vassale du duché de Bourgogne de 1384 à 1477. A la mort de Charles le Téméraire, ce sont les Habsbourg d’Autriche qui récupèrent la Province. Durant le XVIIe siècle, elle devient un champ guerrier entre cette dynastie et le roi de France Louis XIV : de nombreuses villes sont détruites, dont le centre de Bruxelles, le sud de la Province est annexé par la France jusqu’à la fin du Premier Empire. Les Flandres intègrent le royaume de Belgique lors de sa création en 1831. Elles sont toutefois à nouveau dévastées lors de la Première Guerre mondiale (1914- 1918), des villes comme Ypres ayant été presque complètement détruites. Depuis 1988 et la nouvelle Constitution belge instituant le fédéralisme, les Flandres forment une région autonome, les deux autres étant la Wallonie et Bruxelles.

Anvers est la grande ville du nord. Frontalière des Pays- Bas, elle dispose du second port maritime d’Europe. Maritime parce que directement relié à la mer par l’Escaut, tous les bassins et quais étant situé le long de ce fleuve. La ville est notamment connue pour être le centre mondial du commerce du diamant. C’est dans le quartier de la gare centrale que se trouve la plus importante place d’échange de ces cailloux dont Marylin Monroe chantait qu’ils sont « les meilleurs amis des filles »… Alentour, de très nombreuses boutiques proposent leurs bijoux dans une débauche de lumière. Les bords de l’Escaut sont agréables à flâner, à proximité du Steen, seul vestige des fortifications médiévales, qui abrite un musée de la marine. En le longeant, vous verrez des embarcations de tous styles et même un sous- marin! Au- dessus, la promenade de bord de fleuve est agréable même si la rive opposée, bordée de grands ensembles d’immeubles d’habitation, ne présente guère d’intérêt.

Au nord, on distingue les grues et les darses du port. Si les remparts n’existent plus, les rues du centre suivent toujours le plan médiéval, étroites et pavées, parfois piétonnes. La tour de la Cathédrale est à la fois gigantesque et fine, de pur gothique flamboyant. L’église, accessible, est fermée à la visite durant ses (nombreux) offices religieux: elle présente notamment quatre tableaux du célébrissime peintre anversois Pierre- Paul Rubens. Toute proche, la Grand place est l’une des plus belles que l’on puisse voir en Belgique, bordée comme à l’habitude par les maisons des corporations; au faite du pignon de l’une d’entre elles, un Manneken Pis fait mine d’arroser le passant. Au centre de la place, une fontaine monumentale conte un épisode mythologique de la ville : le romain Brabo tranche la main d’un géant racketteur et la jette au loin, « hand- werpen » en flamand, expression qui a donné son nom à la ville.

Le folklore portuaire a disparu, le quartier des marins et des filles de joie a laissé place à des « maisons sociales », les HLM d’ici, dans un style qui s’harmonise avec l’architecture d’antan. Plus au sud, Anvers s’est doté récemment d’un musée d’art contemporain, le Mukha. Le Musée des Beaux- Arts comporte quant à lui une importante collection des maîtres de la peinture flamande, notamment de Quentin Metsys, Bruegel et Rubens (prêt de fauteuil roulant pour la visite et audioguide en français). L’un des tableaux les plus saisissants de ce musée est cette Vierge à l’enfant peinte par le français Jean Fouquet en 1451.

tempête de sable à Ostende

Ostende. La campagne flamande est parsemée de fermes aux volets rouges, au bétail abondant, aux pâtures verdoyantes. La Flandre occidentale est située sous le niveau de la mer, protégée par un polder. Ostende en est la ville balnéaire par excellence, littoral d’interminables plages de sable de fin bordant la Mer du Nord. Ici, l’urbanisme a souvent généré des constructions aussi moches que disparates. Le bâtiment de la poste témoigne néanmoins d’une conception monumentale assez avant- gardiste de l’architecture des années trente; on pourra lui préférer celle du Kursaal (Maria Callas y chanta dans les années cinquante) actuellement décrépi et en rénovation: ses immenses baies vitrées dominent la plage. Autre édifice remarquable de l’architecture Art Déco, l’hippodrome et son immense verrière courbe.

Au nord, près du chenal, le Fort Napoléon rappelle les velléités de Napoléon 1er à protéger son empire de l’envahisseur anglais. L’enceinte de pierres et de briques protège un bastion avec cour intérieure comportant une échappatoire souterraine. L’endroit n’a jamais connu la bataille et a servi de casernement, de musée d’histoire locale et d’entrepôts de munitions. Rendu à la visite, il est accessible par un cheminement nécessitant toutefois d’être aidé. Certaines pièces, ainsi que la terrasse, sont inaccessibles en fauteuil roulant. Un audioguide est disponible. Le restaurant gastronomique récemment installé vaut le détour.

L’homme célèbre d’Ostende, c’est le peintre expressionniste et caricaturiste James Ensor. Sa dépouille repose dans le cimetière de l’église Notre- Dame des Dunes, sous une grosse dalle de pierre, tout près de la plage. La mer du Nord est dangereuse et elle était déchaînée le jour de notre visite, la tempête assaillant les digues, balayant les estacades, contrariant le courant de la marée : la police empêchait l’accès à la promenade de bord de plage, sous la force du vent le sable envahissait par vagues la route littorale, une véritable apocalypse au soleil couchant !

Bruges. On l’appelle également la Venise du Nord et ses nombreux canaux justifient en partie la comparaison. C’est également une ville- musée à l’architecture ancienne globalement préservée. En cette année 2002, Bruges était Ville européenne de la culture et s’est doté d’une toute nouvelle salle de concert (Concertgebouw) d’architecture contestable. La plupart des fortifications médiévales ont disparu, seules quelques portes ont été préservées et paraissent presque neuves. Les maisons sont basses, en briques, avec des façades en escaliers « à la flamande ». La plupart des rues sont pavées, l’ensemble respire l’authenticité dans une ambiance toutefois très humide. Le Burg (ancienne grand place) est longé de bâtiments de tous styles dont l’Hôtel de Ville, gothique nous dit- on, sa statuaire étant récente. L’un de ses joyaux, la Salle Renaissance dans laquelle se tenait le tribunal, est malheureusement inaccessible en fauteuil roulant. La Salle Renaissance présente une gigantesque décoration sculptée dans le bois au dessus de la cheminée, figurant Charles Quint (très populaire en Flandres) et sa descendance. Un haut- relief en marbre incrusté dans le manteau de la cheminée présente des scènes bibliques. Un audioguide vous décrira tout ce qu’il faut en savoir. Toute proche, la Salle Gothique est une déception: elle date du début du XXe siècle ! Dommage car elle est accessible par ascenseur…

C’est probablement en parcourant ses canaux que l’on apprécie le mieux cette cité. De nombreux bateaux proposent cette visite mais il vous faudra être porté ou aidé pour y accéder. On remonte ainsi le fil de l’eau et les époques, découvrant la paix qui émane de ce qui est pourtant la ville la plus touristique de Belgique. Cette paix, on la retrouve également en parcourant le Béguinage, fondé au XIIIe siècle, dans lequel résident encore quelques religieuses, et dont le parc arboré incline au repos de l’âme et du corps. La réalité revient toutefois au galop au dehors, sous la forme du commerce local: les boutiques de dentelle, spécialité de Bruges, sont presque aussi nombreuses que les touristes !

Gand. Moins préservée que Bruges, Gand a toutefois redonné vie à son ancien port, qui recevait jadis des marchandises du monde entier. De chaque coté des quais, les maisons des corporations ont été rénovées ou finissent de l’être. Dégagé des voitures qui l’envahissait, le centre de cette ville industrielle, haut- lieu de la production drapière au moyen- âge, s’efforce de retrouver son cachet malgré bien des verrues architecturales récentes. La Cathédrale Saint- Bavon, dans laquelle Charles Quint fut baptisé, présente un polyptyque mondialement célèbre: le retable de l’Adoration de l’agneau mystique peint par Jean Van Eyck en 1432. Visite accessible et audioguide, bien sûr…

Derrière la Cathédrale, vous pourrez découvrir une maison dont le pignon est orné de diablotins virevoltants. En arrivant au pont qui traverse la Leie, une belle perspective montre les trois tours qui font la réputation de Gand: celles de Saint- Bavon, celle du Beffroi et celle de l’église Saint- Nicolas. En longeant les quais vers le nord, vous arriverez au pied du château des Comtes, ancienne forteresse qui demeure inaccessible, hélas. Gand se visite également au fil de ses canaux, dans les mêmes conditions qu’à Bruges. Le parcours vous fait en outre traverser quelques friches industrielles, longer des quartiers bordés d’immeubles laids et récents: la promenade en bateau y perd en beauté mais a le mérite de montrer une certaine réalité urbaine.

Quelques conseils pratiques que vous ne trouverez pas sur les guides « standard ». Un ouvrage recensant les activités accessibles vous sera particulièrement utile, c’est le guide Tourisme en Belgique pour personnes à mobilité réduite. Il présente chaque contrée, détaille une dizaine de villes importantes, comporte de nombreuses cartes routières et plans urbains, des adresses et conseils utiles, bref le seul guide dont vous aurez besoin ! Editions Touring/ Lannoo – Kasteelstraat 97 – B-8700 Tielt – Prix 24,95 euros + 4 euros pour frais d’envoi. Commande en ligne possible.

Circulation et stationnement.
 Rappelons les règles que nous évoquions récemment au sujet de la Carte européenne de stationnement : ne vous garez pas dans les rues où le stationnement est strictement interdit, ne conduisez pas et ne stationnez pas dans les zones piétonnes. Le stationnement de surface est gratuit dans toutes les villes belges sauf à Ostende, Blankenberge, Middelkerke, Knokke- Heist, Tongres, Aalter et Wavre; vous pouvez laisser votre véhicule sans limite de temps lorsque des panneaux mentionnent une durée limitée. Certains parkings autorisent les véhicules affichant une Carte européenne de stationnement à stationner gratuitement mais uniquement dans les emplacements réservés aux personnes handicapées.

Train. Des conditions tarifaires particulières sont proposées aux personnes qui peuvent justifier de leur handicap. Il convient de demander une carte spéciale à la Société nationale des chemins de fer belges plusieurs semaines avant votre voyage. Formulaire à demander auprès de la SNCB – Voyageurs National – Bureau VN. 021 A – Rue de France, 54 – boites 5-6 – 1060 Bruxelles. La SNCB édite également un « Guide du voyageur à mobilité réduite ».

Location de voiture.
 Nous n’avons pas connaissance de société proposant des véhicules aménagés. Seule la Fondation Cédric offre ce service, essentiellement destiné aux citoyens belges ayant un véhicule immobilisé pour cause de panne ou d’accident.

Langue.
 En Flandres on parle essentiellement le flamand mais de nombreuses personnes pratiquent le français. Nous vous conseillons toutefois de faire comprendre que vous venez de France, les flamands n’appréciant guère leurs voisins wallons francophones. Cette querelle linguistique est forte, cristallisant d’importants enjeux économiques: les Flandres sont une région plus riche que la Wallonie, accusée de profiter de l’argent flamand sans contrepartie.

Monnaie. L’euro arrange bien les choses. Soyez toutefois attentif aux paiements par carte bancaire : les tickets que l’on vous demande de signer comportent une ligne « Extra » qui correspond au pourboire que vous souhaitez éventuellement laisser. Inscrivez une somme ou rayez la ligne si vous ne souhaitez pas avoir une surprise désagréable au retour, le prestataire pouvant ajouter un chiffre à sa convenance sur la ligne si elle reste vierge. Sachez par ailleurs que les automates des stations services ne fonctionnent pas avec les cartes internationales (malgré les logos qui y sont apposés) et qu’il vous faudra vous adresser au pompiste pour utiliser la vôtre!

Musées.
 En règle générale, vous paierez plein tarif même si la visite est partiellement inaccessible. Des établissements proposent un audioguide en français, moyennant parfois un supplément de prix.

N’oubliez pas votre parapluie… et bon séjour en Flandres !

Jacques Vernes, novembre 2002.

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