« La ville dont le prince est un enfant » n’est pas une pièce facile. Ecrite par Henry de Montherlant (1895-1972) elle conte « l’amitié particulière » de deux élèves d’un collège catholique, Souplier et Sevrais. Le premier fascine l’abbé de Pradts, Préfet des études, qui manoeuvre pour séparer les deux collégiens, mais sera également broyé par sa propre machination. Homosexualité et pédophile s’inscrivent en filigrane dans cette oeuvre partiellement autobiographique que son auteur mit plus de 50 ans à faire représenter en France, et qui trouve des échos dans l’actualité judiciaire récente. La pièce est représentée jusqu’au 31 décembre 2006 au Théâtre du Nord-Ouest à Paris, dans une mise en scène de Jean Luc Jeener avec, entre autres comédiens, Pascal Parsat et le jeune Maxime Raoust. A 17 ans, ce dernier a déjà neuf années de travail professionnel, ayant joué dans une dizaine de téléfilms et séries. Il a tenu plusieurs rôles principaux, notamment dans « Papa maman s’ront jamais grands » (Jean-Louis Bertucelli, 2002), et « Du côté de chez Marcel » (Dominique Ladoge, 2003).

Sa première apparition, Maxime Raoust l’effectue à l’âge de huit ans, dans une publicité pour McDonald’s. Suivront d’autres apparitions publicitaires, notamment pour Canal Satellite. « Depuis que je suis petit, j’adore jouer, faire le clown, des jeux de rôle, une vraie passion. Quand je leur ai dit que je voulais devenir comédien, mes parents m’ont pris au sérieux; ma mère, styliste, m’a inscrit dans une agence de casting. Les mercredis, j’allais dans les agences, pour des auditions et des castings. J’ai toujours voulu faire du cinéma. Je suis arrivé au théâtre par le Conservatoire ». Maxime aurait bien aimé passer un baccalauréat théâtre mais les lycées qui le proposent à Paris et en région Île de France affichaient complet. « Mon père m’a dirigé vers le Conservatoire, je suis entré dans celui du 20e arrondissement après avoir passé plusieurs auditions. Le travail y est très intéressant; Pascal Parsat, l’un des professeurs, m’a donné ma chance en me proposant de jouer, dans La ville, le rôle de Sevrais ».

Maxime a dû acquérir la discipline exigée par le travail théâtral : « J’ai compris qu’il était difficile de retrouver chaque soir l’énergie nécessaire pour jouer la même pièce, c’est très formateur. Pour jouer Sevrais, je m’inspire de ma vie mais je ne suis pas Sevrais, je n’aurais pas réagi comme lui dans la même situation. Je fais la différence entre ma vie et le rôle que joue. J’ai tiré beaucoup de choses, en tant que comédien, en jouant ce personnage. Maintenant, je connais davantage mes responsabilités, à quoi je m’engage en jouant au théâtre. Le théâtre est un métier, il faut s’en donner les moyens. Le comédien ne voit pas le public, il doit rester concentré, maintenir une certaine distance. Mais on entend le public. Toute la difficulté du comédien, c’est d’affronter le regard des spectateurs ». Maxime est heureux de jouer, et il est ouvert à tous les répertoires, à tous les rôles, même s’il aimerait continuer à travailler dans le répertoire dramatique où il estime avoir davantage de facilités. « Avec les années, j’ai peut-être perdu un peu de mes talents de clown mais quand j’étais enfant je refaisais des sketches de Fernand Raynaud ! ».

Maxime Raoust a obtenu, en juillet 2006, un baccalauréat littéraire. Il voudrait bien entamer des études de cinéma mais le Conservatoire l’occupe durant une grande partie de la semaine, avec 16 heures de cours hebdomadaires. Il envisage de passer le concours d’entrée au prestigieux Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris (C.N.S.A.D). Tout en espérant que son handicap moteur ne constituera pas un obstacle mais sera vu comme une composante de l’être : « Je ne vois pas le handicap comme une force mais comme un aspect de la personnalité. J’ai des difficultés motrices, qui proviennent d’une méningite infantile. J’espère pouvoir, par un travail physique adapté, en réduire les séquelles dans les années qui viennent ». Sur la scène du Théâtre du Nord-Ouest, il semble toujours à la recherche du meilleur équilibre, une démarche qui lui donne d’emblée une certaine fragilité qu’il met avec talent au service de son personnage : « La pièce est montée avec une grande sobriété, mes parents l’ont adoré après avoir été un peu inquiets quant à l’argument. Mais pour moi, amitié et amour sont la même chose. Dans la vie, on n’expose pas souvent ses émotions. Les spectateurs viennent voir l’être humain, son reflet, même s’il résiste beaucoup ».

Laurent Lejard, novembre 2006.


La Ville dont le prince est un enfant, d’Henry de Montherlant. En alternance, jusqu’au 31 décembre 2006, au Théâtre du Nord-Ouest, 13 rue du Faubourg Montmartre 75009 Paris (salle accessible). Tél. 01 47 70 32 75. Mise en scène : Jean Luc Jeener assisté de Aurore Ly et Patricia Mesplié Avec Pascal Parsat (Abbé de Pradts), Germain Lainard (Souplier), Maxime Raoust (Sevrais), Vincent Taburet (Habert), Christophe D’Amico (Henriet), Robert Marcy (le supérieur).

Partagez !