Jeanne a dix-sept ans et depuis l’arrivée de son handicap, il y a quatre ans, nous n’avions plus pris de vacances. Pour renouer avec elles, nous décidons de passer deux nuits à Deauville. Nous avons choisi cette ville parce que les célèbres « planches » sont roulantes pour le fauteuil et que nous les avons connues du temps où Jeanne marchait sur ses deux jambes.

Une préparation nécessaire et minutieuse. Il nous faut trouver un hôtel accessible. Dans le Guide Michelin nous en repérons 5 ou 6 qui affichent le logo « fauteuil roulant ». L’accès n’est pas le seul problème, il faut également à Jeanne un lit médicalisé. Sur les 6 hôtels contactés par e-mail, 3 acceptent que nous installions notre matériel. Nous portons notre choix sur le « Yacht Club » du groupe Libertel. Le directeur de l’établissement est très attentif à nos besoins. Nous échangeons une dizaine de mails pour mettre au point les problèmes techniques, taille du lit, de l’ascenseur, etc. Nous apprécions énormément son intérêt pour notre famille.

Nous recherchons ensuite la société paramédicale susceptible de nous livrer un lit. C’est la société Parapharm de Saint Arnoult qui assurera la mise en place. Nous avons donc un lieu et un lit, reste encore à transporter le matelas qui ne se loue pas ! Tant pis, nous emmènerons celui de la maison, cela veut donc dire que nous ferons le voyage avec deux véhicules.

Le grand jour arrive : départ d’Evry-les-Châteaux (environs de Melun, Seine et Marne). Destination Deauville, 300 Km. Arrêt sur l’autoroute : génial, les places « handicapés » sont bien visibles même si, comme d’habitude, elles sont occupées par des valides… Les accès au restaurant et aux toilettes sont bien adaptés.

Voici l’hôtel : dès l’arrivée nous avons une angoisse, une marche, petite, sournoise, avait bien caché son existence ! Heureusement, nous avons une rampe portative. Nous devrons l’installer à chaque mouvement. Par contre, les ascenseurs et les chambres correspondent bien à nos attentes et à notre arrivée le lit médicalisé est déjà installé.

Promenade Normande. L’hôtel donne sur le port, à quelques mètres des planches. Nous décidons une promenade apéritive. Les trottoirs sont rabaissés une fois sur deux ce qui oblige Jeanne à rouler sur la route au milieu d’une circulation intense. A proximité des planches, tous les parkings ont des places handicapées bien délimitées. Mais là encore, nous constatons que les trottoirs ne sont pas rabaissés et il nous faudra faire pas mal de tour de roues avant de trouver une entrée accessible.

En centre ville, la rue principale est bien aménagée. Il nous arrive pourtant de devoir faire demi- tour pour pouvoir descendre d’un trottoir. Les terrasses des restaurants empiètent largement sur le passage et nous faisons régulièrement déplacer les consommateurs qui, dans l’ensemble, gardent le sourire. Les bars en terrasse ne posent pas de problème. Nous avons pris un repas au Drakkar. L’accès y est de plain- pied et l’accueil chaleureux.

A Trouville, le centre ville et les abords du port sont totalement accessibles. Les trottoirs sont larges et abaissés, la balade est agréable. Les places réservées sont nombreuses. Des rues piétonnes permettent un vrai lèche- vitrine. La plage est également bordée de planches « roulantes ». Nous avons visité l’aquarium : Jeanne ne paie pas, c’est une bonne surprise. L’accueil est très chaleureux et la responsable craignant que l’étroitesse de certains couloirs soit gênante, nous avons droit à une visite guidée très agréable.

Le déjeuner au Galatée ne posait aucun souci, l’accès est aménagé et l’accueil très chaleureux (seules les toilettes sont totalement inaccessibles). Au Casino, un ascenseur nous conduit directement à la salle de jeux. L’ensemble est aménagé. Mais Honfleur ne nous laissera pas un bon souvenir : il est difficile de circuler en fauteuil roulant dans cette ville. Les pavés, bien que très esthétiques, transforment vite la ballade en séance de vibromassage des plus désagréables!

Nous le constatons en permanence, il y a un grand manque d’informations destinées aux adolescents et jeunes adultes handicapés. Chaque fois que nous envisageons un déplacement, à Paris ou en Province, nous sommes confrontés au problème de l’accessibilité. Les ados ont envie d’aller au ciné, au théâtre, en boîte, bref de faire ce que font tous les ados. Les musées, l’architecture, les paysages ne sont pas encore leurs premières préoccupations. Jeanne utilise un gros fauteuil, une jeune fille que nous avons rencontré à l’hôpital emploie le même équipement, elles souhaitent se rencontrer sur Paris… Question : quel lieu agréable est susceptible de recevoir deux gros fauteuil roulant ? Comment stationner ? Comment accéder à l’endroit ? A nous de trouver les réponses, au quotidien.

Caroline Pistinier, novembre 2001.

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