Le tour du monde en 80 jours, ce roman mythique de Jules Verne a fasciné des millions de lecteurs… et également Xavier Sanjuan qui, à l’aube de ses 47 ans, en a pris argument pour réaliser le voyage de sa vie, ainsi qu’il le raconte : « Après avoir obtenu un congé exceptionnel, je me suis rendu à Singapour au mois de mars 2016 afin de chercher un traitement pour ma spondylarthrite ankylosante, et acquérir des connaissances en médecines traditionnelles chinoises et indiennes susceptibles de soulager mes douleurs. Les choses ne s’étant pas passé comme prévu, et apprenant que le traitement « miracle » que je cherchais n’existait pas plus à Singapour qu’en France, je suis allé à Kinokuniya (équivalent local de la FNAC) avec l’intention de trouver quelques livres qui pourraient m’occuper l’esprit en attendant de rentrer à Paris. » Eduqué dans l’esprit d’aventure, déjà grand voyageur quand il le peut, trouver dans cette grande librairie une édition en français, pour enfants, du Tour du monde en 80 jours a été le déclencheur d’une envie : « Il me restait 87 jours avant de revenir en France, j’ai eu envie de faire ce tour du monde. Je voulais faire quelque chose, pour montrer que je ne suis pas en verre ! » Au quotidien, son entourage professionnel a en effet pris l’habitude de le décharger des efforts physiques, quasiment jusqu’au port d’un dossier papier.

« J’ai attaqué ce Tour du Monde en 80 jours dans la soirée, et le lendemain matin entamé les démarches pour suivre les pas de Phileas Fogg. A cause ou grâce à mon handicap, j’ai décide que ce tour du monde je le ferai à vélo. Bref, deux jours plus tard je louais un VTT pourri pour la première étape à travers l’ile de Singapour, étape que je recommençai le lendemain suite à un problème de visa… De là, j’embarquai pour Hong Kong puis le Japon et San Francisco. Les casses mécaniques et les problèmes logistiques s’enchaînant, il me fallut revoir le trajet et le revoir encore. Le temps filait beaucoup plus vite qu’en vélo, et toute une semaine avait été perdue en Californie. » Dans cet Etat américain, il lui a fallu une semaine d’efforts pour réussir à acheter un vélo électrique, avec moult complications : « Je remontai donc les Etats-Unis jusqu’à l’Etat de Washington ou le vélo électrique rendit l’âme au milieu d’une forêt, en pleine chaleur. Heureusement, des gens m’ont vu et aidé. Encore une fois, la perte de temps allait être colossale. Encore une fois, il fallait revoir le parcours. S’embarquer sur un axe nord ouest/sud est. Option qu’au demeurant j’avais envisagé devant l’incertitude de l’obtention de mon visa américain et que pour tout dire je préférais au parcours de Fogg. D’abord aller jusqu’à Seattle avec un vélo électrique cassé et une remorque de 50 kilos le tout sous un soleil de plomb. De là s’embarquer pour l’Islande, l’Ecosse, l’Angleterre, la France, l’Italie puis, devant la non obtention du visa Indien, devoir encore changer le parcours, passer par la Malaisie, l’Indonésie, la Nouvelle Zélande et retrouver Singapour le 14 juillet dans la soirée, atteignant mon point de départ moins de deux heures avant le moment fatidique ! »

Entre deux avions, ferrys ou trains, Xavier Sanjuan parcourait les différents pays en vélo, avec une remorque bien chargée, et des émotions fortes notamment lors d’une descente sur route mouillée entre Canterbury et Douvres qu’il devait parcourir au plus vite pour prendre le bateau à temps…

« 80 jours ou j’aurais pris tous les risques, fonçant à toute berzingue pour un ferry ou un avion, puisé au fond de moi à la recherche de la dernière parcelle de force pour franchir des montagnes ou faire quelques mètres de plus. Puiser au bout de ma volonté quand j’étais perdu, déshydraté au milieu des forêts du grand Nord américain. Toujours garder l’espoir quand les poches étaient trop vides pour manger un repas chaud, et même dormir dans la rue. Trouver toujours une solution, rebondir, sentir mon corps s’affuter et passer sans problèmes là où j’aurais dû mettre pied à terre deux mois plus tôt. Rencontrer des gens extraordinaires, tels ces cajuns de l’Oregon. Sentir le plaisir des petites victoires du quotidien et celle d’avoir réalisé un rêve. Se régaler d’un monde fabuleux, ressentir, dévorer la vie, la liberté. Se sentir vivant et réalisé malgré le handicap. Mais pour tout dire, j’ai faim de nouvelles expériences. Et déjà je prépare une nouvelle aventure. » Nul doute, on la suivra !

Laurent Lejard, septembre 2016.

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