La sclérose latérale amyotrophique est l’une des plus redoutables parmi les maladies dégénératives, la seconde en France par le nombre de nouveaux cas chaque année. Elle atteint les fonctions motrices, progressivement, sans espoir de rémission, entraînant une lente paralysie tout en conservant l’intégrité des fonctions intellectuelles. La moitié des personnes atteintes décèdent dans les 18 mois suivant les premiers symptômes, la mortalité est de 85% dans les 5 ans. Longtemps les malades ont été démunis, laissés pour compte, jusqu’à ce qu’une association mobilise les pouvoirs publics. C’est lors des premiers Etats- Généraux de la S.L.A, en octobre 2000, que la prise en charge a commencé à évoluer: l’Association pour la Recherche sur la Sclérose latérale amyotrophique (A.R.S) fait comprendre à la Ministre de la santé de l’époque, Dominique Gillot, la nécessité de créer des centres dédiées à la maladie. Il faudra attendre une année de plus et les seconds Etats- Généraux de la S.L.A pour que son successeur, Bernard Kouchner, annonce l’octroi de 1,5 millions d’euros pour financer ces centres médicalisés proposant à la fois un traitement de la pathologie et de ses séquelles ainsi qu’un soutien social et moral. En bref, une véritable prise en charge globale : dans chaque centre, une équipe médicale et les bénévoles de l’A.R.S doivent intervenir.

Le temps de boucler les dossiers administratifs indispensables et voilà que la France change de gouvernement et que les crédits budgétaires s’évanouissent. Il faudra une troisième mobilisation de l’A.R.S durant l’automne 2002, dont les militants et sympathisants vont manifester au Ministère de la santé et des personnes handicapées (lire Actualité au mardi 15 octobre 2002), pour que les crédits soient retrouvés. Quelques mois plus tard, le premier centre S.L.A ouvre à Paris, à l’hôpital de la Pitié- Salpetrière. Actuellement, une quinzaine de centres référents essaiment la Métropole, résultat de la volonté et de la détermination d’une femme, Michele Fussellier : « Je me suis posé la question des conditions de vie des personnes malades lorsque j’ai accédé à la présidence de l’A.R.S. Immédiatement, j’ai saisi les responsables politiques, fait rédiger un livre noir dressant le bilan de l’absence de prise en charge, du laisser pour compte. Le traitement social et administratif était très en retard. Nous avons obtenu la prise en compte de la S.L.A dans le guide- barème qui sert à évaluer le taux d’invalidité ». Le caractère rapidement évolutif de la maladie rend en effet nécessaire une décision urgente, alors que les Cotorep ont un délai moyen de 18 mois pour accorder une carte d’invalidité et des allocations. Le Ministère a décidé qu’une personne touchée par la S.L.A doit obtenir d’emblée 80% d’invalidité en Cotorep, dans un délai maximum de deux mois. « En pratique, souligne Michèle Fussellier, les délais demeurent encore longs, ils peuvent dépasser fréquemment six mois. Notre association apporte son aide en matière d’aménagement du logement, en proposant des solutions réalistes, avec l’obstacle du financement à trouver et du montage de dossiers administratifs longs et complexes ».

L’Administration a fait sentir toute sa pesanteur et son inertie dans le déploiement des centres référents : il lui fallait un appel d’offres en bonne et due forme, avec circulaire et autres dossiers volumineux. « Le plus difficile, précise Michèle Fussellier, a été de convaincre l’administration et ses différents bureaux ». Les centres ne peuvent être créés que dans des Centres Hospitaliers Universitaires, ce qui réduit considérablement les alternatives lorsque des médecins sont réticents, ainsi que cela se passe actuellement dans une région de l’ouest.

Dans un centre dédié, la prise en charge médicale de la S.L.A est pluridisciplinaire (kinésithérapie, neurologie, orthophonie, diététique, etc.) et elle s’organise en collaboration avec des médecins libéraux pour assurer un suivi de proximité. « Tout a changé dans la S.L.A depuis les 22 ans que je la traite, avoue franchement le professeur Vincent Meininger. Dans les années 80, le grand truc c’était de savoir comment se débarrasser des malades. La pathologie est envahissante, elle détruit le corps en pleine conscience. Elle suscite une forte angoisse et une demande de la part des malades. En créant les centres référents, on est passé de rien du tout à une prise en charge dans laquelle on évoque la trachéotomie, la fin de vie, on discute des choix. La recherche progresse lentement, on est passé de multiples hypothèses à un modèle animal qui permet d’envisager de cerner les mécanismes de la maladie ».

Des bénévoles de l’A.R.S apportent des informations en matière sociale et un soutien psychologique en liaison avec des spécialistes; ils gèrent un parc de matériels et aides techniques mis à disposition des personnes. A la demande, un bilan social est fait, les familles sont soutenues, la parole peut se libérer dans la perspective de la fin de vie. Les personnes ne vont pas dans un centre de soins, elles restent à leur domicile, des auxiliaires de vie apportent un aide quotidienne.

15 centres S.L.A fonctionnent à ce jour mais une nouvelle incertitude vient d’apparaître : ils travaillaient sur des crédits ciblés, maintenant les centres vont être intégrés à la tarification à l’activité. Le devenir de ces centres est suspendu aux priorités et aux choix effectués par la direction d’un C.H.U ou sa tutelle, l’Agence Régionale de l’Hospitalisation, au nom de la sacro- sainte maîtrise comptable des dépenses de santé. Pour couvrir son action, l’A.R.S ne dispose que de peu de moyens : « les cotisations, des dons, quelques legs, des subventions insignifiantes, affirme Michèle Fussellier. On cherche du mécénat, on organise des initiatives pour récolter des dons. Nous espérons créer un événement pour attirer l’attention du public et de la presse ». Vincent Meininger est finalement optimiste : « on n’a pas fait autant pour d’autres maladies, on a l’espoir de pouvoir stabiliser, traiter correctement la S.L.A dans les 10 années qui viennent ».

Laurent Lejard, mars 2004.

Informations complémentaires auprès de l’Association pour la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique (A.R.S) 75 avenue de la République 75011 Paris. Tél. 01 43 38 99 89, fax 01 43 38 31 59, Mél: ars@wanadoo.fr. Les centre référents sont situés à Angers, Bordeaux, Caen, Clermont- Ferrand, Dijon, Lille, Limoges, Lyon, Marseille, Montpellier, Paris, Nice, Toulouse, Saint- Etienne et Strasbourg.

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