La loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les établissements publics, prévoit que les dettes publiques se prescrivent dans un délai de quatre ans. Ainsi, si la dette n’est pas réclamée dans les quatre ans du préjudice, elle est éteinte. Cette loi s’appliquait également en matière de responsabilité hospitalière : une victime d’un accident médical survenu dans un hôpital public avait quatre ans pour entamer son action en responsabilité. Or, pour un même accident, une victime du secteur privé avait 30 ans pour agir. Devant cette énorme inégalité, le législateur est intervenu pour unifier le régime de responsabilité médicale.

Avec la loi du 4 mars 2002, il a décidé qu’en matière de responsabilité médicale la prescription serait de dix ans pour les victimes du secteur public et du secteur privé. Une question essentielle s’est alors posée à la suite de la publication de cette loi : a t-elle mis fin à la prescription quadriennale toujours en vigueur ? La question est restée sans réponse pendant plusieurs mois, posant ainsi des difficultés juridiques. Le Conseil d’Etat, saisi par le Tribunal Administratif de Lille, a rendu un avis contentieux le 19 mars 2003 tranchant ainsi le problème: il a estimé que la prescription décennale instituée par la loi du loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades constitue une exception au délai de la prescription quadriennale. Elle joue pour ce qui est des créances sur l’Etat, les départements, les communes et établissements publics, en matière de responsabilité médicale. La victime d’un accident médical a donc un délai de dix ans pour entamer son action à compter de la date de consolidation du dommage.

Les dispositions de cette loi s’appliquent aux créances antérieures qui n’étaient pas prescrites à la date d’entrée en vigueur de la loi et qui n’avaient pas donné lieu à une décision irrévocable. Cette nouvelle prescription a donc permis d’instaurer un régime égalitaire entre les usagers du service public hospitalier et ceux du secteur privé.

Les causes interruptives de la prescription.
 Le principe d’une prescription c’est qu’elle peut être interrompue par certains actes. La loi du 31 décembre 1968 a prévu quatre causes interruptives de la prescription. Ainsi, la réclamation contentieuse interrompt le délai de prescription au même titre qu’une demande de paiement ou une réclamation écrite du créancier ou l’émission d’un moyen de règlement de l’administration.

La loi du la loi du 4 mars 2002 a conservé ces cas d’interruption pour la prescription décennale. Elle en a cependant rajouté une : la saisine de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation. Ainsi, un nouveau délai de dix ans court à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l’interruption.

Il convient de rappeler que même si l’égalité de traitement entre les victimes est rétablie, que se soit devant le juge administratif ou judiciaire, chaque juridiction conserve sa propre procédure notamment en matière de responsabilité médicale publique.

Philippe Carlini, Avocat au barreau, CP Carlini et Associés, juin 2003.

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