Confrontées à la valse des personnels fournis par des organismes prestataires ou mandataires d’aides humaines, des personnes lourdement handicapées ont choisi d’embaucher directement. Elles étaient près de 1.200 en France à employer ainsi pour au moins 12 heures d’aides humaines quotidiennes, selon une étude réalisée par la Fédération des particuliers employeurs (FEPEM) à partir de données de l’Agence centrale des organismes de Sécurité Sociale (ACOSS). Des « petites entreprises à domicile » qui emploient en moyenne 4,7 salariés quant il faut assurer une aide tout au long de la journée, et une surveillance la nuit : « Au total l’accompagnement rémunéré par les particuliers employeurs en situation de handicap lourd s’élève, sur un trimestre, à 1,85 million d’heures, ce qui représente environ 4.600 emplois équivalents temps pleins (ETP), et correspond à 16,52 millions d’euros de salaires nets distribués. » L’emploi direct d’aides humaines est devenu, grâce à la loi du 11 février 2005 qui a créé il y a huit ans la Prestation de Compensation du Handicap (PCH), un secteur important, qui compte désormais dans le paysage économique de l’emploi à domicile si malmené ces temps derniers.

Parce que le financement de ces aides à domicile reste encore mal couvert alors qu’il fait réaliser des économies au budget de l’Etat et de la Sécurité Sociale, dès que l’on compare au coût de création d’une place en établissement médico-social, à son prix de journée à l’année longue, et à la perte de ressources que représente l’absence de productivité de la plupart des personnes handicapées qui y sont accueillies. Lorsque l’on vit en milieu ordinaire, on peut travailler, sortir, se distraire, agir, être comme tout le monde. Mais pour cela, le particulier employeur handicapé dépendant assume tous les risques d’une petite entreprise. Il doit savoir recruter, former, fiabiliser, manager, organiser son équipe d’aides humaines, faire la comptabilité et la paie, remplir les formalités déclaratives, régler les litiges y compris devant les tribunaux. Tout cela sans formation préalable ni soutien public ou juridique autre que celui des associations de personnes handicapées ou de la FEPEM. Et en gérant une PCH qui ne prend pas en compte toutes les dépenses et frais. Son montant est de 130% du SMIC et ne couvre que les salaires et cotisations sociales « ordinaires », pas les heures supplémentaires majorées de 25 ou 50%, ni la médecine du travail, ni le remplacement pour maladie, etc. En 2006, le président de l’association Etre et Avoir, Dominique Rabaud, qui a beaucoup oeuvré lors de la création de la PCH, estimait le coût réel d’aide humaine à 14,43€ en intégrant l’ensemble des frais et dépenses, ce qui correspondait d’ailleurs au tarif accordé en cas de recours à un prestataire : le Gouvernement avait alors fixé le taux horaire à 11,02€. Actuellement à 12,39€, « ce tarif sera caduc dès que l’accord de classification des salaires de la Convention collective des salariés du particulier employeur sera étendue », précise Sophie Bressé, chargée d’étude à la FEPEM.

Mais quel serait actuellement le juste prix de l’heure d’aide humaine en emploi direct ? Aucune étude ne l’établit, alors que la présidente de la FEPEM, Béatrice Levaux est catégorique : « La PCH en emploi direct coûte moins cher, et cela il faut le valoriser. » Quant à connaître son coût réel, « le chiffrage fait partie des travaux en cours à la FEPEM », justifie Sophie Bressé. Un rendez-vous en partie manqué à rattraper rapidement…

Laurent Lejard, novembre 2014.


L’étude « Les Particuliers Employeurs en situation de handicap quelles réalités ? », dirigée par Sophie Bressé, est téléchargeable en suivant ce lien.

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