En raison des conséquences collatérales de la « réforme » gouvernementale du 1% logement, il est fort probable que l’Association pour le Logement des Grands Infirmes (ALGI) disparaisse à la fin du mois d’octobre 2011, si aucune décision positive n’est prise par le Gouvernement !

Créée en 1959 pour répondre à la demande du ministre du Logement d’avoir un interlocuteur unique pour étudier et traiter les questions liées au logement des personnes dites handicapées motrices, et faire des propositions pour améliorer leurs conditions de vie dans un logement conforme à leurs difficultés d’autonomie, l’ALGI, association d’associations représentatives, a permis l’inscription des personnes dites handicapées comme bénéficiaires de la fraction du 1% logement alimenté par les cotisations des salariés. Dans cet esprit, l’ALGI a été chargée de l’instruction financière des dossiers à transmettre aux organismes financiers chargés de gérer les fonds du 1% logement, chaque organisme collecteur déterminant ses modalités de financement en conformité avec la réglementation tout en n’étant pas, bien entendu, financeur direct, cette responsabilité revenant aux organismes collecteurs d’Action Logement avec laquelle elle travaille en partenariat, totalement soumise de ce fait à leur réglementation et leurs modalités d’actions.

Ce dispositif a très bien fonctionné jusqu’en juin 2009, date à laquelle le Gouvernement a procédé à une « réforme » du 1% logement au détour de laquelle il a imposé aux collecteurs de se substituer à l’État, via une participation annuelle de 850 millions d’euros au financement de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et de l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU), ce qui a eu pour conséquence de restreindre considérablement les budgets disponibles pour les actions engagées auparavant dans le cadre d’Action Logement. Cela a entrainé la cessation de l’aide à l’adaptation des logements pour les personnes dites handicapées, ce qui représentait en 2009 plus de 5 millions d’euros dans le cadre d’enveloppes souples qui pouvaient s’adapter à toute évolution des besoins, 2 millions d’euros dans le cadre d’une enveloppe fermée en 2010, et pas le moindre crédit en 2011.

Par conséquent, près de 300 dossiers validés ces deux dernières années sont bloqués et les personnes dans l’impossibilité de concrétiser un projet d’adaptation du logement qu’ils ont entamé en 2010, voire 2009, et pour lequel les critères en vigueur au niveau du 1% logement depuis le 1er janvier interdisent à présent d’honorer les accords passés auprès de ces familles et partant toute aide financière, les plongeant dans des difficultés administratives et financières considérables. Par ailleurs, quid à l’avenir des aides apportées aux personnes dites handicapées si aucune mesure n’est prise dans le cadre des négociations en cours entre l’État et les partenaires sociaux à propos de la nouvelle convention d’Action Logement, d’autant qu’entre le 1er janvier 2011 et le 30 juin 2011, il ressort après étude des nouveaux dossiers parvenus à l’ALGI que 172 nouvelles familles auraient dû logiquement se voir accorder une aide financière en vue de l’adaptation de leur logement, ce qui porte le total à plus de 500 dossiers ?

Pourtant, dès le 7 juillet 2009, l’ALGI a adressé un courrier au cabinet du secrétaire d’État au Logement, Benoist Apparu, courrier resté sans réponse malgré les relances des 30 novembre 2009, 18 décembre 2009, et 21 janvier 2010. Et si un rendez-vous à pu être obtenu de haute lutte le 16 mars 2010 avec un conseiller technique, aucune suite n’a été enregistrée malgré le courrier en appui du 25 mai 2010, cosigné par l’ALGI, l’APF, l’AFM et la FFAIMC, et de la résolution fin 2010 du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (C.N.C.P.H).

Contactées par l’ALGI le 8 décembre 2010, puis le 20 février 2011, Mme la Ministre Roselyne Bachelot et Mme la Secrétaire d’État Marie Anne Montchamp se sont déclarées sensibles à sa proposition de réunir sous l’égide du ministère tous les acteurs engagés dans l’aide au logement, afin de rechercher une solution. Cette proposition n’a pourtant pas été concrétisée dans les semaines suivantes alors que le secrétariat d’État au Logement, relancé le 30 avril 2011, persistait à rester aux abonnés absents, tout comme les services du Premier Ministre, pourtant informés par l’ALGI de cette situation.

Dans le même temps, confrontées à des difficultés financières inextricables, plusieurs familles se sont adressées au Président de la République dont les services, sur intervention de l’ALGI, ont ensuite demandé au Secrétaire d’État au Logement de bien vouloir examiner cette situation, celui-ci se contentant pour toute réponse, de répondre aux familles : « L’ALGI est une association qui dispose d’une autonomie de gestion sur laquelle le ministre n’est pas habilité à intervenir » !

Jusqu’à ce que, le 23 mai 2011, débordé par les lettres de protestations envoyées par les parlementaires sensibilisés par l’ALGI, le Secrétariat d’État au Logement reçoive en catastrophe les représentants de l’Association pour disait-il… « mieux comprendre de quoi il s’agissait » ! Mais sans apporter aucune réponse !

La pression des Parlementaires s’amplifiant, l’ALGI a fini, le 29 juin 2011, par obtenir du secrétariat d’État au Logement qu’une réunion soit organisée sous l’égide de la Direction du Financement du Logement du Ministère au Développement Durable, réunissant Action Logement, l’ANAH, et l’ALGI, avec pour ordre du jour « le traitement des dossiers en stock, et l’accompagnement éventuel par l’ANAH de l’activité de l’ALGI ». Et si aucune décision ne fut prise ce jour-là, une nouvelle réunion, sans que l’ALGI ne soit invitée à y participer, fut convoquée le 5 juillet 2011 afin, nous disait-on, de « trouver une solution ».

Dans l’intervalle, par courrier du 24 juin 2011, le secrétaire d’État au Logement, M. Benoist Apparu répondait à une parlementaire qui l’interrogeait, qu’une « solution a pu être trouvée pour traiter les demandes en attente, en lien avec les partenaires sociaux d’Action logement. » Et le secrétaire d’État au Logement, d’ajouter : « Les dossiers seront prochainement débloqués. » Réponse formulée par écrit cinq jours avant (!) la réunion du 29 juin 2011 destinée en principe à chercher une solution !

Le 8 juillet 2011, il a été répondu à l’ALGI, à sa demande, qu’une réponse lui serait apportée à la mi-juillet. Ce qui n’a pas été le cas, et devant cette situation ubuesque l’ALGI s’est à nouveau adressé au Cabinet de Mme Marie-Anne Montchamp qui a suggéré en retour que l’ALGI rencontre à nouveau Action Logement, d’une part, et l’ANAH, d’autre part, pour rechercher conjointement des solutions, ce qui fut fait pour la troisième fois le 14 septembre 2011 avec Action Logement sans que les pistes évoquées sous réserve ce jour-là ne soient un mois plus tard confirmées.

Cerise sur le gâteau, interrogée par un parlementaire sur les difficultés de l’ALGI quant à l’exécution de sa mission en raison des conséquences collatérales de la réforme gouvernementale du 1% logement, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet vient de répondre par écrit en décrivant par le menu les éléments de cette réforme sans que n’y figure le moindre mot sur la situation provoquée à l’égard des personnes dites handicapées !

Il semble pourtant que deux actions positives seraient facilement réalisables par le Gouvernement. D’une part, des instructions gouvernementales auprès des organismes concernés pour qu’une enveloppe exceptionnelle soit débloquée afin de répondre aux 500 dossiers en souffrance. D’autre part, l’organisation d’une table ronde réunissant les ministères et organismes concernés pour aboutir à une solution pérenne, par exemple via une convention officielle avec Action Logement, sous l’égide de l’État, en vue de dégager les 6 millions d’euros annuels nécessaires pour répondre aux demandes des familles, par ailleurs de plus en plus nombreuses.

Dans le cas contraire, dans la mesure où le financement des salaires des employés chargés de l’étude et du montage des dossiers est quasiment totalement tributaire d’Action Logement au regard du volume des dossiers traités, les familles seront gravement pénalisées et l’ALGI, en cessation de paiement dans quelques semaines, devra déposer son bilan ! Et la seule association nationale d’aide à l’adaptation du logement des personnes les plus lourdement handicapées n’existera plus…


Vincent Assante, Président de l’ALGI, octobre 2011.

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