En la voyant joyeuse, sourire aux lèvres, délicatement maquillée, vêtue de rose et de violet (ses couleurs préférées) on ne peut imaginer les souffrances qu’a vécues et subit encore Krystel Cahanin-Caillaud. Elle avait tout juste 18 ans lorsqu’un accident automobile l’a laissée pour morte, plongée dans un coma profond dont elle n’est ressortie qu’au terme de longues semaines. Elle raconte les circonstances de cet accident, la façon dont elle a vécu son coma et sa perception « dilatée » du monde extérieur, sa rééducation, la reconquête de l’autonomie et la reprise d’études, en somme son retour à la vie, dans un récit qui vient de paraître chez Oh! Editions, Je suis sortie de mon corps.

« J’avais ce livre dans la tête depuis 10 ans, dès que j’ai pu sortir du fauteuil roulant. Je voulais d’abord expliquer à mes jumeaux pourquoi ils voient leur mère stationner la voiture sur des places réservées aux personnes handicapées. Je voulais également témoigner de l’amour constant de mes parents; enfin, je voulais montrer à tous ceux qui ont subi un accident grave, se retrouvent en fauteuil roulant, et qui n’ont pas envie de se battre, que l’on peut avoir une belle vie, et même plus belle qu’avant ». Avec ce livre, dont une première version a été publiée à compte d’auteur avant que le récit n’intéresse un éditeur, Krystel a assouvi son goût pour la lecture et rendu hommage à l’écriture : « J’ai la passion de lire depuis mes quatre à cinq ans. J’ai eu la volonté de réapprendre très vite à écrire après mon traumatisme crânien ».

On le sait peu mais l’une des séquelles handicapantes d’un traumatisme crânien réside dans la perte de la capacité à former les lettres, écrire, qu’il faut réapprendre de même que la parole : Krystel est d’ailleurs toujours suivie par un orthophoniste. Elle vit également au quotidien avec des crises de lombalgie paralysante, une arthrose du cou, des douleurs neurologiques, un corset qui maintient sa colonne vertébrale et l’empêche de porter des robes près du corps : une entorse à l’élégance qu’elle affectionne. « Ne plus avoir mal nulle part, je ne sais plus ce que ça fait… »

« Je me suis battue pour reconstruire ma féminité. Je me fais belle tout le temps, pour être comme les autres. Et j’ai réussi à devenir maman. J’y pensais, mais les médecins étaient très pessimistes ».

Avec de multiples fractures du bassin, les praticiens ont en effet surtout évoqué les dangers de la grossesse. Sauf un, qui a fait confiance au mental de Krystel et lui a donné la capacité de compenser les défaillances de son corps. Et comme elle avait décidé de ne pas faire les choses à moitié, ce sont des jumeaux qu’elle a portés, l’obligeant à rester allongé la plupart du temps jusqu’à leur naissance. L’avenir, elle le voit avec ses enfants qui grandissent et font des études, son mari attentionné qui envisage l’achat d’une maison de plain-pied si elle devait vivre à nouveau en fauteuil roulant, un travail à mi-temps évoluant dans la communication au sein du groupe de prévoyance qui l’emploie actuellement.

« Je pense que ma vie est plus intéressante qu’avant, je n’avais pas ressenti les mêmes émotions, j’ai pris conscience de mon corps. Et je n’aurais peut-être pas écrit, sans mon handicap, ni pris le temps de rencontrer les autres. Accepter mon handicap a changé ma vie, elle est plus belle. »


Propos recueillis par Laurent Lejard, avril 2009.


Je suis sortie de mon corps, par Krystel Cahanin-Caillaud, Oh! Éditions, 14,90€, en librairie.

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