C’est seulement en 1972 qu’une personne privée de l’usage de ses membres inférieurs a réussi à démontrer sa capacité à piloter un avion léger : André Crépy a réalisé ce premier vol au-dessus de l’aérodrome Paul-Louis Weiler aux Mureaux (Yvelines), devenu depuis lors le pôle français le plus important pour l’apprentissage et la pratique des pilotes handicapés moteurs. Leur droit d’obtenir un brevet de pilote privé a été officiellement accordé en 1976, d’abord pour voler seuls, puis depuis 1985 avec des passagers non payants; actuellement, la France compte une cinquantaine de pilotes dans ce cas. La réglementation appliquée depuis 2002, et qui découle d’une harmonisation européenne, autorise les pilotes privés handicapés à obtenir une qualification « montagne » ou hélicoptère. Enfin, depuis deux ans, ils peuvent postuler à un brevet d’activité professionnelle de messagerie, fret, surveillance aérienne, vols publicitaires, le transport onéreux de passagers restant exclu de même que le « vol aux instruments » (sans visibilité) et sur appareils multi-moteurs.

Obtenir le brevet de pilote. Un handicap est synonyme de refus, et c’est par dérogation que le premier brevet de pilote a été délivré. Ce principe contraignant est encore en vigueur : tout candidat doit subir un examen médical et une personne handicapée est recalée d’office. Elle doit alors demander une dérogation, qui peut être accordée si le handicap n’est pas évolutif ce qui élimine déjà les maladies dégénératives telles les myopathies. La dérogation doit être renouvelée annuellement et elle repose sur la capacité à piloter un avion léger moyennant d’éventuels aménagements. Par exemple, un paraplégique doit utiliser un palonnier manuel, le malonnier, auquel se greffent les commandes des gaz et de freinage.

Le candidat doit également prouver sa capacité à monter et descendre sans aide de son avion. Cela contraint à ne pouvoir piloter que des aéronefs à ailes assez basses, afin de s’y asseoir puis de se hisser au bord du cockpit pour ensuite y pénétrer. A l’expérience, ce n’est guère plus difficile que de monter en voiture. Les adaptations de commandes mécaniques sont actuellement limitées mais l’introduction de commandes électriques pourrait élargir les possibilités d’adaptation à d’autres handicaps moteurs, telle l’hémiplégie, voire les cas de tétraplégie incomplète. La France est l’un des rares pays à autoriser les personnes handicapées à piloter, et le seul en Europe semble-t-il. Cela a d’ailleurs conduit un Belge à obtenir un brevet en France et à piloter en Belgique grâce à ce brevet en profitant d’un flou juridique.

Voler ! L’Aéroclub de France compte une Commission Pilotes Handicapés divisée en handicapés des membres inférieurs, sourds ou déficients visuels. Pour ces derniers, l’association Les Mirauds Volants conduit l’essentiel des actions (lire cet article). Les sourds et malentendants se voient encore refuser en France la licence de pilote privé, du fait de leur impossibilité d’utiliser la radio; ils sont autorisés à piloter des Ultra Légers Motorisés (U.L.M) mais peuvent obtenir une licence en Angleterre ou aux U.S.A, même si elle n’est pas validée en France. Enfin, une patrouille Bleu Ciel a été créée en France, basée aux Mureaux à l’Aéroclub Paul-Louis Weiller : trois pilotes handicapés effectuent des exhibitions en formation lors de meetings aériens, pour montrer que l’on peut voler (et même bien !) avec un handicap moteur.

Passer un brevet de pilote privé est assez coûteux, au minimum 7.500 €, auxquels il convient d’ajouter la vingtaine d’heures annuelles de vol obligatoires pour maintenir sa qualification. Des bourses importantes peuvent être allouées aux personnes handicapées souhaitant préparer le brevet, renseignements auprès de l’Aéroclub Paul-Louis Weiller. Posséder un avion personnel est réservé aux riches passionnés; les autres pourront louer un avion adapté moyennant une centaine d’euros par heure de vol.

Laurent Lejard, septembre 2005.


Clubs de pilotage adapté aux personnes handicapées des membres inférieurs :

– Aéroclub Paul-Louis Weiller, Aérodrome 78130 Les Mureaux. Tél/Fax : 01 34 74 03 22.
– Handivol, Aéro-club ASPTT (Caen), 14650 Carpiquet. Tél. 02 31 40 95 87, Fax : 02 31 40 02 28.
– Association Castel-Mauboussin, Aérodrome civil de Cuers-Pierrefeu 83390 Cuers. Tél. 04 94 33 54 42.
– Aeroclub du Gaillacois (Lisle sur Tarn), BP 115, 81603 Gaillac.
– Aeroclub Marseille-Provence, Section Handy-Flying, Aéroport 13728 Marignane cedex. Tél. 04 42 78 23 45.

Partagez !