Le 16 mars dernier, le Conseil Constitutionnel rappelait au Gouvernement que la loi ne se faisait pas à la légère et devait être élaborée dans le respect des normes du Droit public. Cette leçon de droit prit la forme de la suppression de la moitié des articles de la loi « égalité salariale hommes-femmes » dans laquelle diverses dispositions avait été adjointes en cours de débat, la transformant en fourre-tout dans lequel figurait le droit à une majoration de pension pour les fonctionnaires demandant une retraite anticipée à partir de 55 ans. A la suite de la suppression de cette disposition, le Ministre chargé des personnes handicapées a cherché comment rétablir les fonctionnaires dans un droit découlant de la réforme des retraites (2003) et accordé par la loi de février 2005 dans une forme incomplète et, doit-on encore l’écrire, bâclée. Pendant que le Ministre réfléchissait, deux parlementaires ont agi : Daniel Paul, député communiste, et Nicolas About, sénateur centriste, ont déposé sur le bureau de leur assemblée respective une proposition de loi réglant, du moins l’espère-t-on, le droit à majoration de pension desdits fonctionnaires. Et voila que Philippe Bas fait savoir qu’il soutiendra, au nom du gouvernement, la proposition About, dont ce dernier espère qu’elle sera débattue au Sénat vers le 12 juin : « Ensuite, il faudra une heure à l’Assemblée Nationale pour la voter en termes conformes, estime Nicolas About. Si le gouvernement inscrit le texte à l’ordre du jour prioritaire de l’Assemblée, il peut être adopté avant les vacances ».

C’est-à-dire en quelques semaines de plus que la suppression du Contrat Première Embauche, dont il ne faut pas dire qu’il s’agit d’une abrogation : le Premier Ministre aurait dû en tirer « toutes les conséquences », ce qu’il n’a pas fait en démissionnant puisque le C.P.E n’a pas été supprimé mais remplacé par des dispositions en faveur de l’emploi des jeunes. Remplacé, non par un projet de loi du gouvernement, mais par un texte proposé par un député de la majorité et présenté dans des formes suffisamment acceptables pour que la face de M. de Villepin soit sauvée, les apparences sauvegardées… et toute honte bue.

Cette même méthode fut naguère employée par Philipe Douste-Blazy, alors Ministre de la santé, qui ne voulait pas engager son nom dans l’élaboration de la loi sur la fin de vie des malades incurables. Il avait alors chargé un député de la majorité, médecin comme lui, le Docteur Jean Leonetti, de présenter une proposition de loi (au demeurant très incomplète ainsi que le dénouement judiciaire de l’affaire Vincent Humbert l’a démontré) que le gouvernement a soutenu. Un gouvernement qui a depuis changé de chef tout en conservant grosso modo le même personnel, ce qui explique une certaine permanence dans l’absence d’intelligence législative et de courage politique de ses membres.

Laurent Lejard, avril 2006.

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