Le premier mandat électoral de Kevin Carnec n’a guère été une réussite, le second ne peut être que meilleur. Elu au conseil municipal de Lorient (Morbihan) sur la liste majoritaire du maire sortant, le socialiste Norbert Métairie qui se retire de la vie municipale en 2020 au terme de quatre mandats, Kevin avait démissionné en juillet 2019. C’était pourtant en tant que citoyen handicapé qu’il avait sollicité le maire et gagné son siège au conseil municipal, devenant à 19 ans le plus jeune élu : « Je venais d’emménager à Lorient, j’étais handicapé moteur depuis 5 ans. Je trouvais intéressant d’apporter mon expérience pour améliorer l’accessibilité de la commune. Lorient était une ville pionnière de l’accessibilité, Kerpape est à côté. » Un important et renommé centre de rééducation fonctionnelle mutualiste qui conduit de multiples expérimentations. « Les transports sont accessibles, les trottoirs aussi mais la ville se repose sur les acquis, poursuit Kevin Carnec. Le centre ville est assez accessible, dont quelques commerces, tous les bus, un transport PMR réservable jusqu’à 48 heures avant mais il est saturé parce que de plus en plus d’usagers l’utilisent. Je prends le bus tant que je peux, sauf le soir quand je me sens en insécurité. » Toutefois, seuls 42 des 500 commerces de la ville sont accessibles : « Je n’ai pas connaissance d’une action municipale vers les commerçants, mais l’APF le fait. C’est une absence d’intérêt vis-à-vis des commerçants. »

Face à cette situation, quelle a été l’action de Kevin Carnec ? « On ne m’a mis dans aucune commission d’accessibilité mais placé à l’office des sports pour remplacer un adjoint. J’y suis allé mais mes demandes sur l’accessibilité n’étaient pas écoutées. » Pourtant, les handisports sont intégrés au sein de l’office municipal des sports et Kevin Carnec en profite : il joue au foot-fauteuil dans l’équipe de Kerpape dont il est le capitaine : « J’ai marché jusqu’à l’âge de 15 ans, maintenant je ne peux pas faire d’autres sports. » C’est cette expérience du handicap qu’il a voulu mettre au service de la collectivité, il était le seul conseiller municipal handicapé. Mais personne ne l’a formé ou encadré, lui qui a dû arrêter ses études en classe de 3e, l’adjoint à l’accessibilité ne l’a pas sollicité : « Je me suis fait avoir une fois. J’étais une plante verte, un petit jeune de 19 ans qui n’ose pas dire, on l’a pris pour faire bien », déplore-t-il aujourd’hui.

Six ans plus tard, il est prêt à revenir au conseil municipal, sur d’autres bases et avec une autre équipe : « J’envisageais de revenir sur un projet. Je suis pris sur une autre liste, une tendance La République En Marche (LREM). Le candidat est venu me chercher, on a discuté, eu des réunions sur l’accessibilité, des propositions intéressantes et ambitieuses. Lorient doit redevenir une ville exemplaire en matière de handicap universel. Tous les types de handicaps. Je suis en position éligible, on a accepté que je siège en commission d’accessibilité et pour la promotion du handisport, créer des événements. » Kevin Carnec et ses colistiers ne partent pourtant pas favoris dans une cité dont les maires sont socialistes depuis 1965. Mais en 2020, le jeu électoral sera ouvert, près d’une dizaine de listes s’annoncent avec une gauche divisée au premier tour.

Ce qui n’arrête pas Kevin Carnec, qui conseille à tous de s’engager dans la vie de leur commune : « Ne pas réfléchir, foncer, y aller. Plus on y sera, plus l’accessibilité sera entendue. Il faut être nombreux, et plusieurs au conseil municipal. Plus on sera présents dans les conseils municipaux, plus on sera entendus, y compris au niveau de l’agglomération [conseils des communautés de communes ou d’agglomérations NDLR]. J’y suis allé au culot, on a tout à gagner, et le candidat aussi : il est important de montrer qu’on s’intéresse aux personnes handicapées. »

Propos recueillis par Laurent Lejard, janvier 2020.

Kevin Carnec propose sur YouTube sa vision du handicap.

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