Professeur de français et d’espagnol, Jocelyne Vidard n’a enseigné que pendant quatre ans, les séquelles d’une Ataxie de Friedrich rendant son maintien en activité trop pénible. Originaire de Charente-Maritime, elle a suivi une scolarité ordinaire qui l’a conduite jusqu’au CAPES. Pour suivre son mari étudiant en médecine, elle s’est installée à Nantes et y est restée après la mort de son époux, en 1977 lors d’un accident de voiture. « J’étais veuve, avec deux enfants. Je me suis engagée au service accessibilité de l’Association des Paralysés de France, en suivant une formation d’architecture adaptée, jusqu’à mon premier mandat électif. J’étais déjà bénévole dans une Commission du Centre Communal d’Action Sociale, et j’avais aidé la ville de Saint-Herblain pour sa mise en accessibilité ». À l’époque, la municipalité était dirigée par Jean-Marc Ayraud, qui devint le plus jeune maire de France en 1977. Après deux mandats, il s’est installé à Nantes dont il a été élu maire en 1989. Et Jocelyne Vidard s’est installée à Saint-Herblain, une ville de bord de mer qu’elle apprécie au point de vouloir la servir : « On m’a demandé de rejoindre la municipalité, j’ai accepté. J’ai toujours été actrice de ma propre vie… »

Jocelyne Vidard a rejoint le Parti Socialiste deux ans après avoir été élue, en 2001, conseillère municipale à Saint-Herblain. « La campagne électorale n’a pas été facile, il a souvent fallu que je fasse des mises au point. J’ai participé aux distributions de tracts, aux meetings, aux rencontres sur les marchés. Les adversaires étaient un peu réservés, lisses. Mais j’ai dû mette les choses au point dans mon propre camp, quand les camarades se mettaient debout devant moi, choisissaient une salle pas accessible. Depuis, ça a changé. Le handicap est davantage rentré dans l’esprit du public ».

Pour se faire sa place et être respectée, Jocelyne Vidard a dû combattre l’inégalité de traitement et le sentiment d’infériorité. « Mon premier mandat a apporté une vision neuve du handicap, une attitude de respect. À l’époque, on parlait des’ handicapés’, je me suis battue pour être reconnue comme une personne. Au début, on m’a confié la délégation à l’accessibilité. Dans ce second mandat, j’assure le suivi de la programmation des grands équipements, en ayant l’oeil sur les adaptations. Ma seule présence suffit à expliquer bien des choses ». Elle a notamment participé à la supervision de l’école des arts, un important équipement culturel comportant une école de musique, de danse, d’arts plastiques, un auditorium et des salles d’exposition. Elle travaille également sur la rénovation de quartiers, comme Bellevue ou le Sillon de Bretagne, qui comportent des constructions neuves et des programmes de mise en accessibilité : « En 2015, il restera encore des choses à faire. Mais Saint-Herblain et Nantes sont en pointe sur l’accessibilité. On travaille depuis longtemps sur les cheminements et les transports ». Restent les quartiers anciens et leurs lots de pavés sur lesquels Jocelyne Vidard secoue son fauteuil roulant électrique. Autonome dans ses déplacements, elle utilise le service de transport spécialisé des Transports de l’Agglomération Nantaise (TAN) en complément des tramways et autobus adaptés.

Politiquement, elle n’envisage pas un second mandat électif, au Conseil Général par exemple : « J’ai de grandes contraintes du fait du handicap. Je dois être aidée pour certaines choses, avec des obligations horaires, un besoin de soins quotidiens. Et je veux être en bonne forme pour mes enfants, c’est très important pour moi. » Cette volonté de rester maître et actrice de sa vie conduit Jocelyne Vidard à privilégier sa liberté : « La liberté, j’y suis très attachée, malgré les contraintes de mon corps; j’ai une grande liberté dans ma tête ! »

Propos recueillis par Laurent Lejard, mars 2011.


Retrouvez Jocelyne Vidard lors du colloque Libertés et handicaps organisé par Grandir d’un monde à l’autre, le 26 mars prochain à Saint Herblain.

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