A 28 ans, Simon Parzybut a encore toutes ses chances de faire carrière dans le chant lyrique, même si son parcours artistique ne sera pas des plus aisés : « Il est très difficile de se faire sa place, et très facile de la perdre, explique-t-il. Les chefs sont assez spéciaux, on est dépendant des employeurs. » De plus, la tendance est au recrutement de chanteurs au physique olympien et à « belle gueule », à se demander si ces pré-requis ne vont pas bientôt primer sur la qualité vocale ! Simon Parzybut entrait bien dans ces cases avant l’accident. Depuis, une tétraplégie incomplète l’oblige à se déplacer en fauteuil roulant, réduisant fortement la capacité respiratoire indispensable à la voix d’un chanteur et limitant les mouvements de ses bras.

« Je n’avais plus que 30% de capacité respiratoire en arrivant au centre de rééducation de Berck [Pas-de-Calais]. J’ai dû effectuer un gros travail de récupération du souffle, de la respiration, afin que la paralysie des poumons ait le moins d’impact possible. Un examen des cordes vocales a permis de vérifier que l’intubation n’a pas eu de conséquences. Et comme je n’ai plus de sensations corporelles, je m’appuie sur des réflexes ancrés dans mon corps. Finalement, j’ai repris d’autres repères. Le fait de chanter en position assise change beaucoup de choses, on n’est plus vraiment acteur de tout ça. »

Il était important pour lui de reprendre des cours de chant, afin de trouver d’autres moyens de gérer sa voix et la respiration, un travail sur l’émission du son plutôt que du souffle. Et à Berck, il s’est mis à faire des exercices… à la sarbacane. Aujourd’hui, Simon Parzybut a récupéré 50 à 60 % de capacité respiratoire.

Ce parcours de réappropriation de son nouveau corps, il le raconte dans un documentaire réalisé par Pierre Verdez, « Celui qui chante », qui sera diffusé dans les prochaines semaines sur les antennes régionales de France 3 et que les internautes peuvent visionner sur Wikinorpa. Depuis, il a quitté le centre de Berck et s’est installé à Reims (Marne), une ville dans laquelle il avait précédemment vécu, et termine actuellement son cursus d’études au conservatoire de musique tout en se produisant en concert. Ainsi, en juin 2014, il a participé à un récital donné à l’occasion du congrès de LADAPT. En octobre de la même année, il a rejoint le choeur Akadémia pour une série de concerts à Reims, Chaumont, et dans les environs de Troyes.

« Ça a été l’occasion de retrouver des amis et de savoir si j’étais à la hauteur. J’adore le travail de choeur. Des chanteurs partent du principe qu’ils ne travailleront qu’en soliste. Moi, je pars du choeur pour travailler en soliste; je suis un jeune chanteur et je dois encore me perfectionner. Vocalement, j’ai encore des manques, et il y a l’impact du fauteuil roulant. » Il a désormais une certitude : il ne pourra pas envisager une carrière à l’opéra, le fauteuil roulant constituant un obstacle difficilement franchissable par un metteur en scène standard… Mais les grands atouts de Simon Parzybut sont un optimisme lucide et le dynamisme qui résulte de sa bonne humeur de jeune homme ouvert aux autres… et qui le lui rendent : le réputé choeur de chambre de Namur (Belgique) a été le premier à l’engager « en toute connaissance de cause » pour un concert donné lors du festival de Wallonie de juillet 2013. « C’est une nouvelle naissance avec un nouveau corps, que je finis par comprendre et apprivoiser », conclut-il.

Propos recueillis par Laurent Lejard, avril 2015.

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