Depuis toujours l’État s’est désinvesti de ses prérogatives « en faveur » des personnes handicapées, actions assumées d’abord par les institutions de bienfaisances, souvent liées à l’église, et aujourd’hui par les associations ou institutions privées. Ce désintérêt a eu des conséquences désastreuses sur l’insertion sociale des déficients visuels.

Mais que représentent les aveugles en France ?
 Le nombre d’aveugles complets (vision inférieure à 1/20) est selon les différentes sources estimé dans une fourchette allant de 55.000 à 77.000. 15.000 d’entre eux sont en âge de travailler. Le déclin des métiers traditionnels qu’ils exerçaient (standardiste ou kinésithérapeute) a été compensé par l’accès à de nouvelles professions grâce aux nouvelles technologies. Ceci dit, le taux d’inactivité est très important car il faut tenir compte du fait que, d’une part, bon nombre d’aveugles pointent au chômage et d’autre part, un nombre non négligeable est employé par le secteur protégé (Centre d’Aide par le Travail ou Atelier protégé). Certains non- voyants souffrant de handicaps associés ne sont pas reconnus travailleurs handicapés par les COTOREP.

Cette exclusion du monde du travail s’explique par les a priori des employeurs mais aussi et surtout par un niveau de formation et de qualification catastrophiquement bas. La scolarisation d’un enfant aveugle en milieu ordinaire est quasiment inexistante et dans les rares endroits où elle est tentée, elle est due plus à la bonne volonté des enseignants et des parents d’élèves qu’à une stratégie d’intégration de l’éducation nationale. En conséquence, environ 3 % des aveugles atteignent le bac et 185 seulement poursuivaient des études supérieures en 1997.

Les malvoyants en quelques chiffres. On estime à 10 % de la population française, le nombre de personnes qui déclarent avoir des problèmes de vue. Sur 750.000 naissances enregistrées annuellement, 100.000 personnes connaîtront des problèmes de vision. Entre 500.000 et 600.000 personnes sont considérées comme déficientes visuelles mais seules 220.000 d’entre elles sont classées comme malvoyantes (vision est comprise entre 1/20 et 4/10). 100.000 sont en âge de travailler. Elles rencontrent un peu moins de difficultés dans leur insertion scolaire et professionnelle. Leur nombre croît en raison du vieillissement de la population et de l’augmentation des atteintes de maladies dégénératives pour lesquelles à ce jour il n’existe pas de solution thérapeutique.

Comment vivent les aveugles ? Plus de 4 aveugles sur 5, vivent des prestations sociales, ce qui les situe dans les tranches de revenus les plus basses. Sur 77.000 aveugles, seuls 20 % au grand maximum peuvent accéder à un salaire. A ceux qui n’ont pas cette chance, il reste l’allocation aux adultes handicapés (AAH – 3.576 francs) et s’ils remplissent les quatre conditions requises, son complément, ce qui porte à un peu plus de 4.100 francs le revenu mensuel, (75 % du SMIC). Par ailleurs, non seulement le non- voyant est pénalisé par sa situation de handicap mais il est aussi victime dès son enfance de la situation sociale de sa famille. En effet, un enfant d’ouvrier a deux fois plus de risques d’être placé en institution spécialisée qu’un fils de cadre. Les malvoyants dont l’acuité visuelle est très basse cumulent très souvent les difficultés d’accès au travail et le refus des pouvoirs publics de leur reconnaître un taux d’invalidité correspondant à leur déficience. Ils ne peuvent donc bénéficier de l’AAAH par exemple.

Pour en savoir plus :
 Depuis 1998, l’INSEE réalise et publie des études annuelles sur les personnes handicapées. Attention, ce site est difficile d’accès pour les aveugles. Lire également « Les aveugles et l’emploi », étude réalisée en 1997 par l’AGEFIPH.

Abder Ragui, novembre 2000.

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