Depuis 700 ans, son rocher et le bout de territoire qui le cerne sont la propriété d’une famille d’origine génoise, les Grimaldi : un ancêtre s’empara par ruse de ce qui n’était alors qu’un port enclavé dans les Alpes naissantes. Annexée par la France lors de la première Révolution, puis protectorat du royaume de Sardaigne en 1815, la principauté redevint indépendante en 1861 ; elle n’est plus de droit divin après que le Prince régnant depuis 1949, Rainier III, lui eut octroyé une constitution en 1962.

L’État monégasque s’étend sur moins de deux kilomètres carrés mais augmente régulièrement sa superficie en gagnant du terrain sur la mer. Ses trente deux mille habitants s’entassent dans des immeubles élevés, aux normes antisismiques nous assure- t-on : Monaco est proche d’une faille et risque d’être un jour victime d’un séisme majeur. Qu’adviendrait- il alors des immenses richesses entassées dans ses innombrables coffre- forts ? Car la spécialité locale est l’argent, sous toutes ses formes, couleurs et odeurs. L’agglomération s’étend à flanc de coteaux, percés de nombreux tunnels routiers et d’ascenseurs pour piétons, généralement aussi accessibles en fauteuil roulant: c’est heureux tant les rues pentues sont nombreuses.

Seul le quartier Fontvieille est plat: gagné sur la mer, il comporte bureaux, centre commercial, musées et même quelques usines (conditionnement d’anchois, produits d’hygiène pour les pieds). C’est là qu’évolue l’AS Monaco, au stade Louis II. Pour accéder aux différents niveaux du complexe d’activités, vous devrez utiliser des lève- fauteuils électriques qui sont manoeuvrés par un personnel accrédité. Délai d’attente à prévoir.

Quoi faire à Monaco ? Le touriste pourra être tenté de se faire plumer au jeu, attiré par les nombreux casinos locaux. Nous avons préféré nous intéresser à d’autres sites remarquables. A commencer par le jardin exotique qui domine le quartier Fontvieille, et s’étale sur la colline. Au long de ses allées, vous découvrirez toutes sortes de variétés de succulentes, euphorbes et cactées aux noms bien compliqués et aux âges vénérables: on compte ici par dizaines d’années. Le jardin offre de nombreux points de vue sur la ville et la mer. Pas de place de stationnement à proximité mais vous pouvez demander au policier en faction l’autorisation de laisser votre voiture sur le parking qui reçoit les limousines vendues en ville (camions et caravanes sont interdits à Monaco). En fauteuil roulant, prévoyez un accompagnateur vigoureux pour retenir l’engin dans les descentes et pousser au retour. Pour le récompenser de ses efforts, il bénéficie de la gratuité (tarif normal 40 FF) ainsi que la personne qu’il accompagne. Entrée gratuite aussi pour les handicapés mentaux (payant pour leurs accompagnateurs) et les aveugles, qui devront se faire raconter les lieux (pas de guide braille ou audio) et être bien « drivés »: les épines de certains cactus sont monstrueuses ! Sous le jardin, et le niveau de la mer, une grotte est en voie d’assèchement du fait de l’urbanisation de la surface: ses concrétions perdent leur luisant. Près de 400 marches à descendre puis monter, pour les téméraires.

Le centre d’activités Fontvieille accueille plusieurs musées dont celui des voitures anciennes de SAS le Prince de Monaco. Plus d’une centaine sont présentées : passons sur les quelques Rolls et Bentley, banales ici. Plusieurs modèles sont présentés capot moteur ouvert, telle la De Dion Bouton 1903 dont le monocylindre est en fonte coulée d’un bloc. On remarquera les voitures habituellement employées jadis par les princesses, telle la Floride offerte par la régie Renault à Grace Kelly lors de la sortie du modèle ; Charlotte utilisait une Morris Minor, un équivalent britannique de la 4 CV. Quand au Prince, il roulait dans les années 60 dans une Cadillac Sedan de 1961, présentée ici à côté d’un autre modèle de la marque, une Type 62 8 cylindres de 1953 remarquable avec ses obus chromés sur la calandre, hommage appuyé aux avions de chasse Lockheed P 38. Le musée est accessible en utilisant les lève- fauteuils présentés plus haut. L’entrée est de plain- pied, les salles sont desservies par des rampes. Gratuité aux personnes en fauteuil roulant, aveugles ou handicapés mentaux, en principe (tarif normal, 30FF). Il n’y a ni brochure braille ni audio guide.

Passons sur le Rocher. Outre le Palais Princier et une vieille ville rénovée de frais aux rues à boutiques pour touristes, on y trouve le musée océanographique. Il n’est plus guère marqué du sceau de celui qui lui donna une renommée internationale, Jacques- Yves Cousteau. Le bâtiment a le charme désuet des musées d’histoire naturelle type XIXe siècle. Les collections, réparties dans les deux étages, sont vieillottes, mal présentées. L’intérêt de la visite réside au sous- sol, là où sont installés les aquariums. Ils sont un enchantement visuel, une découverte inattendue des inventions de la nature. Ces frétillements dans un cocon transparent, des bébés roussettes. Ce champ ondulant, des micro organismes. Les poissons rares sont innombrables ici, aux couleurs inattendues telle cette murène jaune vif, inerte et redoutable.

D’une vitrine à l’autre, des espèces incroyables se côtoient. On vérifiera sur pièce que la baudroie est véritablement hideuse. Quant aux trois choses bleue, verte et rouge que vous découvrirez, ce ne sont pas des gemmes mais des poissons pierre, et venimeux avec ça. Dernière nouveauté, un immense aquarium dans lequel divers requins évoluent. Impressionnant et fascinant. Les personnes handicapées bénéficient en principe d’un tarif spécial mais une fois encore avec des critères flous ! L’entrée « fauteuil » se fait par la gauche du bâtiment dont tous les étages sont desservis par un ascenseur (à l’exception des galeries des collections) ; les petits aquariums sont placés à hauteur de l’oeil d’une personne debout. La location d’un audio guide permet aux aveugles d’avoir un descriptif des aquariums uniquement ; demi- tarif pour la personne, gratuité pour son accompagnateur. Le prix normal d’entrée est de 70FF.

Un coin de Japon près des buildings du front de mer, voici un espace de tranquillité bienvenue. Tout est dans ce jardin : l’espace zen, la cascade de pierre, la maison de thé, un belvédère, quelques sculptures, des carpes vénérables argent et or. On entre de plain- pied mais certaines parties sont difficilement accessibles. L’ensemble est assez réduit ; pourtant l’espace est remarquablement « meublé ». Vue imprenable, depuis la jetée, sur les yachts de grand luxe qui croisent dans la baie…

A proximité immédiate a ouvert, en juillet 2000, une nouvelle et ultramoderne salle de congrès et spectacles, le Grimaldi Forum. Il se présente comme un iceberg de verre dont les installations souterraines s’enfoncent sous le niveau de la mer. Il accueillait un concert lyrique et symphonique de grand luxe à l’occasion de la fête nationale monégasque, avec une concentration fellinienne de dames en robes plus brillantes que des papillotes et un amoncellement de fourrures à vous dégoûter du vison. La grande salle, qui peut accueillir 2000 personnes, est luxueuse, avec ses planchers en acajou, mais sa décoration a néanmoins ce mauvais goût que l’on prête généralement aux nouveaux riches. L’accessibilité en semble parfaite, le stationnement n’étant possible que dans le parking en sous-sol.

Monaco pratique. Vous trouverez assez facilement à vous loger, les nombreux hôtels modernes étant accessibles. Ils sont néanmoins hors de prix : pas moins de 1.000FF au minimum pour une chambre simple en basse saison. Multipliez par deux au coeur de l’été ! L’unique plage monégasque, au Larvotto, est accessible aux handicapés moteurs. Elle est dotée de deux Tiralo (sièges plastiques équipés de grosses roues) avec deux personnes pour aider la mise à l’eau des baigneurs (prestation assurée de juin à septembre). Les musées et jardins sont ouverts tous les jours.

Le stationnement automobile est problématique : il y a très peu de places réservées GIC- GIG et aucune règle apparente pour le paiement (gratuit, payant, on ne sait pas). Nous n’avons pas trouvé de places de stationnement adaptées dans les parkings souterrains que nous avons utilisés. N’hésitez pas à solliciter le personnel pour être placé au mieux, près des barrières de péage. Vous pourrez accéder en voiture à l’esplanade du Palais Princier si vous disposez d’un macaron GIC- GIG (la circulation dans le quartier est réservée aux riverains). Le Palais, à l’architecture austère, n’est ouvert que l’été à la visite. Hors saison, tout juste remarquera- t-on le ballet d’un militaire factionnaire.

La police monégasque n’en est pas vraiment une : les agents, qui ne portent plus l’uniforme blanc et le casque dérivé du Bobby anglais qui leur donnaient cet aspect surrané et exotique, ne saluent pas le quidam et ne sont pas aimables. Nombreux, reliés entre eux par radio et épaulés par d’innombrables caméras de télésurveillance, leur travail évoque davantage le vigile de supermarché que celui qui est attendu d’un policier. Vous pourrez néanmoins les solliciter pour obtenir l’autorisation de stationner quand une interdiction est mentionnée.

Les altesses sont mises à contribution. Le Prince Albert préside l’association monégasque des handicapés moteurs qui propose notamment aux touristes une aide à l’hébergement en mettant à leur disposition deux appartements accessibles. Adresse: 9 rue Princesse Marie de Lorraine (à proximité du Palais Princier). Téléphone: (00 377) 93 50 71 00. Lors du Grand Prix de Formule 1, elle accueille des personnes en fauteuil roulant dans une loge située sur le circuit: accès gratuit y compris un accompagnateur, réservation dès janvier (prochaine édition du 24 au 27 mai 2001). La Princesse Stéphanie préside, quant à elle, l’association des handicapés mentaux (AMAPEI), située à Fontvieille. Faute d’une troisième association spécialisée, il semble que Caroline n’ait pas d’affectation dans le domaine du handicap…

Pour plus de renseignements, on consultera utilement le site Monte Carlo online ainsi que le Portail officiel du Gouvernement de Monaco.

Laurent Lejard, janvier 2001.

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