Question : Tu es quelqu’un qui bouge beaucoup, on a remarqué tes participations à certaines compétitions mais on sait très peu de choses sur ta vie; peux-tu te présenter en quelques mots ?

Clément Zannini : Je n’ai pas l’impression de bouger tant que ça ! J’ai 22 ans, j’ai une malformation de naissance à la jambe gauche dont seulement trois doigts de pieds, une cheville immobile qui fixe mon pied dans le sens de ma jambe auquel il manque le péroné. J’aime les jeux vidéos et pas mal de trucs inutiles, mais ça reste anodin face à la place que le skate prend dans ma vie…

Question : Depuis quand exerces-tu le skate et qu’est ce qui t’a poussé à te lancer dans cette pratique ?

Clément Zannini : J’ai commencé le skate il y a 11 ans environ. Ce qui m’a poussé à skater est la liberté de cette pratique, j’en suis immédiatement tombé amoureux.

Question : Comment te différencierais-tu des autres skateurs français ?

Clément Zannini : Le fait d’avoir une prothèse me différencie immédiatement, sinon le fait d’être le seul à en faire dans ma ville. J’ai très longtemps skaté seul et c’est encore souvent le cas, ce qui en plus de la douleur nécessite beaucoup de motivation, et je pense que cela fait de moi un puriste de cette discipline. J’ai passé des années à skater pour moi avant même de filmer le premier trick

Question : 
Vois-tu cette pratique comme une simple passion ou souhaiterais-tu être reconnu en tant que pro?

Clément Zannini :
 C’est bien plus qu’une simple passion, c’est un mode de vie. J’aimerais dans le futur trouver un moyen d’en vivre mais je n’ai pas la prétention d’en faire une carrière, même si c’est un rêve que personne ne refuserait et certainement pas moi.

Question :
 Quel est ton moment le plus marquant sur un skate?

Clément Zannini : 
Ce qui m’a probablement le plus marqué est que ma première vidéo fut postée sur le site The Berrics, car j’étais un grand fan de ce skatepark/ site et ce fut un choc!

Question : 
Tu te qualifierais de rider ou plutôt rider et handi?

Clément Zannini : 
Je me qualifierai de skateur, après je suis handicapé mais je n’aime pas les deux termes accolés. Adaptative skater, ça sonne beaucoup mieux bizarrement.

Question :
 Tu es l’un des seuls skateurs handis en France qui s’est dévoilé au monde, as-tu un message à transmettre à ceux qui ont du mal à se révéler?

Clément Zannini: Maintenant c’est plutôt facile, il suffit d’être présent sur les réseaux sociaux et de partager ce qu’on est capable de faire. J’ai rencontré des Américains et même un Allemand, c’est plutôt cool de voir d’autres personnes alors je vous incite à nous rejoindre !

Question : On te voit souvent avec la même prothèse, est ce que son ergonomie facilite la réalisation de tricks ?

Clément Zannini : 
J’ai à chaque prothèse les mêmes attentes, alors que d’une à l’autre elles semblent identiques, malheureusement les pieds se fragilisent et finissent par casser. Personnellement, le plus important pour skater correctement est d’avoir le pied le plus rigide possible.

Question : Dans le cas contraire, envisages-tu d’en avoir une adaptée au skate, avec un meilleur aérodynamisme et une plus grande légèreté ?

Clément Zannini : Ma prothèse est bien plus adaptée au skate qu’à la marche, sinon elle est suffisamment légère même si ça pourrait être sympa qu’elle le soit encore plus. Techniquement, le problème est que les pieds en carbone ont tous cassé, et les prothèses les plus chères et technologiques cassent généralement le plus rapidement. J’ai donc des pieds avec une lame assez fine mais une enveloppe en mousse de la taille de mon autre pied. Le pied est donc plus lourd que ceux avec une enveloppe creuse, mais dure bien plus longtemps et même si la lame casse, je peux continuer à marcher et skater même si ça devient incroyablement compliqué.

Question : Certaines villes de France comme Bordeaux mettent en avant la pratique du skate, est-ce le cas de Vittel, la ville où tu vis ? Quels sont tes spots favoris ?

Clément Zannini : Non, ma ville a construit un skatepark qui était ignoble dès l’ouverture. Une rampe avec un coping qui ressort monstrueusement. Les modules sont potables mais le sol qui les sépare ne l’est pas. Après, je ne peux pas leur en vouloir, l’engouement pour cette pratique se limite simplement à ma personne, sinon je constate que le climat social s’est vraiment amélioré dans les rues que je ride. La police ne m’ennuie pas et les gens me tolèrent. Dans ma ville, j’adore le square en face de la police municipale, sinon c’est la place « Stazione Centrale » de Milan que j’ai préféré skater !

Question : Des projets ?

Clément Zannini : Mon principal projet est de finir la vidéo de street que je compte faire pour mon sponsor Extrême; ça reste vraiment amateur dans sa conception mais je me donne à 100% pour chaque figure. J’aimerais bien avoir des opportunités pour filmer avec des professionnels ou participer à des événements de skate.

Propos recueillis par Wilfried Panatier, Pratikable.com, octobre 2015.

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