La solitude touche bien des personnes handicapées et contribue à rendre les tâches quotidiennes difficiles, l’apprentissage de l’autonomie n’est pas toujours facile. L’une des solutions généralement préconisées, c’est le placement dans une institution médico- sociale. Pourtant, de nombreuses personnes handicapées pourraient vivre dans des familles qui sont prêtes à les accueillir, dans un cadre à dimension humaine, solidaire et respectueux de l’intimité. Si la prise en charge pourrait certainement être amélioré, ce dispositif souffre également d’un manque d’information.

Le cadre réglementaire.
 L’accueil familial des personnes handicapées adultes est régi par la loi n° 89- 475 du 10 juillet 1989 relative à l’accueil par des particuliers, à leur domicile, à titre onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes. Certaines de ses dispositions sont modifiées par la récente loi de modernisation sociale (promulguée le 17 janvier 2002) mais dans l’attente de décret d’application. En pratique, un maximum de trois personnes âgées ou handicapées peuvent être hébergées dans des conditions définies par un contrat qui prévoit, outre les conditions d’hébergement, les possibilités de déplacement offertes aux personnes handicapées concernées. Le Président du Conseil Général de chaque département a la responsabilité de délivrer des agréments aux accueillants, de s’assurer que les personnes accueillies sont traitées dans des conditions décentes (protection de la santé, sécurité et bien- être physique et moral des pensionnaires, suivi social et médico- social), et de former les personnes agréées. Le placement familial peut être décidé par une institution médico- sociale, à titre permanent ou temporaire.

La rémunération de la famille d’accueil porte sur les services rendus, l’entretien courant de la personne accueillie et un loyer qui doit être raisonnable, le Conseil Général pouvant retirer un agrément pour ce motif. La moralité des accueillants doit être attestée : ceux qui auraient été condamnés pour certains délits (vol, escroquerie, recel, abus de confiance, agression sexuelle, faux témoignage, etc.) ne peuvent être agréés. Par ailleurs, les familles d’accueil ne peuvent recevoir des donations ou legs de la part des personnes qu’elles ont accueilli.

Pour quelques jours ou plus si affinités.
 L’accueil familial s’adresse autant à ceux qui souhaitent « changer d’air » pour quelques jours, une période de vacances, ou définir un projet de vie partagée au sein d’une famille. Il peut contribuer à acquérir une autonomie à la suite d’une hospitalisation, un peu comme une transition avant le retour à domicile. La diversité des accueillants permet de découvrir une ville, de profiter de la campagne, de s’établir à la montagne. Le choix des activités possibles et pouvant contribuer à une rééducation physique, à un nouvel équilibre psychique, à un épanouissement sensoriel, sont aussi nombreuses qu’il y a de familles d’accueil. Et l’accueilli peut également, avec ses besoins et sa personnalité, influer sur ces activités, apporter à la famille. Par simple échange humain.

Toutes les personnes ne peuvent être accueillies dans ce cadre, notamment celles qui relèvent de maladies mentales mal stabilisées, de soins intensifs ou d’une dépendance importante. En effet, l’objectif recherché est que l’hébergé participe à la vie d’une famille, partageant notamment les repas et des activités choisies. Autre obstacle notable, le coût de cet hébergement : il se situe entre 680 et 1.390 euros par mois, ce qui veut dire qu’il dépasse nettement le montant des allocations perçues par les personnes handicapées qui doivent en conséquence bénéficier d’une prise en charge au titre de l’Aide Sociale. L’accueil familial serait pourtant une solution économique et humaine au manque de places dans les institutions, dont le prix de journée est généralement supérieur à 150 euros. Il n’y avait, fin 2000, que 9.300 familles accueillant près de 15.000 personnes handicapées ou âgées en France.

Des familles témoignent. Éveline et Daniel, tous deux quadragénaires, sont devenus famille d’accueil au terme d’un long cheminement. Ils ont ouvert une ferme bio, dans laquelle était pratiquée de l’équithérapie, et ils ont progressivement créé des activités économiques. Leur travail s’inscrit dans l’économie alternative et solidaire. Ils reçoivent handicapés et malades mentaux, leur installation à la montagne, dans un petit village des environs d’Annecy, rendant l’accueil de handicapés moteurs très difficile. Ils privilégient l’accueil temporaire, les périodes de vacances : « nous souhaitons mélanger les différents handicaps, mais c’est difficile en l’absence d’une politique régionale, je ne trouve pas actuellement de troisième pensionnaire » précise Éveline. Les locaux ont été conçus pour l’accueil, préservant ainsi l’intimité des accueillis qui disposent de pièces distinctes tout en participant aux activités et aux repas de la famille. Éveline estime que son activité souffre d’un manque de considération, est parfois mal perçue ; pourtant, elle évoque des retours d’information sur d’anciens pensionnaires qui ont pu progresser dans leur autonomie et leur sociabilisation, au contact de la famille.

Étienne a demandé son agrément après avoir accueilli, durant plusieurs années, les grands- parents dépendants de sa compagne et son beau- frère qui « végétait » dans un hôpital psychiatrique. Au contact de la famille, ce dernier est progressivement sorti de sa prostration, participant aux activités communes, prenant des initiatives. Cette expérience positive, et « plein de bonheur à partager » ont conduit Étienne à accueillir actuellement trois personnes : « je privilégie la compatibilité entre les pensionnaires et notre famille, l’aspect financier passe au second plan. Je préfère accueillir quelqu’un qui a peu de moyens mais qui va contribuer à l’harmonie et à notre communauté de vie. Chacun apporte aux autres et on s’amuse bien ensemble ». Étienne est installé dans un hameau des Cévennes ardéchoises. Il fait partie des 90% d’accueillants installés en zone rurale ou périurbaine. On trouve très difficilement des familles d’accueil en ville.

L’accueil familial représente l’équivalent de 1% des places en institutions médico- sociales. Mais malgré les besoins, son développement n’est pas assuré pour autant. Pour compléter votre information, devenir vous- même accueillant, chercher une famille d’accueil, vous pouvez consulter les pages d’Accueil Pluriels, site ressource très bien conçu et complété d’une liste de diffusion.

Laurent Lejard, mars 2002.

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