La société privée qui a le monopole des jeux de loterie en France lance une série de tickets à gratter à l’effigie de la galerie des glaces du château de Versailles. Pour financer (entre autres) sa mise en accessibilité par l’installation d’un nouvel ascenseur près de l’Opéra royal récemment rénové. Juste retour des choses, penseront des historiens : les jeux d’argent faisaient partie des divertissements de cour. Mais ce qui choque, une fois de plus, c’est de constater que l’accueil des publics handicapés relève d’un financement exceptionnel, en l’espèce une redevance versée à l’établissement public qui gère le domaine de Versailles et rétribuant l’utilisation de l’image du château. Un domaine et un château qui sont la propriété de tous les Français, même s’ils doivent payer pour les visiter sauf, justement, s’ils sont handicapés…

Il n’est pas question ici de contester la volonté des dirigeants de l’établissement public du domaine de Versailles de le mettre dans la plus grande accessibilité possible, mais de s’interroger sur la nature du financement de cette dernière. A Versailles comme dans bien d’autres lieux historiques ou culturels, l’aménagement d’un site relève du mécénat et non pas de crédits d’investissement ou de fonctionnement : un financement exceptionnel pour un public d’exception, traité sous l’angle social, charitable, à part des autres. La réalisation de sentiers adaptés dans des parcs naturels nationaux est couverte par une compagnie d’assurances, l’audiodescription de spectacles théâtraux par la fondation d’une société de télécommunications, le mécénat est largement employé pour assurer l’accessibilité culturelle. Au risque d’une volatilité des actions, dont l’existence est subordonnée au renouvellement de ce mécénat. En tout cas, si cet apport supplémentaire de ressources en faveur d’établissements culturels est bénéfique aux visiteurs handicapés, il ne fait guère progresser le principe d’égalité d’accès et ne fait pas entrer l’accessibilité culturelle dans la pratique ordinaire, bien au contraire.

Laurent Lejard, août 2012.

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