Née en 1968 au Sénégal, N’diémé Lame vit en France depuis une douzaine d’années. Grâce à son père militaire qui a la nationalité française, elle a rapidement été naturalisée, ce qui lui a ouvert la citoyenneté française et lui permet aujourd’hui d’être candidate pour l’élection municipale de mars 2014. Ce sera dans le 13e arrondissement de Paris, où elle vit et travaille comme hôtesse de caisse dans un supermarché. Quand elle est venue en France en 2001, elle n’avait comme diplômes que des certificats de navigation sur Internet, couture et coiffure… Son enfance et son adolescence, elle les a vécues au Sénégal, élevée par sa mère qui a payé les soins et l’appareillage de sa fille qui était éduquée par l’Association Nationale des Handicapés Moteurs du Sénégal (ANHMS) : pas d’école ordinaire pour une enfant dont les jambes étaient atrophiées et le bras gauche handicapé. « Je suis arrivée en France quand j’avais 33 ans, pour recevoir des soins, raconte N’diémé Lame. J’ai suivi une formation d’hôtesse de caisse, et j’ai rapidement trouvé un emploi fixe chez Simply Market, où je travaille toujours. J’étais très motivée, j’allais partout, je tapais à toutes les portes. »

Installée à Paris, elle a gardé le Sénégal dans son coeur, et plus particulièrement les personnes handicapées pour lesquelles elle organise des actions de solidarité : « Je récupérais des objets, des biens, du matériel orthopédique que j’envoyais au Sénégal. Mon patron m’a aidé et m’a conseillé de donner un statut associatif à cette action. Depuis, avec l’Association Insertion Handicap (AIH), j’organise des journées de sensibilisation avec des tournois de football pour les jeunes, la collecte de matériel orthopédique et d’aides techniques. Depuis 2009, nous avons envoyé trois containers de matériels et parrainé des enfants handicapés, pour un total de 15.000€. On travaille avec des associations sénégalaises pour être sûr que tout arrive à destination et soit bien utilisé. On paie les taxes douanières, qui ont coûté 1.300€ en 2013. »

C’est son implication dans la vie solidaire du 13e arrondissement de Paris qui lui a valu d’être sollicitée par Étienne Traisnel, adjoint au maire chargé des personnes en situation de handicap, pour qu’elle rejoigne la liste d’union de la gauche pour l’élection de mars 2014. « J’ai demandé leur avis aux adhérents de l’association, à des familles, précise N’diémé Lame. Ils m’ont soutenue en disant que c’était une bonne chose. J’ai l’habitude de prendre la parole, de dire ce que j’ai à dire. »

Elle est déjà bien investie dans la vie sociale de cet arrondissement très peuplé, assure des permanences à la Maison des Associations, aide et accompagne pour des formalités administratives, et est trésorière adjointe du centre socioculturel en cours de création près de la porte d’Italie : « Il proposera des activités aux familles, aux jeunes, aux personnes âgées. Je me bagarre pour qu’elles puissent intégrer les adaptations nécessaires aux personnes handicapées : le centre sera accessible, bien sûr, mais on ne pense pas à l’adaptation. » Ce regard particulier, elle le porte également sur la participation des personnes handicapées qui résident dans l’arrondissement : « Il n’y a que moi qui participe, les autres n’osent pas sortir par peur du regard ou par crainte de problèmes d’accessibilité. » Problèmes qu’elle affronte aux commandes de son fauteuil roulant électrique, au risque parfois que sa gentillesse laisse place à la fermeté : un soir, par exemple, où deux conducteurs d’autobus ont refusé de l’embarquer parce que la palette d’accès était en panne, elle a bloqué le troisième jusqu’à ce que la RATP envoie une équipe mobile pour installer une rampe manuelle !

Mais pourquoi s’être engagée pour Anne Hidalgo ? « J’ai une sensibilité de gauche, répond N’diémé Lame. Quand je suis arrivée en France, je ne connaissais pas la politique. J’habitais à Cachan (Val-de-Marne) et des militants de l’UMP étaient venus me rencontrer pour me montrer comment voter, en m’accompagnant… et en s’assurant que j’avais voté UMP. J’en ai parlé à mon père qui m’a dit que ce n’était pas normal. Au deuxième tour, j’ai dit à ces militants que je n’avais pas besoin de leur aide, et j’ai voté comme je voulais. Ce qui m’intéresse, c’est mon quartier, les personnes handicapées, et les jeunes pour les sensibiliser aux handicaps, à l’environnement, mettre de l’ambiance, conduire des activités ensemble. Je ne crains pas l’étiquette pro-socialiste : je prends mes responsabilités. » Si sa 36e position sur la liste des candidats ne l’assure pas d’être élue, elle espère être utile : « J’essaierai de continuer d’aller jusqu’au bout de mes rêves, d’aider toujours les autres. »

Propos recueillis par Laurent Lejard, janvier 2014.

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