Patrick Toulmet n’est certes pas le premier homme politique en fauteuil roulant à siéger au Conseil Régional d’Île-de-France. Il a été précédé en mars 2004 par le militant des Verts Emmanuel Moreau, tombé en disgrâce 18 mois après son élection pour avoir participé à une conférence de presse conjointe avec une conseillère régionale du Front National. Malgré cette antériorité d’un élu tétraplégique se déplaçant en fauteuil roulant électrique, le moins que l’on puisse dire est que l’accès à l’hémicycle de ce conseil régional est fort peu digne de l’hôtel particulier dans lequel il est installé : « On accède par un monte-charge, après avoir contourné les poubelles ! », explique Patrick Toulmet. Il aura toutefois la consolation de siéger à côté des vice-présidents, placé à l’extrémité de la seule travée de plain-pied.

La campagne électorale de Patrick Toulmet n’a pas été de tout repos. Il lui a fallu d’abord vaincre des réticences dans son propre parti : candidat malheureux à la conquête de la Mairie de Sarcelles (Val d’Oise) en 2008, il devait être tête de liste UMP dans le département voisin de Seine-Saint-Denis, dont il préside la chambre des métiers et de l’artisanat. Bien que soutenu par la candidate Valérie Pécresse, Patrick Toulmet a été rétrogradé en troisième position : « Quelques élus locaux de l’UMP ont dû surmonter le choc d’avoir à faire campagne avec un candidat handicapé, raille-t-il avec un léger sourire. J’étais bien perçu sur les marchés, par les citoyens, avec un regard sympathique, presque normal. Avec les ados, les jeunes, j’ai un rapport d’égal à égal, alors que les moins jeunes s’interrogent sur le pourquoi de mon entrée en politique ». Durant la campagne électorale, une action a été médiatisée : une immersion dans les transports collectifs. « On a effectué un parcours dans le métro parisien. À Saint-Lazare, ça allait, mais pour la ligne A du RER, on nous a fait des difficultés parce que nous étions trois en fauteuil roulant. Chantal Jouanno était choquée. Sincèrement, je pense qu’on peut être utile au niveau de la région. Il manque des personnes handicapées dans les instances décisionnaires, je suis choqué qu’il n’y ait pas davantage de candidats handicapés lors des élections, il existe une ignorance de nos soucis, de nos problèmes ».

Pour son premier jour de conseiller régional, Patrick Toulmet a semblé presque étranger à la pièce écrite d’avance qui se jouait autour de lui : la réélection sans opposant du socialiste Jean-Paul Huchon à la présidence. Pas de sollicitation de médias, ni d’entretiens complices avec tel ou tel élu dans un conseil qui compte une flopée de ministres en exercice; un garçon sage, presque invisible, assis derrière son pupitre et dont la seule action en cette matinée du 26 mars 2010 fut d’aller glisser un bulletin dans l’urne. « Au sein du Conseil Régional, je refuse d’être le handicapé de service, affirme-t-il. Je souhaite participer aux commissions Transports, Formation et apprentissage. L’Ile-de-France a un gros retard dans ce domaine, elle est 16e au niveau national en nombre d’apprentis. Je préside un centre de formation de 3.000 places, j’en connais l’importance pour sortir nos jeunes des banlieues ». Et il établit un parallèle avec la situation des personnes handicapées : « Pouvoir accéder partout, être bien formé pour être bien intégré ». L’accessibilité lui tient particulièrement à coeur : « On doit traiter les problèmes d’accessibilité, le parcours du combattant qui en résulte, et développer des enveloppes budgétaires conséquentes. Ce problème d’accès au Conseil Régional, est-ce que c’est logique au 21e siècle? ». Il se rappelle que lorsqu’il était conseiller municipal à Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), le maire avait fait installer un élévateur fauteuil après que Patrick Toulmet eut subi une chute sérieuse.

Patrick Toulmet veut également s’engager en faveur de l’amélioration du sort actuellement réservé aux personnes autistes, et parce qu’il y a trouvé des amis militants réceptifs, il a choisi de s’engager au sein de l’UMP : « Il n’est pas normal que des autistes soient accueillis en Belgique, avec l’État français qui paie, ça ne doit plus exister ». Politiquement, il se dit plutôt centriste de gauche, avec des valeurs gaullistes, tout en affirmant se sentir bien à l’UMP : « Je veux m’impliquer sur les questions de la jeunesse, défendre la formation. C’est un sujet que je connais bien, je rappellerai mon bon souvenir à Valérie Pécresse. Tous les politiques, il faut leur mettre des coups de pied dans le c… ! »

Laurent Lejard, avril 2010.

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