Un Français sur mille est aveugle et il y a environ dix fois plus de personnes malvoyantes. A des degrés divers, leur indépendance est limitée par l’inaccessibilité d’une information visuelle omniprésente. Et quand surviennent des problèmes de santé, les compensations diverses mises en place au quotidien ne sont plus aussi efficaces.

Sans être alarmantes, une angine ou une entorse sont douloureuses et conduisent souvent chez le médecin. Consultation, explications, prescription. Quand on ne voit pas, on demande au pharmacien d’indexer les boîtes de médicaments pour être sûr d’éviter toute confusion. Mais pour plus de sécurité, on peut avoir recours à Pharmabraille qui offre un service permettant aux personnes aveugles d’identifier seules un médicament, de connaître sa posologie et ses contre- indications. Depuis 1996, sur un simple coup de téléphone, l’association envoie des étiquettes en braille et les notices adaptées pour les principales spécialités françaises. Malheureusement, le recours à la médecine de ville n’est pas toujours suffisant, et s’il faut se rendre à l’hôpital. Mais laissons Sophie parler de son expérience : « D’une façon générale, il faut se faire accompagner car on se trouve en terrain inconnu. Quand on arrive, c’est le personnel d’accueil ou celui du service, qui vous conduit. Mais ce qui est le plus pénible, c’est d’attendre sans rien savoir. Dans sa chambre ou pendant un examen, on est là, on souffre dans son corps et on ne sait pas ce qui se passe. On est un peu abandonné. L’accessibilité des lieux publics aux personnes non- voyantes est encore balbutiante et tout se résout au cas par cas à l’hôpital comme ailleurs ».

N’oublions pas qu’avec le vieillissement de la population, il y a de plus en plus de personnes âgées déficientes visuelles. Pour beaucoup d’entre elles, les hospitalisations sont très perturbantes. A quatre- vingts ans, André atteint d’une affection oculaire évolutive, vient d’être hospitalisé en cardiologie. Indépendant à son domicile, il s’est retrouvé dans un univers angoissant où il n’avait plus de repères. Plus de sons familiers, que des bruits et des voix inconnues. Ses objets personnels introuvables car disposés n’importe comment. Si on lui proposait de l’aide, il se sentait humilié. Face à l’inconnu, il n’avait plus confiance en personne et la colère l’avait rendu agressif.

Le récent rapport Descargues, disponible en ligne sur le site service-public.fr, fait le point sur l’accessibilité des personnes aveugles et malvoyantes aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Parallèlement à une indispensable formation à l’accueil des personnes handicapées, il faudrait exiger de l’administration de la santé un effort pour utiliser le progrès technique en faveur des patients déficients visuels. Chacun recevrait ainsi les informations auxquelles il a droit sans subir d’intolérables préjudices.

Pierre Brunelles, décembre 2000.

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