Jean-Pierre Moreau est « entré en handicap » il y a plus d’une vingtaine d’années; les médecins lui diagnostiquent alors une sclérose en plaques à évolution lente, il marche avec une canne, puis deux, puis utilise un fauteuil roulant. Bien plus tard, à la faveur d’autres investigations, il apprendra que les praticiens se sont trompés : Jean- Pierre Moreau est atteint de la maladie de Strümpell Lorrain, une affection héréditaire qui réduit progressivement la motricité et dégénère en paralysie à des degrés variables. Mais ce n’est pas cet événement qui l’a fait se lancer dans la recherche de la guérison, c’est le refus du handicap, de l’altération de son autonomie : « J’aime aller vite, je veux faire des choses par moi- même sans l’aide des autres, avoir une autonomie pour aller en montagne, éviter des galères et ne pas dépendre d’autrui ». Il veut retrouver son intégrité. Et en attendant le traitement qui, espère- t-il, le guérira, il juge important de ralentir la maladie. Les hasards de son activité professionnelle l’ont conduit à parcourir le monde pour tenter d’identifier les thérapies qui pourraient améliorer son état.

« Après l’annonce de la sclérose en plaques, j’ai vendu mon élevage agricole et je suis parti en Afrique. Le seul traitement que l’on me proposait à l’époque, c’était de prendre de la cortisone. A mon retour, il y a vint ans, j’ai travaillé pour Radio Nova et le mensuel Actuel. Un jour, on m’a envoyé en Suède effectuer un reportage sur une thérapie expérimentale de la sclérose en plaques; si ce traitement ne m’a rien fait, il a initié en moi une autre réflexion sur la maladie et j’ai rejoint une association spécialisée ».

A partir de cette étape de son évolution personnelle, Jean- Pierre Moreau parcourt les continents à la recherche de la guérison d’une affection qu’il n’a pas. Sa quête le conduit aux Philippines, chez un « médecin aux mains nues » qui l’accueille en lui diagnostiquant une sclérose en plaques avant même le premier examen; le guérisseur lui extirpe par la suite, de diverses parties du corps et moyennant finances, moult tumeurs sanguinolentes…

Ce charlatanisme prendra fin après que Jean-Pierre Moreau aura pu photographier une séance de « traitement » et constater de ses yeux qu’il s’est fait abuser par un prestidigitateur, réelle spécialité des soi- disants guérisseurs philippins qu’il qualifie « d’arnaque mais très belle expérience » !

Nullement découragé, il poursuit une quête qu’il ne qualifie pas d’initiatique : « Dans des parcours de ce type, on vit des rencontres ». Qui l’on conduit vers une cure… de pommes dans l’Himalaya, le végétarisme, l’urinothérapie (« Technique yogi qui m’a mis face à mon corps et a changé mon hygiène de vie, me rendant moins agressif et colérique ») et l’acupuncture électrique qu’il a découverte en Inde. Jean- Pierre Moreau affirme que cette acupuncture a inversé l’évolution de sa maladie : « Sur les 32 aiguilles que l’on m’applique, certaines reçoivent un courant faible. Cette stimulation m’a fait retrouver de la sensibilité dans les orteils, mes pieds se sont redressés. Cela me donne l’espoir de remarcher ». Un espoir que nul ne saurait lui retirer, même s’il semble insensé, parfois alimenté par des techniques modernes illusoires tel le programme « Lève- toi et marche » (lire ce Focus) : « A coté de Rabischong, ce que je raconte c’est de la roupie de sansonnet. Je ne veux pas donner de leçon, mon livre n’est pas un guide des thérapeutiques alternatives ni un récit initiatique. Je veux donner du courage, dire que l’on est pas coincé par un handicap, et relativiser la vie »…

Laurent Lejard, janvier 2005.


Jean-Pierre Moreau, « Parce que je veux pas mourir » est paru chez Oh Editions. Diffusion en librairies.

Partagez !