Sheila Warembourg, dans le cadre de ses activités au Service d’Accompagnement de la Vie Affective et Sexuelle des personnes handicapées créé par Handicap International, a présenté un épisode de la série télévisé Age sensible et un court- métrage de Philippe Thomas, L’homme de compagnie. D’origine américaine, Sheila Warembourg est diplômée en Sexologie et Santé Publique; elle a visionné les deux fictions en compagnie des personnes qu’elle reçoit dans ses groupes de parole.

Désiré parce qu’handicapé. Dans le 37e épisode (inédit faute d’Audimat) de la série télévisée Âge Sensible, une jeune femme délurée veut se « faire » Pierre, étudiant paraplégique, « pour savoir ce que c’est que faire l’amour avec un handicapé », comme une performance ou un gibier de plus à son tableau de chasse. « Cette fiction est un outil pédagogique intéressant pour mon travail au service d’accompagnement, explique Sheila Warembourg, mais il ne faut pas se tromper sur le public concerné. Ce ne sera qu’un outil capable d’enrichir la discussion. Les situations sont- elles véridiques? Selon un jeune homme Infirme Moteur Cérébral auquel j’ai montré le film, oui. ‘Etre désiré par une femme à la recherche de nouvelles expériences, ça m’est déjà arrivé, pourquoi pas ». Les jeunes hommes rencontrés par Sheila lui ont également rapporté être l’objet de jalousie, de la part d’amis valides, quand ils se « lèvent une nana »…

« Mais d’après mes observations des jeunes et moins jeunes ayant un handicap moteur et vivant en établissement spécialisé, c’est du pur fantasme ! Ça ne fait pas de mal de fantasmer, mais leur réalité est plus basée sur la solitude et les difficultés de créer des relations stables, intéressantes, etc. Il faut aussi noter la différence de ‘vécu’ entre celles ou ceux qui sont nés avec un handicap et celles ou ceux qui le sont devenus. La construction de la personne, sa vie affective et sexuelle, le rapport qu’elle a avec son corps, les différences sont importantes et difficilement comparables. En tous les cas, il y a une bonne discussion à avoir sur ce qui est dit à la fin : ‘tu ne veux pas qu’on vous aime pour votre corps’. A mon avis, l’acceptation de son corps est un sujet à discuter dès l’adolescence : je mérite, mon corps mérite, je peux séduire, je suis séduisant, comment gérer la jalousie, comment faire pour ‘la garder’, y a-t-il des copines ou des copains moins ‘visibles’ mais intéressants »…

Le sexe pour le sexe. Seconde fiction soumise au regard des jeunes, le court- métrage de Philippe Thomas L’homme de compagnie. Il présente un jeune homme IMC (Fred) particulièrement séducteur qui rencontre une jeune femme; elle l’emmène chez elle, lui fait l’amour. Sheila Warembourg précise: « J’ai visionné ce film dans plusieurs contextes: en intimité avec des personnes ayant un handicap, en grand colloque (parents, personnes handicapées et professionnels), entre professionnels uniquement. Les personnes ayant un handicap l’adorent, ça leur parle. Fred leur apparaît sexy, rebelle, léger, ‘c’est lui qui détient le pouvoir’. Les professionnels ont des réactions positives; ils s’associent, en général, aux difficultés de la personne handicapée. Certains ont été capables de voir le côté ‘femme’ et l’aspect ‘désirer un homme qui ne pense pas qu’à ça’. Mais la réaction des parents n’a pas été enthousiaste, à leurs yeux, c’est du sexe pour le sexe. Sans amour ni engagement. Et, je dois le préciser, sans protection ! ».

Entre fantasmes et regards des autres, les personnes handicapées motrices s’efforcent d’assumer un besoin encore mal compris et parfois mal perçu : avoir une sexualité. Simplement.

Jacques Vernes, mars 2003.


Pour en savoir plus sur le Service d’Accompagnement à la Vie Affective et Sexuelle (AVAS), téléphonez au 04 50 19 07 24. Mél: HIPFAVAS@aol.com.

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