Provençale dans certaines de ses parties mais administrativement rattachée à la (vaste) région Rhône-Alpes, la Drôme est, en quelque sorte, la porte du Sud pour les nombreux touristes qui la traversent chaque année sans toujours prendre le temps de s’y arrêter : tant pis pour eux ! Historiquement, le département (qui tire son nom d’une rivière qui le traverse) a été formé à partir de « morceaux » du Dauphiné et du Comtat Venaissin, et ses paysages contrastés tiennent tout à la fois des deux : c’est ce qui rend unique ce terroir et ses habitants.

En faisant volontairement l’impasse sur l’élégante et très (trop ?) urbaine Valence, la préfecture, on peut ainsi musarder au gré des petites routes qui jalonnent la célèbre Nationale 7… Premier exemple emblématique : Hauterives et son fameux Palais idéal du facteur Cheval. Perdu aux confins nord du département, l’endroit se mérite, caché au détour de la D51 (quittez la vallée du Rhône à Saint-Vallier), mais quelle récompense ! Il ne faut certes pas s’attendre à un vaste monument mais ce chef d’œuvre, construit entre 1879 et 1912 par Ferdinand Cheval avec les pierres qu’il ramassait lors de ses tournées, a quelque chose de colossal dans le tour de force et la magie qui en émane. Les difficultés de sa conservation font que la visite intérieure (bardée d’escaliers) en est fortement restreinte mais cela n’enlève rien à l’émerveillement. De quoi reprendre la route avec des étoiles dans les yeux…

Palais idéal du facteur Cheval à Hauterives

Autre exemple buissonnier : Romans, à quelques kilomètres seulement de Valence. Cette ancienne capitale industrielle de la chaussure de luxe est en passe de réussir sa reconversion, grâce notamment à l’installation, sur son axe de circulation principal, d’une célèbre enseigne de magasins d’usine. Incontournable (et très fréquenté) au moment des soldes ! Le centre ancien aussi, tire son épingle du jeu, avec ses rues tortueuses, ses terrasses ombragées et ses vieilles façades. A flanc de coteau, le Musée international de la chaussure (complété d’un petit musée sur la résistance et la déportation) vaut par ailleurs le détour : outre les splendides bâtiments conventuels dans lesquels il est installé, sa muséographie met en vedette d’authentiques trésors. L’accessibilité de certaines parties est perfectible mais il reste assez à découvrir par ailleurs pour y consacrer une bonne demi-journée, d’autant que l’espace réservé aux expositions temporaires est de plain-pied. Vous n’ignorerez plus rien, en sortant, des techniques de fabrication à travers l’Histoire, aux modèles les plus précieux ou excentriques ! Accès peu commode en voiture (tourner dans la première rue immédiatement en sortie de rond-point) mais stationnements réservés à proximité.

L’un des itinéraires bis permettant de délester les axes surchargés de la vallée du Rhône et de contourner Valence passe par le segment de D538 qui relie Romans à Crest via Chabeuil. Les initiés qui ont déjà emprunté cet itinéraire ignorent probablement qu’une halte nature parfaitement accessible les attend près d’Allex, bourg posé au bord de la réserve naturelle des Ramières. Laquelle, crée en 1986 sur d’anciennes carrières et gravières, se présente à la Gare des Ramières. Aucun train, ici, mais une maison largement ouverte sur un écosystème aussi passionnant que fragile que la lumineuse muséographie permet de comprendre. On passerait des heures à contempler, par une vitre astucieusement disposée sur toute sa hauteur, les innombrables événements qui ponctuent la vie de la mare attenante ! Accès par élévateur, accueil attentionné, parking possible à proximité.

Parallèle à la vallée du Rhône, une route buissonnière pour voyageurs dilettantes permet de tracer plein sud dans une campagne alternant plaines et collines. Les plus pressés passeront directement par Montélimar… Généralement, lorsque l’on y fait halte, c’est pour le nougat : moult boutiques-musées ad hoc existent d’ailleurs en bord de N7, la plupart de plain-pied, où des ateliers fonctionnant en semaine permettent de découvrir les étapes de fabrication de cette (très calorique) friandise. Parmi les plus accessibles, citons notamment la maison Soubeyran, valeur sûre depuis 1837, récemment déménagée en périphérie sud, et l’hallucinant Palais du nougat et des bonbons, au nord de la ville, à réserver aux enfants. Mais la ville natale de Marianne James (alias Marianne Gandolfi) mérite davantage qu’une halte gourmande : outre un centre-ville piétonnier où il est agréable de flâner, il faut absolument prendre le temps de s’installer à l’une des nombreuses terrasses qui longent les Allées Provençales, splendide cours ombragé de platanes où la circulation automobile, redevenue raisonnable, n’empêche plus les conversations animées si typiques du Midi…

Depuis Montélimar, une autre route buissonnière permet, par Dieulefit et de magnifiques paysages de champs de lavande et de vieux villages de pierres sèches accrochés à leur coteau, d’atteindre Taulignan, en pleine Drôme Provençale. Cette jolie cité fortifiée qui a conservé ses remparts a longtemps vécu de l’industrie séricicole. Un récent atelier-musée témoigne avec émotion de cette période révolue. On peut y découvrir la genèse de la soie, du bombyx du mûrier aux brocarts les plus précieux, ainsi que d’imposantes machines (certaines en démonstration) qui font revivre une histoire parfois difficile, où les hommes, et surtout les femmes du XIXe siècle n’ont pas toujours eu le meilleur rôle… Parking aisé, boutique, toilettes adaptées.

En redescendant vers la vallée du Rhône, Grignan est un incontournable : dominé par son célèbre château (où mourut la non moins célèbre marquise de Sévigné), sa silhouette se découpe sur fond de colline comme un village provençal de carte postale. Hélas, la topographie de l’endroit, toute en fortes pentes, rend ardue la balade en fauteuil roulant. Sachez néanmoins que deux places de stationnement réservé sont disponibles au pied du château, dont la visite, faute d’accessibilité, se limite au parvis. Bon à savoir pour les Fêtes nocturnes organisées tous les étés, où l’accueil du public handicapé est soigné. Mais même en dehors de ces événements, le panorama splendide qui se découvre depuis la terrasse vaut néanmoins la peine d’y monter !

Sur la route qui serpente en contrebas, les amateurs de sirops « historiques » pourront faire une halte gourmande au domaine d’Eyguebelle : indépendante du monastère éponyme depuis 1996, la fabrication artisanale se poursuit néanmoins dans sa région d’origine. Le musée-boutique récemment ouvert en bord de D541 retrace à la fois le passé de la marque et les processus de fabrication de ses produits emblématiques, issus pour la plupart de productions fruitières locales. Une vaste boutique offre par ailleurs la possibilité de déguster quelques raretés difficilement trouvables ailleurs. Accès gratuit, de plain-pied, parking conseillé en haut de côte, au plus près de la rampe d’entrée.

Ferme aux crocodiles

De retour en vallée du Rhône, du côté de Pierrelatte, entre la N7 et l’autoroute, la Ferme aux crocodiles est l’un des principaux moteurs touristiques du département. Nombreux sont les visiteurs qui y font halte sur la route des vacances. À éviter, donc, en période d’affluence, sauf à aimer faire la queue et/ou se presser dans les allées en très nombreuse compagnie ! Pour le reste, la reconstitution minutieuse de quelques uns des écosystèmes favoris de ces impressionnantes bestioles est une vraie réussite. Frissons garantis, surtout les mercredis et dimanches après-midi, lorsque les reptiles sont nourris : le reste du temps, en effet, ils demeurent immobiles, gueule parfois grande ouverte, à quelques mètres en contrebas des passerelles. Lesquelles, nanties de grilles pour d’évidentes raisons de sécurité, risquent néanmoins de décevoir les plus petits (ou assis), empêchés de voir au plus près. Les aveugles, en revanche, disposent de cartels braille placés à côté des textes explicatifs.

Que l’on soit amateur de sensations fortes, simple amoureux du patrimoine ou des beaux paysages, une escale en Drôme s’impose, même aux plus pressés : il n’y a pas que la N7 ou l’autoroute dans la vie !

Jacques Vernes, septembre 2009.


Sur le web, le site Drôme Tourisme propose une information généraliste sur le département, avec quelques mentions d’accessibilité. Idem pour l’office de tourisme de Romans. Celui de Valence propose quant à lui une rubrique Tourisme adapté très complète, comprenant un plan pour malvoyants et une liste des places de stationnement réservé.

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