Château Fort pour handis moteurs. 322 marches, c’est ce que les visiteurs du château médiéval (reconstruit au début du XXe siècle lors de l’occupation allemande de l’Alsace) du Haut Koenigsbourg doivent affronter. Une fois par an, les personnes en fauteuil roulant peuvent toutefois le visiter. L’initiative en revient au Groupement pour l’Insertion des personnes Handicapées Physiques (Gihp) d’Alsace et à l’un de ses dirigeants, Charles Léopold, « l’idée est venue sur le mode de la plaisanterie et l’Administrateur du monument a relevé le défi ». Ce mois d’octobre voit la cinquième édition de la journée de visite adaptée : une vingtaine de personnes handicapées motrices, pour lesquelles le parcours s’arrête habituellement dans la cour du château, pourront visiter les salles. Ce sont les pompiers volontaires des communes voisines qui portent les personnes sur leur fauteuil roulant : quatre pompiers pour chaque visiteur, rassemblés par groupe de quatre, les groupes se suivant à 15 minutes d’intervalle pour éviter l’embouteillage. La visite dure deux heures et se termine par une collation.

« L’opération ne coûte rien: le Gihp prend à sa charge les frais postaux, les pompiers sont bénévoles, les visiteurs bénéficient de la gratuité prévue par le règlement du Centre des Monuments Nationaux, la collation est offerte par un supermarché ». Ces visites ne sont toutefois possibles que pour les utilisateurs de fauteuil manuel: tétraplégiques ou infirmes moteurs cérébraux doivent abandonner pour quelques heures leur fauteuil électrique. Les autres jours, un Scalamobil pourrait être utilisé: cet appareil soulève un fauteuil et le hisse de marche en marche mais son utilisation nécessite une formation préalable et engage forcément la responsabilité juridique de la personne qui le manie. Ces raisons ont conduit le Centre des Monuments Nationaux à mener une réflexion avec ses personnels d’accueil afin de trouver des solutions adaptées. En attendant, les quelques Scalamobil mis en service ne sont guère utilisés; quant à celui du au Haut Koenigsbourg, de nouvelles règles de sécurité vont en empêcher l’utilisation…

Château pour tous. Le château de Carrouges (Orne) en est à la deuxième édition de ses journées Accueil pour tous. Les visiteurs sont accueillis par des étudiants en BTS Tourisme qui les orientent vers les aides à la visite. Les déficients visuels disposent de brochures en braille ou gros caractères, plans en relief, matériaux et objets à toucher. Des visites commentées sont adaptées aux déficients intellectuels; d’autres ont lieu en Langue des Signes Française. Les personnes en fauteuil roulant sont portées par des personnels de la Sécurité Civile. Bref, tous les besoins spécifiques semblent couverts par l’opération qui dure trois jours et fait l’objet d’une campagne d’information avec édition d’un dépliant imprimé en couleurs. Ici, le Centre des Monuments Nationaux a mis en oeuvre des moyens importants financés par un budget.

Pourtant, l’Administratrice du château, Claude- Catherine Terrier, constate moins de demandes cette année (l’inscription préalable est obligatoire) alors qu’en 2001 une centaine de personnes handicapées avaient visité Carrouges. Les centres d’hébergement ont pourtant été informés dès juillet pour pouvoir s’organiser. Une relance était prévue en septembre, mais un cafouillage l’a fait passer à la trappe. D’autres événements culturels viennent également diluer l’intérêt du public: Semaine du goût et Lire en fête sont organisés les mêmes jours.

Châteaux en Bourgogne. A Châteauneuf- en- Auxois (Côte d’Or), les moyens déployés sont plus modestes. Le château médiéval pouvait, le dimanche 13 octobre, être visité par les personnes en fauteuil roulant. Des pompiers bénévoles assuraient le portage pour accéder aux étages. En proposant cette opération, les soldats du feu souhaitent valoriser leur activité citoyenne et stimuler les vocations. Ils ont porté plus d’une quarantaine de « fauteuils » durant la journée, qui ont pu accéder à toutes les salles ouvertes ordinairement au public et dont les trois quarts sont inaccessibles. Des maquettes en bois, utilisés pour les actions pédagogiques, permettent également aux déficients visuels de toucher le château et d’apprécier les évolutions du bâtiment. « La balle est dans notre camp, c’est à nous de renouveler l’opération » assure l’Administrateur du château, Daniel Sautai. Si l’installation d’un ascenseur lui semble techniquement possible sans dénaturer le bâtiment, elle nécessiterait de gros travaux et le déplacement d’un logement de fonction.

En attendant, c’est lors des journées spéciales, envisagées également en 2003 au château de Bussy- Rabutin (Côte d’Or), que de nombreuses personnes handicapées accéderont à ces monuments nationaux. Daniel Sautai le confirme : « accueillir tous les publics est bien la moindre des choses que nous devions faire »…

Laurent Lejard, octobre 2002.

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