Christy Brown est né à Dublin le 5 juin 1932 dans une famille de 23 enfants, d’un père ouvrier en bâtiment. Sa naissance fut très difficile, mettant la vie de sa mère en danger. A un an, il était incapable de tenir assis. Le diagnostic de paralysie cérébrale fut établi presque immédiatement par les médecins. Christy ne pouvait ni parler ni marcher et semblait incapable de communiquer.

Un jour, voyant l’une de ses soeurs s’amuser avec une craie, il voulut jouer à son tour et se saisit de la craie avec les orteils de son pied gauche. Sa mère dessina alors la lettre A sur le sol et lui fit de même, toujours avec le pied gauche. Ce fut avec ce dernier qu’il apprit à écrire. Il avait sept ans. Les années qui suivirent furent celles de sa découverte du monde extérieur, dans une voiturette bricolée par ses frères. La perte de ce premier moyen de locomotion s’accompagna, à dix ans, d’une douloureuse prise de conscience du handicap. Il ne sortit de cette dépression que grâce à la peinture. Les questions existentielles et la dépression revinrent avec l’adolescence. L’un de ses premiers amours, une fille de son âge nommée Katrina, lui proposa alors un pélerinage à Lourdes et ils y partirent ensemble. Là, Christy découvrit qu’il n’était pas le seul à souffrir dans sa chair ; cette constatation lui permit, au retour, de mieux accepter et intégrer son handicap dans le monde des valides.

Les Brown construisirent à leur fils un espace sur mesure afin que ce dernier puisse y vivre et y pratiquer les exercices de physiothérapie qui lui avaient été prescrits. Il se rendit à Londres pour y rencontrer une spécialiste qui lui conseilla de ne plus utiliser son pied gauche et de travailler dur à la rééducation de son corps entier. Il s’en suivit une nouvelle période de renfermement d’où Christy sortit, à dix- huit ans, en tombant de nouveau amoureux !

Incapable d’exprimer ce qu’il ressentait en dehors du contexte familial, il dicta à l’un de ses frères une première tentative d’autobiographie. Il en écrivit une seconde quatre ans plus tard, après de nombreuses lectures et quelques études réalisées en grande partie grâce à l’aide du médecin de famille. Deux chapitres de cette autobiographie furent lus en public et obtinrent un immense succès : un artiste venait de voir le jour!

La vie de Christy Brown a fait l’objet d’un film (irlandais), réalisé par Jim Sheridan, avec pour titre « My left foot ». Il a été présenté en 1989, huit ans après la mort de Brown, et a obtenu un succès mondial. On trouve environ une dizaine de ses livres (textes, poèmes…) dans les librairies francophones parmi lesquels, bien sûr, « My left foot » et « Down all the days ». Une traduction française du premier a été éditée en 1991 chez Robert Laffont, sous le titre (maladroit) « Du pied gauche« . « Celui qui regardait passer les jours » a été édité au Seuil.

Jacques Vernes, mai 2001.

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