Le quotidien Nice Matin nous en apprenait récemment une bien bonne : la principauté de Monaco a triplé en cinq ans le nombre de ses logements adaptés aux personnes à mobilité réduite ! En 2011, précise le conseiller du Gouvernement pour les Affaires sociales et la Santé, Stéphane Valeri, « il a donc été décidé que pour toute nouvelle construction domaniale serait réservé un quota d’environ 3 % d’appartements adaptés – soit 1 appartement adapté tous les 30 logements […] De 11 appartements adaptés en 2010, nous sommes déjà passés à 25 en 2014 et 5 de plus figureront dans la livraison de la Tour Odéon, au début de l’an prochain. Nous pourrons alors satisfaire la totalité des demandes. » Ces appartements seront ouverts aux résidents reconnus handicapés par une commission nationale, même s’ils ne sont pas monégasques, à la différence des autres logements appartenant à l’Etat. Voilà une politique progressiste plutôt inattendue sur le rocher des milliardaires !

Parce que dans le pays qui l’enclave, la France (qui n’est pas encore un pays pauvre), c’est tout le contraire qui se prépare : la destruction durable de l’adaptabilité de la presque totalité des logements en immeubles neufs. Dans le pays des Droits de l’Homme, les personnes handicapées, à mobilité réduite, âgées en perte d’autonomie vont perdre leur droit au logement et la liberté de choisir le lieu où elles veulent habiter. Cela par la modification de la réglementation en vigueur qui oblige à construire des appartements adaptables dans les immeubles de moins de quatre étages bâtis sans ascenseur : actuellement, il est obligatoire de construire la cage d’ascenseur pour qu’une installation soit possible, économiquement et sans modification structurelle. Mais le Gouvernement conduit par le « socialiste » Manuel Valls a décidé de supprimer l’obligation d’adaptabilité de ces logements, sans que la « réserve ascenseur » soit retirée, invoquant des économies nécessaires sur le coût de construction. Le choix sera considérablement restreint, fait par défaut : habiter en rez-de-chaussée avec tous les risques d’intrusion et de sécurité connus dans les villes et ensembles résidentiels, ou dans les rares immeubles de quatre étages et plus actuellement construits. Et dans le contexte actuel de pénurie de logements sociaux, les listes d’attente vont fortement gonfler puisque l’offre accessible va chuter.

Le fait est là : une volonté affirmée d’exclure du droit à un logement digne ceux qui en ont le plus besoin. Les occupants valides pourront bénéficier plus tard d’un ascenseur puisque la « colonne » sera construite, mais des personnes handicapées ou âgées dépendantes ne pourront y loger puisque les adaptations nécessaires ne pourront être réalisées. Volonté qui s’inscrit dans une politique plus large de réduction de la mise en accessibilité des transports, de la voirie, des établissements et installations recevant du public. L’ordonnance et les textes réglementaires que le Gouvernement va publier avant la fin du mois de septembre créent les conditions d’une exclusion durable des personnes handicapées de la vie sociale et professionnelle. Il ne restera plus à ce Gouvernement qu’à parachever son oeuvre de destruction du vivre ensemble en rognant les allocations, revenus de remplacement et prestations sociales pour prétendre réduire le déficit budgétaire, tout en clamant que sa « bonne » politique est bien mal comprise et qu’elle doit être mieux expliquée aux (stupides) Français. Vieux refrain…

Laurent Lejard, septembre 2014.

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