Depuis plusieurs mois, les médecins étrangers exerçant en France demandent une revalorisation de leur statut professionnel et une rémunération égale à celle des praticiens français. La majorité d’entre eux exerce dans des hôpitaux publics, ayant progressivement comblé la pénurie en médecins français, qui préfèrent gagner davantage d’argent en travaillant en cabinet dans le secteur privé. Mais voilà, exercer en libéral coûte de plus en plus cher aux gynécologues et obstétriciens : ils sont en première ligne des poursuites intentées par des victimes d’erreurs médicales, dont le nombre ne cesse d’augmenter. Les déclarations de litiges ont triplé, entre 1999 et 2005, selon la Fédération Française des Associations de Médecins-Conseils Experts, pour s’élever à 890. Durant la même période, le taux d’indemnisation par litige a été multiplié par 22, et les cotisations d’assurance professionnelle des praticiens ont fortement augmenté. Praticiens qui, à force de grève, ont obtenu la prise en charge des deux-tiers de leur prime d’assurance par les assurés sociaux : le Ministre de la santé, Xavier Bertrand, a en effet mis à la charge de la Sécurité Sociale cette contribution financière estimée à 20 millions d’euros. Le Ministre a toutefois assujetti le versement de cette aide à l’assurance à un engagement des médecins bénéficiaires dans une démarche d’amélioration de leurs pratiques, manière élégante de leur rappeler que la qualité de leur travail est la principale cause de l’augmentation des contentieux. De fait, un mauvais médecin peut continuer d’exercer sans grand risque de sanction professionnelle tout en gagnant largement sa vie et en disposant désormais d’une subvention à l’assurance.

Subvention qui n’est encore pas suffisante pour Guy Marie Cousin, président du Syndicat National des Gynécologues et Obstétriciens de France (Syngof), qui appelle ses adhérents à demander des compléments d’honoraires à leurs patients pour protester contre le blocages de leur tarification. Et d’ajouter que si cela ne convient pas aux patients, « qu’ils aillent à l’hôpital se faire soigner par des praticiens à diplômes étrangers » ! L’Intersyndicale nationale des praticiens à diplôme hors Union Européenne (Inpadhue) s’est vivement indignée, qualifiant ce propos de raciste et discriminatoire, et menaçant son auteur de poursuites pénales. Les assurés sociaux devraient en tirer cette leçon : doivent-ils payer trois fois (cotisations, prix de l’acte dont une partie reste à charge, surtaxe sauvage) un acte médical chez un praticien privé à la piètre qualité de service médical rendu, ou faire travailler l’hôpital public et ses médecins étrangers ? Des médecins dont le travail est contrôlé et évalué, et qui sont congédiés s’ils s’avèrent incompétents, tout en étant payés moitié moins que leurs collègues français. La santé et la salubrité publiques devraient en être améliorées.

Laurent Lejard, septembre 2006.

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