C’est avec trois mois de retard que la Mission Française de l’Année Européenne des Personnes Handicapées a publié la liste des 109 actions financées et des 378 labellisées dans le cadre de l’appel à projets de l’automne dernier. La faiblesse – on pourrait même parler de misère – des moyens mis à la disposition de son Président, Jean- Luc Simon, explique essentiellement ce retard; ce n’est donc pas à lui qu’il faut jeter la pierre mais à son étroite tutelle ministérielle.

La moyenne des subventions attribuée est faible, 3.000 à 6.000 euros par dossier, avec un minimum de 1.500 pour un Forum et un maximum de 10.000 euros pour un projet multi- associations. Ce soutien financier réduit met en difficulté de nombreux organisateurs. Par exemple, le CCAS de Gap (Hautes Alpes) demandait 50% du coût total des actions, soit 15.000 euros; il en obtient cinq fois moins. Son directeur adjoint précise que la Ville apporte un soutien logistique et matériel gratuit en plus de la rallonge de subvention « pour que cette année soit une fête ». Précisons également que toutes les actions de l’Année Européenne n’ont pas un budget de misère : un colloque Médias et Handicaps est annoncé les 13 et 14 juin à Athènes avec 200 participants et 300.000 euros fournis par la Commission Européenne soit 1.500 euros par congressiste !

En France, au moins 34 projets portent sur une activité culturelle ou artistique. On n’imaginait pas un tel foisonnement créatif parmi les personnes handicapées, théâtre, arts plastiques, cinéma, tout est au programme; on remarque particulièrement une rétrospective sur la représentation du handicap à travers l’histoire du cinéma (Compagnie du 3e Oeil, Paris) et un projet d’opéra- mime pour clowns monté par le comédien sourd Joël Chalude. Espérons toutefois que les activités occupationnelles ou de patronage qui se dessinent à travers l’énoncé de certaines autres manifestations ne prendront pas le pas sur la création…

On trouve aussi quelques incongruités parmi les actions financées, telle cette fabrication d’un prototype de fauteuil tout- terrain destiné aux enfants : c’est l’initiative d’une association à vocation commerciale, Ski Assis Evasion, qui vend très cher ses prestations à une clientèle captive, les handicapés moteurs souhaitant faire du ski et des activités de randonnées. Les six premiers prototypes réalisés (par une école d’ingénieurs de Lyon) reviendront à 45.000 euros payés par les finances publiques, l’AEPH contribuant pour 5.000 euros. Son concepteur, Frédéric Bouniol, reconnaît lui- même que la commercialisation éventuelle de ces fauteuils sera confiée à une société privée comme cela s’est produit avec les engins de ski assis. Et leur location aux enfants sera loin d’être gratuite.

La part des villes est importante : 26 municipalités sont subventionnées, dont certaines pour des activités qui se déroulent pourtant chaque année (Marseille, Rueil- Malmaison, Vandoeuvre- les- Nancy, Orléans). Lyon, troisième ville de France, annonce des actions intéressantes dans tous les domaines du handicap. Nice organise en juin une semaine spéciale. Bordeaux finalise son calendrier d’activités. Dans toute cette activité foisonnante, un gros point noir subsiste avec la seconde ville de France, Marseille : si la municipalité a opportunément obtenu le financement d’activités associatives qui ne sont pas nouvelles, elle n’organise rien, pas une seule action pour l’AEPH. Les marseillais n’en seront certainement pas surpris…

Non subventionnées mais labellisées, Paris conduit un programme diversifié et ambitieux et Lille parsème l’année de multiples initiatives. Nous avons par ailleurs demandé à toutes les capitales régionales quelles actions elles envisageaient lors de l’AEPH. Seules Amiens, Bordeaux, Caen, Chalon- en- Champagne, Dijon, Lille et Lyon ont répondu sur les 25 villes contactées. En règle générale, on nous explique que le programme d’initiatives est en cours d’élaboration en concertation avec des associations locales qui attendent le résultat de l’appel à projets lancé par la Mission française d’une année européenne qui tarde décidément à prendre son envol…

Laurent Lejard, mars 2003

La liste des projets financés et celle des premiers labellisés sont disponibles sur le site internet du Ministère de la Santé.

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