En contant la vie et les souffrances de cette dernière, infirme motrice cérébrale, le quotidien Le Monde relance le débat national sur le droit à vivre et mourir dans la dignité. Un débat qui a eu lieu durant plus de trois années en Belgique et qui a abouti à reconnaître dans certaines conditions aux personnes lourdement handicapées et aux malades incurables le droit d’obtenir d’un médecin qu’il puisse mettre fin à leur vie. Les débats au Sénat Belge avaient été ponctués par la lutte de Jean- Marie Lorand, journaliste condamné à vivre couché – par l’évolution de sa maladie dégénérative – et isolé – du fait de l’indifférence sociale. Ses dernières semaines de vie ont été présentées dans un documentaire que nous vous avions commenté en son temps lors sa diffusion sur France 5.

Faire un parallèle entre la vie de Jean-Marie Lorand et celle de Dominique Knockaert n’est pas vain : tous deux renvoient, dans leurs propos, leur souffrance morale à vivre dans une société au mieux indifférente vis- à- vis des personnes lourdement handicapées, au pire cruelle à leur encontre. Si un débat légitime sur le droit à mourir dans la dignité doit être lancé dans notre pays, il devra également traiter du droit à une vie digne, condition essentielle pour que le désespoir ne détruise pas des êtres humains qui ont leur place dans notre société, des potentialités à découvrir et mettre en évidence, des souffrances à traiter, des douleurs à calmer.

Un handicap, fut-il lourd, n’est un fardeau moral que parce qu’une société est incapable de proposer autre chose aux personnes qui le vivent que le seul entretien de leurs fonctions vitales, stockées à domicile ou en institution, sans activité, sans projet, sans avenir : serait- il plus facile d’octroyer une solution de mort plutôt que d’ouvrir plus grandes les portes de la vie ?

Laurent Lejard, mai 2002.

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