L’inauguration et la mise en service commerciale de la ligne de chemin de fer du Train à Grande Vitesse entre Valence, Marseille et Nîmes ont été accompagnées d’une présentation idyllique dans les médias. Quatre jours après que les premiers voyageurs eurent emprunté cette ligne, deux incidents sont venus nous rappeler, ce jeudi 14 juin, à la réalité du quotidien. Le premier a eu les honneurs de la presse nationale : trois heures de retard à cause d’un tassement de ballast selon la Direction de la S.N.C.F, d’un glissement de terrain selon le syndicat Sud Rail. Le même jour, les militants de l’Association des Paralysés de France allaient accueillir un garçonnet et sa maman à la gare Aix TGV tellement flambant neuve qu’elle est encore en chantier ; pour constater que les accès, les comptoirs, les toilettes ne sont pas conformes aux normes d’accessibilité. Qu’un seul ascenseur – qui n’est pas encore mis en service- donne accès à l’unique passerelle desservant les quais. Et que ces derniers ne sont pas équipés d’une rampe d’accès amovible permettant l’accès au train d’une personne en fauteuil roulant en toute sécurité ! Dany Lebailly dut être porté par deux agents de la S.N.C.F qui ont pris en poids enfant et fauteuil roulant électrique : « c’est dangereux, dit Dany, le fauteuil est lourd, s’il glisse des mains, moi je casse ! »

Tout devrait rentrer dans l’ordre le 25 juin, date de l’inauguration officielle de cette gare construite au milieu d’une garrigue quasi- déserte. Sauf les toilettes (payantes) à nettoyage automatique, inutilisables par un paralytique : délicate attention, le papier hygiénique y est placé derrière votre dos ! La faute en reviendrait à la S.N.C.F « qui a référencé sur son catalogue fournisseurs des toilettes automatiques dont le modèle nous est imposé » précise le maître d’oeuvre. Et pour se rendre dans cette gare perdue, les personnes handicapées n’ont guère le choix : se faire accompagner ou utiliser leur voiture qu’elles stationneront sur des places réservées mais de dimensions standard, très éloignées des 3,70 mètres de large nécessaires pour qu’un paraplégique puisse s’extraire d’un véhicule. Parce que le transport adapté, ici, n’est pas prévu au cahier des charges.

Le champagne et les feux d’artifices sont remisés, et la S.N.C.F a encore du travail pour « nous faire préférer le train »…

Laurent Lejard, juin 2001.

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